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CRITIQUES DE CONCERTS |
15 septembre 2024 |
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Il faut oser se présenter devant le public parisien avec un programme de mélodies dont la majorité des compositeurs n’est connue que des spécialistes. Mais Joyce DiDonato peut tout se permettre, même de donner deux bis aussi contrastés que le Voi che sapete de Chérubin et le Tanti affetti de la Donna del lago.
Et avant, une sorte de panorama de la mélodie d’amour italienne, de Durante, Pergolèse et Caccini à la Spagnola de Di Chiara que chanta jadis Gina Lollobrigida dans le film La belle des belles qui racontait une histoire romancée de la cantatrice Lina Cavalieri.
Et entre ces extrêmes, Rossi, Paisiello, Rontani, Beethoven, Rossini, Santoliquido et quelques autres. Émotion superbement maîtrisée dans l’Amarilli de Caccini ou dans l’air du saule de l’Otello de Rossini, charme, humour, gaieté, tristesse, tous les sentiments, toutes les humeurs sont traduits avec la même spontanéité, une identique intelligence et une musicalité sans faille. Et que dire de la voix, si ce n’est qu’elle se prête à tout ce que la cantatrice veut exprimer avec autant de naturel que si elle parlait.
L’intérêt de toutes ces mélodies n’est pas d’un égal niveau, mais Joyce DiDonato est la première à le savoir et elle fait tout passer comme il convient, sans emphase quand ce n’est pas nécessaire, avec un petit côté second degré quand il le faut. Car chez elle tout est parfait, des deux robes du soir, une pour chaque partie du concert avec bijoux assortis, à la tenue en scène, théâtrale, mais sans excès intempestif.
Le geste, la démarche sont élégants, le sourire radieux ou malicieux. La concentration est permanente, même quand la chanteuse feint de s’amuser. La voix, le public parisien la connaît bien, avec ses couleurs personnelles, sa fraîcheur, sa souplesse, sa lumière, une totale maîtrise technique lui permettant toutes les nuances de dynamique et notamment une fantastique variété de sons piano ou mezza voce. Avec tous ces atouts, Joyce DiDonato peut donc se permettre de chanter Toselli ou Donaudy aux côtés de Beethoven et de Leoncavallo. On en redemanderait.
Elle est très bien soutenue et aidée dans ce comportement où tout est musique par David Zobel, avec qui la complicité est complète et qui sait lui aussi mettre de la musique partout, même là où on pourrait la chercher quelque peu. Une soirée brillante, sympathique, originale, terminée par une standing ovation déclenchée par ce Tant affetti que l’on n’osait espérer.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 16/06/2010 Gérard MANNONI |
| Récital de la mezzo-soprano Joyce DiDonato accompagnée au piano par David Zobel dans la série des Grandes Voix au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Durante, Pergolesi, Caccini, Rossi, Paisiello, Rontani, Beethoven, Rossini, Santoliquido, Pizetti, Toselli, Donaudy, Casteln uovo-Tedeso, Buzzi-Peccia, Leoncavallo, Giuranna, Di Chiara
Joyce DiDonato, mezzo soprano
David Zobel, piano | |
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