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CRITIQUES DE CONCERTS |
11 octobre 2024 |
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Récital de la contralto Marie-Nicole Lemieux accompagnée par le pianiste Daniel Blumenthal et le Quatuor Psophos à l’Amphithéâtre de l’Opéra Bastille, Paris.
La cantatrice aux pieds nus
Amphithéâtre Bastille archicomble pour ce concert où le nom de Marie-Nicole Lemieux avait peut-être plus attiré les foules que celui de Lekeu ou d’Elgar. Avec de brillants complices, la tonique cantatrice a défendu un programme difficile qu’elle a sauvé de la morosité grâce à son irrésistible tempérament et à son immense talent.
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Comme on l’avait dit d’Edith Piaf, Marie-Nicole Lemieux nous ferait pleurer en chantant l’annuaire téléphonique. Avec un timbre pareil, cette générosité, cet investissement, cette manière de chanter avec une énergie émanant de tout le corps, cette grande intelligence des mots, elle est capable de nous bouleverser dans tous les répertoires.
Et celui qu’elle avait choisi – à dessein ? – pour ce concert accompagné par Daniel Blumenthal et pour certaines pièces par l’excellent Quatuor Psophos, a pleinement bénéficié de toutes ces exceptionnelles qualités. Il s’agissait en effet d’un ensemble d’œuvres marquées par toute la nostalgie cafardeuse du postromantisme du XIXe siècle basculant vers le XXe.
Alma Mahler, Lekeu, Chausson, Elgar, c’était une alternance de pages fortes et d’autres bien plus improbables, qui aurait engendré une certaine monotonie grise sans justement les incroyables couleurs de la voix de cette artiste complète, capable aussi bien d’émouvoir que de s’acquérir d’emblée la sympathie du public avec malice en annonçant, preuve à l’appui, qu’elle chante pieds nus car elle a oublié ses chaussures.
Les six mélodies d’Alma Mahler débutant le programme s’imposent sans difficulté par leur belle écriture très sûre, exprimant avec une sensibilité fine les subtils frémissements d’un monde ombreux, où la nature est omniprésente, souvent angoissante, riche de rêves, d’interrogations, à la fois obsédante et insaisissable, dans une nostalgie sous-jacente, entrecoupée de grands élans lyriques.
Nature toujours, compagne des amours malheureuses, refuge mortifère ultime de l’amante abandonnée dans la Chanson perpétuelle, poème de Charles Cros mis en musique par Chausson. Qu’il s’agisse du texte ou de la musique, nous sommes malheureusement loin de la concision autrement dramatique de la Marguerite au rouet de Schubert.
Mais quelles belles couleurs a quand même le chagrin d’amour avec la voix de Marie-Nicole Lemieux ! Même les musiques de Lekeu et d’Elgar, finalement assez impersonnelles et uniformes malgré leurs occasionnels généreux élans, parviennent à s’animer tant la cantatrice y met de cœur, de conviction, de force expressive, avec un constant rayonnement vocal.
Et il faut bien cela pour que le public d’aujourd’hui puisse encore vibrer à l’expression assez décadente d’états d’âme fin-de-siècle que d’autres compositeurs d’alors ont su exprimer avec autrement plus d’originalité, de diversité et de force.
L’idée de programmer certaines mélodies pour voix et quatuor à cordes était bonne, car la nature même de la voix de Marie-Nicole Lemieux est idéale pour dialoguer avec les instruments à cordes. Le Quatuor Psophos se montre un partenaire parfait, très musical et sensible.
Mais tout de même, dans un tel programme, n’a-t-on pas toujours l’impression d’évoluer dans un monde certes intéressant mais quand même assez marginal, en retrait par rapport aux grands créateurs des ces années-là ? On y frôle le génie sans jamais le rencontrer vraiment.
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Amphithéâtre de l'Opéra Bastille, Paris Le 07/03/2013 Gérard MANNONI |
| Récital de la contralto Marie-Nicole Lemieux accompagnée par le pianiste Daniel Blumenthal et le Quatuor Psophos à l’Amphithéâtre de l’Opéra Bastille, Paris. | Alma Mahler (1879-1964)
FĂĽnf Lieder (extraits)
Fünf Gesänge (extraits)
Vier Lieder (extraits)
Guillaume Lekeu (1870-1894)
Molto Adagio pour quatuor Ă cordes
Ernest Chausson (1855-1899)
Chanson perpétuelle
Edward Elgar (1857-1934)
Sea Pictures op. 57
Guillaume Lekeu
Trois mélodies
Marie-Nicole Lemieux, contralto
Daniel Blumenthal, piano
Quatuor Psophos | |
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