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CRITIQUES DE CONCERTS |
09 septembre 2024 |
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Dans l’acoustique idéale de Carnegie Hall où s’allient les qualités d’un rendu à la fois rond et précis, la Symphonie en si mineur de Schubert débute par les superbes sonorités de violoncelles et contrebasses du San Francisco Symphony Orchestra, offrant à l’œuvre inachevée une immédiate gravité.
L’Allegro moderato trouve sous la direction de Michael Tilson Thomas une majesté grâce à un style beethovénien, lien logique pour une composition de 1822 écrite sous les doigts d’un compositeur autrichien fasciné par celui de Bonn. L’Andante con moto suit la même progression et met en avant les superbes soli du hautbois et de la clarinette ; bien que toujours sérieux, ce mouvement garde ici une certaine légèreté et ne développe pas toute la nostalgie contenue dans la partition.
Au retour d’entracte, l’orchestre s’est renforcé pour jouer le Das Lied von der Erde dans un auditorium dont l’histoire est presque aussi liée à Gustav Mahler que celui du Musikverein de Vienne. Comme toujours sur les scènes de New York, l’ensemble est sur un seul niveau et l’on ne voit donc presque pas les musiciens du fond cachés par ceux de devant, sans empêcher pour autant le son de s’épanouir parfaitement.
L’attaque initiale de la chanson à boire (Das Trinklied vom Jammer der Erde) prépare à la dynamique d’ensemble, dans laquelle les cuivres se montreront toujours quasi impeccables. Le ténor Simon O’Neill débute avec vaillance, malgré une voix nasale qui s’approche plus aujourd’hui du timbre de Loge que de celui de Parsifal. Sa seconde intervention intelligemment tenue intéresse moins, et l’on aime surtout la troisième dans Der Trunkene im Frühling grâce à la qualité d’investissement et de prononciation du texte.
La mezzo-soprano Sasha Cooke apporte plus de douceur dans les beaux pastels sombres de sa voix. Sa diction également exemplaire dès Der Einsame im Herbst fascine dans les derniers instants grâce aux Ewig répétés et diminués avec splendeur jusqu’au pianissimo. Mahler avait tant de doute sur cette partie qu’il l’avait finalement privilégiée pour baryton, elle retrouve toute son ampleur et peut-être encore plus de force dans une voix féminine comme celle-ci.
Le San Francisco Symphony Orchestra soutient par les graves un climat toujours empreint d’austérité, et se trouve seulement en retrait au troisième chant lorsqu’on y sent le chef agacé par son impuissance à interrompre les applaudissements après chaque section. Ceux-ci cassent sa concentration au point qu’il interrompt deux fois son geste avant de relancer l’ensemble. Il dirige avec un geste toujours aussi classieux les musiciens dont se démarquent le groupe de premiers violons et les harpes, mais surtout une première flûte aux fantastiques sonorités contemplatives lors du dernier mouvement. On regrette seulement pendant la coda de ne pas entendre mieux la mandoline, alors que les violons dirigés une dernière fois par Tilson Thomas conduisent inéluctablement cette soirée vers la fin.
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Carnegie Hall, New York Le 14/04/2016 Vincent GUILLEMIN |
| Concert du San Francisco Symphony Orchestra sous la direction de Michael Tilson Thomas Ă Carnegie Hall, New-York. | Franz Schubert (1797-1828)
Symphonie n 8 en si mineur D.759 « Unvolledete »
Gustav Mahler (1860-1911)
Das Lied von der Erde
Simon O’Neill, ténor
Sasha Cooke, mezzo-soprano
San Francisco Symphony Orchestra
direction : Michael Tilson Thomas | |
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