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CRITIQUES DE CONCERTS |
04 octobre 2024 |
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Nouvelle production de Chérubin de Massenet dans une mise en scène de Juliette Deschamps et sous la direction de Jean-Marc Zeitouni à l’Opéra Comédie de Montpellier.
Chérubin et la jet set
Moins célèbre que Manon ou Werther, le Chérubin de Massenet est la curiosité musicale de cette rentrée lyrique à Montpellier. On doit cette entreprise courageuse à Valérie Chevalier en ouverture de sa première saison à la tête de l’Opéra Comédie. Un plateau et un orchestre de qualité sauvent la mise en scène quelque peu décevante de Juliette Deschamps.
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Chérubin emprunte à Mozart son statut de rôle travesti et son amour des belles comtesses. Pour le reste, difficile de suivre à la trace le livret de Beaumarchais dans cette pièce de Francis de Croisset qui servit de prétexte à l'opéra de Jules Massenet. L'aristocratie version Juliette Deschamps a laissé place à une jet set flambeuse et rigolarde qui trompe son ennui dans une villa californienne au bord d'une piscine. Avec l'ambiguïté sexuelle comme fil rouge, les personnages arborent une mode vestimentaire aux confins d'un mauvais goût plus ou moins assumé.
Entre l'improbable tutu et (très) haut de forme pour le Philosophe et le smoking castillan avec souliers vernis et chapeau pour Chérubin, le reste du plateau est victime du goût de la costumière Vanessa Sannino pour les contrastes acidulés et les motifs composites. L'agression rétinienne est surlignée par l'intervention de deux couples de danseurs dont la présence dispensable crée une sorte de halo de gestes autour des protagonistes dans ce décor unique signé Macha Makeïeff.
Entre ridicule assumé et vision décalée, la lecture de ce vaudeville mondain tient surtout à la prestation agile et souple de Marie-Adeline Henry, rôle-titre aux moyens techniques et expressifs étrangement surdimensionnés par rapport au personnage. Victime d'un livret trop verbeux et qui ne dégage pas totalement le chant de sa gangue parlando-bourgeoise, son Chérubin irrite autant qu'il charme. Son Je suis gris ! Je suis ivre ! ou Je ne veux plus aimer jamais sont les maigres récompenses pour qui saura se satisfaire d'interminables scènes de boulevard à la mode Belle Époque.
L'Ensoleillad de la soprano turque Çiğdem Soyarslan mettra plusieurs minutes Ă rĂ©chauffer ses aigus, avant d'offrir le volume et l'abattage qui finissent par faire mouche dans ce rĂ©pertoire. Igor Gnidii est un Philosophe Ă l'humour docte et mordant, attentif Ă bien placer sa ligne et ses syllabes… Ă l'opposĂ© d'une Norma Nahoum, Nina juvĂ©nile au timbre blond et charnu. François Piolino rĂ©ussit un Duc Ă©patant et tĂŞte Ă claques, bien secondĂ© dans la liste des rĂ´les bouffes par le Comte irrĂ©sistible de Philippe Estèphe. Au petit jeu des voyelles Ă©tirĂ©es et des aigus picotĂ©s, la Baronne d'HĂ©lène Delalande l'emporte sur la Comtesse de Michèle Lagrange.
Jean-Marie Zeitouni signe en fosse un Massenet très énergique et dynamique, sans s'embarrasser des scories émollientes qui peuplent cette inoffensive partition. Le feu couve sous la glace des conventions, légitimant ainsi l'intérêt de remonter une œuvre qui pâtit de la présence intimidante de Manon et Werther.
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Opéra Comédie, Montpellier Le 18/10/2015 David VERDIER |
| Nouvelle production de Chérubin de Massenet dans une mise en scène de Juliette Deschamps et sous la direction de Jean-Marc Zeitouni à l’Opéra Comédie de Montpellier. | Jules Massenet (1842-1912)
Chérubin, opéra en trois actes (1905)
Livret de Francis de Croisset et Henri Cain
Chœur et Orchestre de l’Opéra national Montpellier Languedoc-Roussillon
direction : Jean-Marie Zeitouni
mise en scène : Juliette Deschamps
décors : Macha Makeïeff
costumes : Vanessa Sannino
éclairages : François Menou
préparation des chœurs : Noëlle Geny
Avec :
Marie-Adeline Henry (ChĂ©rubin), Çiğdem Soyarslan (l’Ensoleillad), Norma Nahoum (Nina), Michèle Lagrange (la Comtesse), HĂ©lène Delalande (la Baronne), Igor Gnidii (le Philosophe), Philipe Estèphe (le Comte), François Piolino (le Duc), Julien VĂ©ronèse (le Baron), Denzil Delaere (le capitaine Ricardo), Jean-Vincent Blot (l’Aubergiste), HervĂ© Martin (un Officier). | |
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