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CRITIQUES DE CONCERTS |
04 octobre 2024 |
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Dixième Symphonie de Mahler par l’Orchestre de Paris sous la direction de Daniel Harding à la Philharmonie, Paris.
Mahler inachevé
Nouveau directeur musical de l’Orchestre de Paris, Daniel Harding porte dès ce second concert de rentrée la grande Dixième Symphonie de Mahler, déjà enregistrée avec les Wiener Philharmoniker en 2007. Son approche n’a pas beaucoup évolué, même si la pâte sonore démontre plus de maturité, tandis que la phalange parisienne aurait gagné à plus de densité.
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Mort d’une endocardite en 1911, Gustav Mahler n’a pas le temps d’achever sa Dixième Symphonie et succombe à la malédiction tant redoutée d’une Neuvième pour testament, comme auparavant Beethoven, Bruckner, ou sept ans plus tôt Dvořák. Il laisse un premier mouvement quasi définitif et de nombreuses esquisses, qui intéresseront notamment Alban Berg ou Ernst Křenek, sans pourtant conduire à une reconstruction globale de l’œuvre, initiée plus tardivement après la Seconde Guerre mondiale par le musicologue anglais Deryck Cooke.
Comme son mentor Simon Rattle aujourd’hui, auteur de deux enregistrements de la symphonie recomposée, la première dans la version Cooke II (Bournemouth) et la suivante dans l’ultime Cooke III imprimée en 1989 (Berlin), Daniel Harding suit totalement la dernière partition du musicologue sans tenter d’y apporter ses propres modifications, à l’inverse d’autres chefs, dont Rudolf Barshaï, proposant des allègements qui eurent certainement été très adaptés à la direction de ce soir.
La première phrase d’altos forme à la Philharmonie un superbe nappage, prouvant le gain de maturité du chef anglais et sa capacité à concentrer le son pour immédiatement créer l’émotion et donner un caractère réfléchi à la partition. Malheureusement, les violons et surtout les premiers d’entre eux conduits ce soir par Philippe Aïche perdent ensuite en densité et ne parviennent pas à maintenir la tension dans cet Adagio initial, sans que l’on sache si cela provient plus de leur fait ou d’une demande d’Harding lui-même. Dans cette même optique, le chef ne cherche jamais les effets de saturation de la partition et ne joue pas totalement avec les capacités de la salle, ni avec sa réverbération.
À son habitude, la petite harmonie de l’Orchestre de Paris fait des merveilles, à l’image de la première flûte, vibrante de vie dans le Scherzo, ou du premier hautbois, splendide tout au long de l’ouvrage. Dans les cordes, ni les soli du premier violon, ni ceux du premier violoncelle ne touchent tout à fait, et seul le premier alto parvient à exposer une véritable intimité.
Globalement, cette lecture maîtrisée et éclairée est belle, mais ne recherche jamais un caractère tourmenté, même dans le Finale, où les chocs du timbalier et de la grosse caisse semblent porter la trace des coups du sort de la Sixième sans pour autant affecter l’auditeur. Les derniers accords, tout en finesse, recréent l’atmosphère liminaire de l’Adagio et donne une sensation d’élévation aux derniers instants. Un beau moment qui laisse à prévoir d’intéressantes Cinquième et Deuxième du même compositeur cette saison à la Philharmonie de Paris.
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Philharmonie, Paris Le 21/09/2016 Vincent GUILLEMIN |
| Dixième Symphonie de Mahler par l’Orchestre de Paris sous la direction de Daniel Harding à la Philharmonie, Paris. | Gustav Mahler (1860-1911)
Symphonie n° 10 en fa# majeur
Reconstruction Deryck Cooke III (1976-1989)
Orchestre de Paris
direction : Daniel Harding | |
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