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CRITIQUES DE CONCERTS |
11 octobre 2024 |
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Concert de l’Ensemble Intercontemporain sous la direction de Gregor Mayrhofer à la Cité de la Musique, Paris.
Structures musicales
Afin d’accompagner la pièce Rothko Chapel de Morton Feldman, l’Ensemble Intercontemporain a prévu un intelligent programme composé de quatre autres ouvrages créés à partir de structures physiques, allant d’une statue de Mozart à la Fontaine Stravinski. Dirigé par Gregor Mayrhofer, ce concert fait surtout ressortir sa propre pièce.
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Dans la grande salle de concerts de la Cité de la Musique remplie par un public éclectique silencieux et attentif, l’Ensemble Intercontemporain propose en février un programme autour de la mythique Rothko Chapel, œuvre représentant non seulement les toiles du peintre américain, mais aussi l’édifice lui-même. Les cinq pièces du jour sont donc toutes représentatives d’une structure physique, développées en structures musicales dans des compositions datant de 2013 à 2016.
M, pour baryton et ensemble, inspiré à Jay Schwartz par la statue eine Hommage de Markus Lüpertz, installée sur l’Ursulinenplatz de Salzbourg, ouvre la soirée. Cette proposition pour quinze musiciens et baryton met en avant les cuivres (trompette, trombone et cor) dans de longues notes glissées ascendantes et descendantes, ainsi que la contrebasse, très présente dès l’introduction, tandis que l’excellent baryton Evan Hugues prend la place de Dietrich Henschel présent à la création en 2013 pour porter un texte fragmentaire extrait du Requiem de Mozart, dont on entend à l’occasion des thèmes aussi dans les instruments.
La seconde pièce, pour flûte seule, de Matthias Pintscher, beyond (a system of passing), inspiré par A.E.I.O.U d’Anselm Kiefer, créée également en 2013 à Salzbourg (par Emmanuel Pahud) a le mérite de mettre en avant la soliste de l’Ensemble Intercontemporain Sophie Cherrier, superbe tant dans la capacité à tenir la ligne que dans celle à alterner des sons soufflés sans créer de note, avec des phrases très rapides et virtuoses, ainsi que des sons piqués ou claqués selon l’utilisation de la langue. Une légère fatigue se fait ressentir autour de dix minutes, juste avant la coda, laissant tout de même la sensation que l’ouvrage n’est pas le meilleur de l’actuel directeur musical de la formation.
Troisième pièce donnée avant l’entracte, Grand hommage à l’âge de la technique est un hommage au relief éponyme d’Arnaldo Pomodoro. Le compositeur au pupitre pour ce concert, Gregor Amadeus Mayrhofer, en dirige l’exécution d’un geste rigoureux, ajustant du haut de ses 29 ans un ensemble d’éléments cycliques et de jeu sonore déjà plus dynamiques que ceux de son maître Manfred Trojahn.
En seconde partie, on retrouve le procédé de composition à partir d’une œuvre physique, avec Et si nous tournions autour de ces fontaines hallucinées inspiré au jeune Benjamin Attahir de la Fontaine Stravinski de Tinguely et Saint Phalle, inaugurée en 1983 dans le quartier Beaubourg. Ici le petit ensemble musical met en avant les deux violonistes, debout chacune d’un côté du chef et se répondant par de longues blanches tirant souvent sur la chanterelle. L’hommage à Stravinski y est flagrant avec la citation de plusieurs de ces œuvres, de Petrouchka à l’Histoire du soldat en passant par le Sacre.
Déjà bien copieuse, cette soirée sera clôturée sur une composition de 1971 devenue mythique, Rothko Chapel pour soprano, contralto, chœur mixte et instruments avec ici et comme souvent les deux voix solistes intégrées dans le chœur, l’ensemble les Cris de Paris, toujours aussi bien préparé par Geoffroy Jourdain. Gregor Mayrhofer encore au pupitre parvient à agencer parfaitement l’ensemble avec la mise en avant du percussionniste Samuel Favre à sa droite, et du sublime alto de John Stulz à sa gauche, ressortant de la prestation par le mysticisme donné à sa partition et par la virtuosité de sa dernière partie, pour clore une soirée intelligente autant que passionnante.
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Cité de la Musique, Paris Le 24/02/2017 Vincent GUILLEMIN |
| Concert de l’Ensemble Intercontemporain sous la direction de Gregor Mayrhofer à la Cité de la Musique, Paris. | Jay Schwartz (*1965)
M pour baryton et ensemble
Création française
Evan Hughes, baryton
Matthias Pintscher (*1971)
beyond (a system of passing), pour flûte
Sophie Cherrier, flûte
Gregor Mayrhofer (*1987)
Groβe Huldigung an das technische Zeitalter (Omaggio a Arnoldo Pomodoro)
Création française
Benjamin Attahir (*1989)
Et si nous tournions autour de ces fontaines hallucinées
Création française
Morton Feldman (1926-1987)
Rothko Chapel, pour soprano, contralto, chœur mixte et instruments
Les Cris de Paris
préparation : Geoffroy Jourdain
Ensemble intercontemporain
direction : Gregor Mayrhofer | |
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