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CRITIQUES DE CONCERTS |
10 octobre 2024 |
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Les VĂŞpres de la Vierge de Monteverdi sous la direction de Sir John Eliot Gardiner au festival de Saint-Denis 2017.
Une fresque saisissante
Les Vêpres de Monteverdi dirigées par Sir John Eliot Gardiner ont été à la hauteur de leur légende, peut-être l’ont-elles même dépassée. Avec l’incomparable Monteverdi Choir et les English Baroque Soloists, leur originalité s’est révélée dans toute sa splendeur. Un moment exceptionnel dans le cadre idéal de la Basilique de Saint-Denis.
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Nul mieux que Sir John Eliot Gardiner et le Monteverdi Choir ne sauraient habiter d’une telle vie les Vêpres de Monteverdi. Depuis 1964, année de leur première interprétation d’une œuvre pensée pour la Basilique Saint-Marc de Venise en 1610, leur liaison n’a cessé d’approfondir et de nuancer la diversité d’une musique qui pour la première fois mêlait psaumes et motets extra-liturgiques. Dans la Basilique Cathédrale de Saint-Denis, dont Sir Gardiner illumine comme nul autre l’espace et l’acoustique, ce recueil de musique publique et privée, pour reprendre deux termes du grand chef anglais, a littéralement subjugué son public.
Quelle aisance, quelle simplicité pour marier sans jamais la moindre répétition la saisissante juxtaposition de sonorités inédites, créer une telle variété de climats au sein de l’architecture grandiose qui les relie ! Profanes et sacrés, vastes fresques et moments plus intimes se renouvellent, irradiés d’une inspiration jouissive. Dès le Deus in Adiutorium, la flamme exalte le soliste qui, là -haut, projette magnifiquement son appel à Dieu, comme cette flamme exalte différemment et tout autant les six voix du Chœur et les six pupitres des English Baroque Soloists. Encore plus haut, devant l’orgue ou parmi nous, discrètement, sereinement, au fil des treize pièces et de leurs combinaisons instrumentales et vocales, chacun et chacune changera de place selon les colorations voulues. Teintes serties par bois et cordes d’une justesse aux sonorités rares.
Présence et mystère. Humilité, gravité ou triomphe des Amen. L’émerveillement n’a de cesse. Dans l’entente fusionnelle d’individualités qu’il faudrait toutes citer, l’osmose transcende les êtres. Solistes issus du chœur, voix droites à l’éclat magnifiquement timbré, élocution parfaite, sobre et inspirée, les ténors Krystian Adam, Peter Davoren, Gareth Treseder, le contre-ténor Michal Czerniawski, les barytons Alex Ashworth et Robert Davies, la basse Giancula Burato personnalisent psalmodies et ritournelles et s’intègrent aussi naturellement dans un Monteverdi Choir éblouissant de précision. Le duo des deux sopranos, Francesa Boncompagni et Emanuel Galli, bientôt concertant avec les cordes, découvre la richesse des harmonies. L’égalité règne sur toutes les tessitures. La ferveur, l’enthousiasme et la puissance, la douceur, la tendresse, la spiritualité témoignent d’un humanisme d’une grandeur nouvelle.
C’est que vingt ans après les Vêpres des Sacrae Cantiuculae (1582), le Vespro della beata Vergine relève d’un autre Monteverdi. Le compositeur y brise le style habituel des compositions religieuses de son époque. Sur les paroles de psaumes n’appartenant pas tous à l’office marial, il initie des tournures d’opéra (Orfeo existe) qui ouvrent une expressivité en son temps révolutionnaire et libertaire. D’où les infinies séductions que Sir John et ses musiciens exaltent de plus en plus souverainement au fil des ans sans que jamais la probité ne cesse d’en couronner le pouvoir. Magnifié sous les voûtes de la Basilique Saint-Denis, son rayonnement se nomme amour.
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Basilique, Saint-Denis Le 27/06/2017 Claude HELLEU |
| Les VĂŞpres de la Vierge de Monteverdi sous la direction de Sir John Eliot Gardiner au festival de Saint-Denis 2017. | Claudio Monteverdi (1567-1643)
Vespro della beata Vergine
Francesca Boncompagni
Emanuela Galli
Michal Czerniawski
Krystian Adam
Peter Davoren
Gareth Treseder
Alex Ashworth
Robert Davies
Gianluca Buratto
The Monteverdi Choir
The English Baroque Soloists
direction : Sir John Eliot Gardiner | |
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