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CRITIQUES DE CONCERTS 19 mars 2024

Nouvelle production de Tristan et Isolde de Wagner dans une mise en scène de Dmitri Tcherniakov et sous la direction de Daniel Barenboïm au Staatsoper Unter den Linden, Berlin.

Tristan entre en régression
© Monika Rittershaus

Dmitri Tcherniakov, connu pour ses mises en scène énigmatiques, présente un Tristan plutôt banal au départ et progressivement de plus en plus prenant et convaincant dans sa plongée psychanalytique. La Staatskapelle Berlin sous la direction de Barenboïm et surtout Andreas Schager sont à la hauteur de cette véritable réouverture du Staatsoper Unter den Linden.
 

Staatsoper unter den Linden, Berlin
Le 15/02/2018
Hermann GRAMPP
 



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  • Après les cĂ©rĂ©monies officielles de dĂ©cembre, avec concerts, nouvelles productions de Hänsel et Gretel et du Couronnement de PoppĂ©e, c’est un nouveau Tristan qui marque rĂ©ellement la rĂ©ouverture du Staatsoper de Berlin. Daniel BarenboĂŻm, l’un des interprètes les plus importants de l’œuvre depuis bientĂ´t quarante ans, peut paraĂ®tre quelquefois figĂ© quand il s’agit d’accĂ©lĂ©rer, mais gère pour autant magnifiquement la grande arche du prĂ©lude et des actes, Ă  la tĂŞte d’une Staatskapelle d’une rare intensitĂ©. La distribution vaut dĂ©jĂ  par la seule prĂ©sence des noms sur le papier : roi Marke très sombre de Stephen Milling, Brangäne toujours souveraine d’Ekaterina Gubanova, Kurwenal admirablement projetĂ© de Boaz Daniel.

    La mise en scène très attendue de Dmitri Tcherniakov est l’occasion d’une véritable régression psychanalytique. Premier acte : un salon chic de bois sombre dans un navire de croisière de luxe à notre époque. Deuxième acte : le même salon dans les années 1960, cheap et bien défraîchi. Troisième acte : un intérieur 1910, façon château décrépit, loin de ses heures de grandeur et de beauté. Nous sommes évidemment dans la mémoire et la souffrance de Tristan, qui remonte jusqu’à son Œdipe.

    Au I, l’écran plat au mur et une société jet-set artificielle ressemblent à du mauvais Marthaler. Mais dès le II, le même décor délabré commence à susciter l’intérêt, particulièrement pendant une très belle projection vidéo sur un tulle à l’avant-scène occupant le long duo d’amour. Quant au III, idée géniale et wagnérienne s’il en est, il semble tout droit sorti de la Montagne magique de Thomas Mann, avec le cor anglais sur scène en Hans Castorp avec son coffre de bois, qui s’installe sur le lit mortuaire en fond de scène. Tristan, agonisant sur son canapé blanc, est comme ressuscité par l’étrange mélopée le renvoyant à ses souvenirs les plus lointains, les plus profondément refoulés.

    © Monika Rittershaus

    Lentement, Andreas Schager s’éveille et se transforme en véritable Heldentenor, plus dans la lignée de Max Lorenz que de Lauritz Melchior, beaucoup moins parfait dans la nuance piano ou l’intériorité que dans des éruptions fiévreuses jamais effrayées le moins du monde par la masse orchestrale que Barenboïm fait émerger de la fosse. Tristan revoit ses parents, présents sur scène par des figurants, pendant qu’il prononce « lorsque mon père m’engendra et mourut, lorsque ma mère me mit au monde en mourant », avec son père allongé sur le lit comme dans le tableau de la Renaissance le Christ mort d’Andrea Mantegna.

    La puissance émotionnelle de cette régression psychanalytique valide d’autant plus la mise en scène que la détérioration progressive de la scénographie produit paradoxalement une intensification de la beauté de l’image, trop proprette au lever de rideau, beaucoup plus vraie et crue en fin de soirée pendant le magnifique acte de Tristan. Quand Isolde arrive, trop tard, les hommes de Marke portent le corps du défunt sur sa couche mortuaire dans la même position que son père. Anja Kampe chante alors le Liebestod avec la plus belle brillance et chaleur dans la coloration du piano au départ, avant un moment inoubliable lorsqu'elle se retire en fond de scène, éclairée toute seule à la Wieland Wagner, tandis que se referme le rideau sur les derniers accords.




    Staatsoper unter den Linden, Berlin
    Le 15/02/2018
    Hermann GRAMPP

    Nouvelle production de Tristan et Isolde de Wagner dans une mise en scène de Dmitri Tcherniakov et sous la direction de Daniel Barenboïm au Staatsoper Unter den Linden, Berlin.
    Richard Wagner (1813-1883)
    Tristan und Isolde, action dramatique en trois actes (1865)
    Livret du compositeur

    Staatskapelle Berlin
    direction : Daniel Barenboim
    mise en scène et décors: Dmitri Tcherniakov
    costumes : Elena Zaytseva
    Ă©clairages : Gleb Filshtinsky
    vidéo : Tieni Burkhalter
    préparation des chœurs : Raymond Hughes

    Avec :
    Andreas Schager (Tristan), Stephen Milling (König Marke), Anja Kampe (Isolde), Boaz Daniel (Kurwenal), Ekaterina Gubanova (Brangäne), Stephan Rügamer (Melot), Linard Vrielink (Junger Seeman / Hirt), Adam Kutny (Ein Steuermann), Kristin Becker (mère de Tristan), Mike Hoffmann (père de Tristan).

     


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