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CRITIQUES DE CONCERTS |
04 octobre 2024 |
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Concert Schumann des Wiener Philharmoniker sous la direction de Christian Thielemann au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
Vienne au secours de Thielemann
Ses précédentes incursions schumanniennes avaient évolué de la catastrophe pure et simple au manifeste pangermaniste, déclenchant à chaque fois la controverse. Dans son entêtement, Christian Thielemann revient à Paris avec un programme entièrement consacré au maître rhénan, et trouve un semblant de salut en les pupitres des Wiener Philharmoniker.
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Schumann et Thielemann, ou la drôle de rencontre entre un compositeur et son serviteur au pupitre, révélée d’abord par des enregistrements catastrophiques à la tête du Philharmonia au tournant des années 2000. Orchestre éteint, conduite du discours erratique, émaillée de points d’arrêt, de surlignages téléphonés, d’opacité sonore et de tics insoutenables à la seule écoute.
À la rentrée 2002, le chef allemand avait aussi prévu Schumann pour son premier concert avec les Wiener Philharmoniker au Théâtre des Champs-Élysées, avant de se raviser in extremis, pour donner à la place une exécution d’Une vie de héros de Strauss à coller les auditeurs à leur fauteuil, souvenir d’orchestre impérissable dans la capitale.
En mai 2008 enfin, le Berlinois profitait du détour au TCE des Münchner Philharmoniker, dont il était alors le patron, pour partager enfin avec les Parisiens sa conception de la Quatrième Symphonie. Souvenir mitigé devant l’épaisseur de la vision, relayée par un orchestre charnu mais illustrant une manière bien désuète d’aborder Schumann par le biais de sa seule germanité.
Revoilà donc le grand prêtre de la tradition Hochdeutsch à nouveau dans l’ultime symphonie. Mais, et c’est là plus qu’un détail, ce sont cette fois les lumineux Wiener Philharmoniker qui officient, et cela change assez la donne pour que l’on reconsidère cette interprétation.
Certes, ceux qui ne supportent pas le yo-yo rythmique, les seconds thèmes systématiquement ralentis, les tutti pléthoriques dépourvus de tranchant, les effets dans la conduite de la forme sonate, les accords finaux amortis et baveux, en seront toujours pour leurs frais, même si la tendance semble s’amoindrir au fil des ans.
Mais le Philharmonique de Vienne, avec son élégance légendaire, distille toute sa superbe pour assumer ces choix d’une manière convenable à l’oreille. On restera donc sur l’impression d’une Quatrième large, puissante, au beau souffle karajanesque, portée par des instrumentistes experts – la transition III-IV, admirable de tenue et de legato dans le crescendo.
On ne pourra en dire autant d’une Première Symphonie passablement lourdingue, sans l’énergie vitale d’une floraison éclatante de Printemps – comment ne pas penser ici aux derniers concerts viennois de Bernstein en comparaison ? –, et qui ne surnage que par les timbres une fois de plus incomparables des Viennois – un mouvement lent où s’exhalent le souffle d’une flûte, la noblesse de trois trombones, et un tapis de cordes comme on en rêve de ce côté-ci du Rhin.
Et si le choix de l’Ouverture, Scherzo et Finale en début de soirée pouvait se justifier comme mise en bouche plutôt agréable, quelle idée d’avoir programmé la rébarbative Fantaisie pour violon et orchestre, occasion pour le Konzertmeister Rainer Küchl, visiblement ultra nerveux, de s’abîmer dans des écarts de justesse inqualifiables et des accidents de parcours incessants ?
On retiendra surtout ce bouche-trou de programme comme la seule occasion à ce jour de voir Thielemann diriger avec une partition sous les yeux, pour garder in fine en mémoire l’énergie virile d’une Quatrième Symphonie de beau gabarit mais un peu mastoc, il va sans dire.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 23/04/2012 Yannick MILLON |
| Concert Schumann des Wiener Philharmoniker sous la direction de Christian Thielemann au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Robert Schumann (1810-1856)
Ouverture, Scherzo et Finale en mi majeur op. 52
Symphonie n° 1 en sib majeur op. 38 « le Printemps »
Fantaisie pour violon et orchestre en ut majeur op. 131
Rainer KĂĽchl, violon
Symphonie n° 4 en ré mineur op. 120
Wiener Philharmoniker
direction : Christian Thielemann | |
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