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CRITIQUES DE CONCERTS |
08 février 2025 |
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Reprise de Fortunio de Messager dans la mise en scène de Denis Podalydès, sous la direction de Louis Langrée à l’Opéra Comique, Paris.
La fortune du chef
Dix ans après son grand retour, Fortunio revient à nouveau salle Favart où il fût créé, et retrouve la mise en scène de Denis Podalydès et la direction aux splendides coloris de Louis Langrée. De la distribution de 2009 ne reste que le meilleur, Jean-Sébastien Bou, maintenant en concurrence avec Cyrille Dubois pour s’arracher Anne-Catherine Gillet.
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Première incursion de Denis Podalydès à l’opéra, la mise en scène de Fortunio créée à la salle Favart et passée ensuite par l’Opéra de Lorraine, trouve encore plus d’écho pour sa réapparition en cette fin d’année. L’élément comique y est toujours utilisé à son plus juste niveau, jamais trop poussé, même dans le duo grivois de l’acte II entre le Capitaine et la belle, en plus d’être très adapté à un livret dont la finesse bénéficie sans conteste du texte initial d’Alfred de Musset.
D’un mari notaire autant que cocu, au dire de sa mie, très jaloux parce qu’il est sexagénaire, l’histoire tourne vers un sentimentalisme sans facilité pour laisser au doux silencieux la primeur sur le crâne et fringant militaire. Jean-Sébastien Bou reprend son rôle de capitaine Clavaroche pour à nouveau y briller, et si la neige du I a blanchi ses cheveux, elle n’a pas touché une voix toujours parfaitement projetée et extrêmement complète, dont on comprend la quasi intégralité du texte.
Face à lui, Joseph Kaiser a laissé la place à Cyrille Dubois, ténor au timbre toujours aussi limpide, qui confirme de surcroît une voix plus charnue qu’il y a quelques années. Son style naïf, un peu trop appuyé au début, trouve un magnifique épanchement dans le grand air d’amour du II, avant un vif duo au III, tellement vivifié qu’il le touche légèrement dans la justesse de l’air ensuite, avant un magnifique final.
Anne-Catherine Gillet retrouve son amant du Domino noir monté sur cette même scène l’an passé, pour une Jacqueline coquette mais toute de tenue et d’émotivité, tant pour ses duos que pour sa principale aria. En admirable pigeonne, elle laisse roucouler son notaire à la voix bien placée de Franck Leguérinel, protégée par la servante aux couleurs nuancées d’Aliénor Félix.
Le reste de la distribution, d’un français cependant moins bien prononcé aujourd’hui que dans les extraits historiques de l’œuvre au milieu du siècle dernier, laisse ressortir en plus des artistes précités le Landry de Philippe-Nicolas Martin, ainsi que le Guillaume au chant bien charpenté de Geoffroy Buffière. Du chœur, peu utilisé à cause de la coupure de l’un des cinq tableaux juste avant la création par Messager en 1907, se démarque tout de même le groupe de clercs, donnés à cinq sopranos.
Mais si l’œuvre et la production ravissent encore autant aujourd’hui, c’est avant tout très certainement grâce à la direction aux milles coloris de Louis Langrée. Accompagné par l’Orchestre des Champs-Élysées avec lequel il donnait l’hiver dernier Hamlet et le précédent Comte Ory, renforcé de la luxueuse première violon du National de France Sarah Nemtanu, le chef français porte de la plus belle simplicité, un siècle après, la partition de l’un des plus grands musiciens de son époque ; un Messager fasciné comme lui par Pelléas, qu’il avait créé cinq ans plus tôt et dont il allait réutiliser une partie de la distribution initiale cinq ans plus tard pour faire, déjà , triompher sur cette scène un Fortunio aujourd’hui magnifiquement ravivé.
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Opéra Comique - Salle Favart, Paris Le 14/12/2019 Vincent GUILLEMIN |
 | Reprise de Fortunio de Messager dans la mise en scène de Denis Podalydès, sous la direction de Louis Langrée à l’Opéra Comique, Paris. | André Messager (1853-1929)
Fortunio, comédie lyrique en quatre actes
Livret de Gaston Arman de Cavaillet et Robert de Flers, d’après Le Chandelier d’Alfred de Musset
Chœur les éléments
Orchestre des Champs-Élysées
direction : Louis Langrée
mise en scène : Denis Podalydès, Sociétaire de la Comédie-Française
décors : Éric Ruf
costumes : Christian Lacroix
éclairages : Stéphanie Daniel
préparation des chœurs : Joël Suhubiette
Avec :
Cyrille Dubois (Fortunio), Anne-Catherine Gillet (Jacqueline), Franck Leguérinel (Maître André), Jean-Sébastien Bou (Clavaroche), Philippe-Nicolas Martin (Landry), Pierre Derhet (Lieutenant d’Azincourt), Thomas Dear (Lieutenant de Verbois), Aliénor Feix (Madelon), Luc Bertin-Hugault (Maître Subtil), Geoffroy Buffière (Guillaume), Sarah Jouffroy (Gertrude), Malcolm Namgyal & Suzanne Laurens, Maîtrise Populaire de l’Opéra Comique (Enfants), Laurent Podalydès (Comédien). |  |
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