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CRITIQUES DE CONCERTS 11 octobre 2024

RĂ©cital de la pianiste Khatia Buniatishvili Ă  la salle Pleyel, Paris.

Reine de la frappe
© Esther Haase

Époustouflants fortissimos et silences impérieux atteignent différemment l’écoute d’un public sidéré par tant d’excès. Ce qu’ils révèlent de Ravel et de Moussorgski reste à discuter selon les rapports de chacun à ces deux musiciens, ce soir apparus frères d’apocalypse sous les doigts de Khatia Buniatishvili.
 

Salle Pleyel, Paris
Le 04/03/2014
Claude HELLEU
 



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  • Superbe dans son fourreau lamĂ© argent Ă©tincelant, Khatia Buniatishvili prend possession de son piano avec la mĂŞme dĂ©cision tranquille que celle de son apparition. HabituĂ©e de la scène depuis ses 6 ans, la pianiste gĂ©orgienne âgĂ©e maintenant de 27 ans irradie un mĂ©tier parfaitement maĂ®trisĂ©.

    Aussitôt assise bien droite, pratiquement immobile, elle se lance à la poursuite d’une Ondine qui se dérobe à petits coups de queue dans des ondes sans mystère, indifférente à montrer quelque grâce dans ses glissements. Mais boudeuse ? Dépitée ? Tendre ? Rieuse ? Pas davantage.

    À part un moment de véhémence rageuse dans la profondeurs des basses, la Séductrice des eaux demeure d’humeur égale sous une main droite dominante. Foin d’enchantement. Maurice Ravel et Aloysius Bertrand n’en peuvent mais. Des effets d’arpèges, certes, les giboulées des mêmes, non.

    Un Gibet lugubre ? Khatia Buniatishvili est peut-être trop jeune pour pressentir ses hallucinations et s’en effrayer. Nous l’approchons tranquillement, dans des piani où la sonorité a tendance à se dissoudre. Enfin émerge le sib dont le caractère obsessionnel va retentir cent cinquante-trois fois pendant cinquante-deux mesures construites dans une lenteur hors du temps. Mais autour de cette note pivot, glas d’une présence incertaine et changeante ce soir, nulle angoisse ne se resserre. Le pendu demeure seul dans le vide.

    Et Scarbo jaillit, d’emblée furieux. S’affirme tel un monstre. Le gnome est devenu géant. La virtuosité de sa puissance abasourdit. Plus question de pirouettes. L’énergie remplace la frénésie rieuse et grinçante. Trop puissant pour être instable, Scarbo impose sa superbe.

    L’élasticité des sauts marque son terrain mais le laisse sur place. Surprise de courte durée quand il nous interpelle enfin, soudain assagi. Sa colère revenue plus forte d’avoir hésité commande alors des sonorités orchestrales d’une violence inouïe où se confondent dissonances et cahots du rythme avant la surprise d’une fin nette et coupante.

    De quelle Valse de Ravel, spirale de fin du monde, va nous défier Khatia Buniatishvili ? Grondante, martiale, elle ignore toute sensualité pour mieux et sans attendre déployer des fureurs apocalyptiques en place de ses déchirements dramatiques.

    Le rythme se distingue à peine, aucun ensorcellement ne progresse dans des fortitissmi ahurissants, technique au sommet. On ne saurait plus audacieusement taper sur un piano. Mais l’audace ici choisie n’est pas celle qui arrache corps et âme, ravageuse, inéluctable, telle celle d’un Charles Munch dans sa version orchestrale.

    Les Tableaux d’une exposition de Moussorgski sont brossés avec la même palette de couleurs extrêmes. Une Promenade décidée le demeurera au fil des pièces. Comme pour Scarbo, le caractère fantastique de Gnomus, certes désarticulé, fait place à l’assurance.

    Ambiance sourde mais sans résonnance autour d’Il Vecchio Castello. Là aussi, ostinato de la main gauche disparu dans ses piani. Bydlo d’une belle lourdeur, Poussins à l’allure de jeunes coqs… Les moments se succèdent, impeccables, plus ou moins illustrés d’un répertoire de nuances limité, l’articulation légère quand la partition le veut, les silences coupés net, la lourdeur quand nécessaire.

    L’interprète sait parfaitement son texte mais le toucher manque de couleurs tant qu’il ne s’épanouit pas en déferlements époustouflants dans des basses où le travail de résonances se personnalise, remarquable, et nous offre une Grande porte de Kiev somptueusement monumentale.




    Salle Pleyel, Paris
    Le 04/03/2014
    Claude HELLEU

    RĂ©cital de la pianiste Khatia Buniatishvili Ă  la salle Pleyel, Paris.
    Maurice Ravel (1875-1937)
    Gaspard de la nuit
    La Valse
    Modeste Moussorgski (1839-1881)
    Tableaux d’une exposition
    Khatia Buniatishvili, piano

     


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