altamusica
 
       aide
















 

 

Pour recevoir notre bulletin régulier,
saisissez votre e-mail :

 
désinscription




CRITIQUES DE CONCERTS 19 mars 2024

Reprise des Maîtres chanteurs de Nuremberg de Wagner dans la mise en scène de Barrie Kosky et sous la direction de Philippe Jordan au festival de Bayreuth 2018.

Bayreuth 2018 (1) :
La Nuremberg céleste

© Enrico Nawrath / Bayreuther Festspiele

Pour la deuxième année des Meistersinger selon Barrie Kosky et Philippe Jordan à Bayreuth, l’intelligence de la mise en scène allie adroitement une lecture à plusieurs niveaux et une théâtralité concrète, parachevant au passage l’équilibre délicat entre comédie et drame, le personnage de Beckmesser dût-il en sortir stigmatisé, et la figure de Wagner interrogée.
 

Festspielhaus, Bayreuth
Le 05/08/2018
Thomas COUBRONNE
 



Les 3 dernières critiques de concert

  • Contrepoint et syncopes

  • Brève rencontre

  • En attendant…

    [ Tous les concerts ]
     
      (ex: Harnoncourt, Opéra)




  • Nous avons beaucoup Ă©crit sur les Ă©cueils des mises en scène plaquĂ©es, demandant au spectateur de faire en permanence le grand Ă©cart entre plusieurs attitudes de lecture, tantĂ´t littĂ©rales, tantĂ´t symboliques, tantĂ´t transposĂ©es. Le pari de Barrie Kosky n’était donc pas sans risque, puisqu’il multiplie les angles d’approche contradictoires.

    Il y a d’abord la projection de Wagner dans les hĂ©ros masculins (Sachs Ă©tant le « grand Â» Wagner, Walther l’artiste en devenir, David le jeune compositeur immature), ou de ses proches dans les autres personnages (Cosima en Eva, conduite Ă  l’autel par son père Liszt/Pogner, mais aussi Hermann Levi en Beckmesser). En plus d’apporter de truculentes sĂ©quences (l’ouverture bourgeoise drolatique avec la migraine de Cosima, mais surtout les frasques d’un Wagner qu’on dĂ©couvre soudain blagueur), elle alimente une critique enjouĂ©e mais manifeste du wagnĂ©risme.

    Puis il y a la réflexion sur Nuremberg, cité fantasmée du sacre wagnérien. La scénographie maintient ainsi en permanence l’hiatus entre le temps de Wagner et le contexte factice de l’époque emblématique de Dürer. Le lieu laisse ainsi la place à son histoire, et y convergent Wahnfried, tour d’ivoire de l’artiste, la Nuremberg du procès, ombre au tableau parfait qu’il aurait voulu laisser derrière lui, la salle de concert enfin, lieu abstrait où devait s’opérer sa glorieuse transfiguration pour la postérité.

    De ce dĂ©cor composite sourd une critique Ă  peine voilĂ©e d’un personnage pourtant prĂ©sentĂ© dans sa richesse et sa complexitĂ© : le mĂ©galomane capable de ressasser dans chacune de ses Ĺ“uvres la cĂ©lĂ©bration de son propre gĂ©nie incompris, mais aussi un pitre joyeux, subtil, au fond humain, autant capable d’humilier son « ami juif Â» Levi que de couvrir Cosima de cadeaux passionnĂ©s, capable des renoncements de Sachs et des naĂŻvetĂ©s de Walther.

    Dès lors s’enrichissent mutuellement des degrés de lecture étroitement reliés par une direction d’acteurs remarquablement précise et virtuose : l’épreuve finale est une parodie de procès, lors de laquelle Beckmesser, déjà ostracisé et passé à tabac au II, est symboliquement rayé de l’Histoire, Wagner/Sachs cordonnier-calcéophile martèle de bon cœur ses chaussures neuves, Levi/Beckmesser succombe sous le poids du portrait de Wagner tandis qu’on appelle à la barre le portrait de Cosima derrière lequel se cachent les amoureux.

    En une forme de plein accomplissement musical, Philippe Jordan insuffle une légèreté, une vie presque marivaudienne, en petites touches, à une œuvre qui y trouve une respiration joyeuse et une immédiateté idéale. Michael Volle est une évidence à tous points de vue, matière noire mais souple, déclamée en une riche palette, présence scénique magnétique que lui dispute Johannes Martin Kränzle, éblouissant Beckmesser à la Shylock, assumant avec pathos et une maladroite distinction aristocratique la douloureuse caricature juive enracinée dans l’agressivité au cordeau de chœurs féroces – saluée en salle par un combat entre huées et bravi.

    Et si l’Eva d’Emily Magee demeure bien prosaïque, c’est surtout le Walther désormais fragile de Klaus Florian Vogt qui alimente notre seule réserve sur cette production : son personnage ne gagne ni en épaisseur ni en innocence, cantonné à ce rôle démesurément conventionnel par rapport à Sachs qui est ici sans aucun doute le véritable artiste. Si nous souscrivons totalement à cette relative disqualification de Walther, relégué au second plan, elle occasionne malgré tout quelque détachement, et, partant, quelques longueurs.




    Festspielhaus, Bayreuth
    Le 05/08/2018
    Thomas COUBRONNE

    Reprise des Maîtres chanteurs de Nuremberg de Wagner dans la mise en scène de Barrie Kosky et sous la direction de Philippe Jordan au festival de Bayreuth 2018.
    Richard Wagner (1813-1883)
    Die Meistersinger von Nürnberg, opéra en trois actes (1868)
    Livret du compositeur

    Chor und Orchester der Bayreuther Festspiele
    direction : Philippe Jordan
    mise en scène : Barrie Kosky
    décors : Rebecca Ringst
    costumes : Klaus Bruns
    Ă©clairages : Franck Evin
    vidéo : Regine Freise
    préparation des chœurs : Eberhard Friedrich

    Avec :
    Michael Volle (Hans Sachs), Günther Groissböck (Veit Pogner), Tansel Akzeybek (Kunz Vogelgesang), Armin Kolarczyk (Konrad Nachtigall), Johannes Martin Kränzle (Sixtus Beckmesser), Daniel Schmutzhard (Fritz Kothner), Paul Kaufmann (Balthasar Zorn), Christopher Kaplan (Ulrich Eisslinger), Stefan Heibach (Augustin Moser), Raimund Nolte (Hermann Ortel), Andreas Hörl (Hans Schwarz), Timo Rihonen (Hans Foltz), Klaus Florian Vogt (Walther von Stolzing), Daniel Behle (David), Emily Magee (Eva), Wiebke Lehmkuhl (Magdalene), Tobias Kehrer (Ein Nachtwächter).

     


      A la une  |  Nous contacter   |  Haut de page  ]
     
    ©   Altamusica.com