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CRITIQUES DE CONCERTS |
11 décembre 2024 |
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Concert de l’Orchestre Philharmonique de Radio France sous la direction de Mikko Franck, avec la participation de la soprano Asmik Grigorian et du baryton Matthias Goerne à l’Auditorium de Radio France, Paris.
Froideur vitale
Après le Quintette K. 581 de Mozart développé par l’impeccable clarinette de Jérôme Voisin, Mikko Franck dirige une Symphonie n° 14 de Chostakovitch sombre, parfaitement traitée dans son introspection par la voix pleine de gravité de Matthias Goerne, ainsi que par celle à la ligne de chant incroyablement droite et aux nuances fascinantes d’Asmik Grigorian.
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Toujours un peu surprenants, les concerts du Philharmonique de Radio France continuent d’associer à des pièces symphoniques des ouvrages de chambre interprétés par quelques musiciens de l’orchestre. C’est donc par le Quintette avec clarinette en la majeur KV 581 que débute ce concert de la Maison de la Radio, face à un public encore très restreint.
Comme souvent dans ces pièces, il se ressent que les artistes sont avant tout des musiciens d’orchestre, donc sans la maturité des grands ensembles de chambre pour jouer en formations réduites et mettre en avant ou dynamiser spécifiquement leurs parties. Pour autant, ce quintette de Mozart bénéficie d’une excellente application aux cordes, et surtout de la prestation parfaitement préparée du clarinettiste Jérôme Voisin. Un souffle long lui permet de développer ses phrases avec pureté, sans jamais les dénaturer, dans quatre mouvements traités avec fluidité et couleurs.
Pièce de choix extrêmement rare, la Symphonie n° 14 de Chostakovitch s’inscrit ensuite dans un programme débuté en janvier, malheureusement sans public, par la Treizième Symphonie « Babi Yar », déjà avec Matthias Goerne. L’ouvrage aurait pu souffrir d’une direction trop légère ou trop peu habitée, mais dès le premier mouvements, Mikko Franck prouve qu’il veut trancher avec la rondeur qu’on lui connaît parfois, pour entrer dans cette partition par ses penchants sombres et anguleux.
Les violons se montrent donc toujours fermes dans leurs attaques, quand les violoncelles ou les deux contrebasses exposent une glaçante gravité à chacune des parties les plus concentrées. Globalement, cette notion de froideur vitale ressort de toutes les cordes, renforcée par le célesta et les percussions, éthérés mais jamais lumineux, même dans le cinquième mouvement.
Matthias Goerne a tant travaillé le registre grave qu’il aborde maintenant sa partie de basse comme s’il avait toujours possédé cette extension. Il développe alors lui aussi, dans un russe particulièrement propre, une gravité essentielle, marquante dès le De Profundis initial. Aussi fascinante si ce n’est plus encore, Asmik Grigorian, dont l’habit russe très austère renforce un chant volontairement glacial autant que d’une incroyable pureté et d’une finesse de nuances impressionnante, lui répond en abordant tous les textes avec une rare intelligence.
Cette exceptionnelle prestation aurait toutefois pu l'être davantage encore si plutôt que l’habituelle version russe avait été privilégiée la partition internationale, avec les textes de Garcia Lorca en espagnol ou ceux d’Apollinaire en français, pour laquelle Dmitri Chostakovitch avait pourtant revendiqué sa préférence. Alors qu’il se murmure qu’un enregistrement officiel de ce concert paraîtra prochainement, celui-ci aurait été encore plus marquant s’il était venu s’ajouter à la seule gravure disponible de la version internationale, celle de Haitink.
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Auditorium de la Maison de la Radio, Paris Le 13/06/2021 Vincent GUILLEMIN |
| Concert de l’Orchestre Philharmonique de Radio France sous la direction de Mikko Franck, avec la participation de la soprano Asmik Grigorian et du baryton Matthias Goerne à l’Auditorium de Radio France, Paris. | Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Quintette avec clarinette en la majeur, KV 581
JĂ©rĂ´me Voisin, clarinette
Aurore Doise, Arno Madoni, violons
Marc Desmons, alto
Renaud Guieu, violoncelle
Dmitri Chostakovitch (1906-1975)
Symphonie n° 14 op. 135
Asmik Grigorian, soprano
Matthias Goerne, basse
Orchestre Philharmonique de Radio France
direction : Mikko Franck | |
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