|
|
CRITIQUES DE CONCERTS |
14 octobre 2024 |
|
Le Concerto Italiano dirigé par Rinaldo Alessandrini interprète Il Trionfo del Tempo e del Disinganno de Haendel
Un triomphe en forme d'apothéose italienne
© Eric Sebbag
On le savait allemand de naissance, anglais d'adoption, mais Haendel était surtout italien de plume. C'est en tout cas ce qu'a rappelé Rinaldo Alessandrini à la tête de son Concerto Italiano pour un Il Trionfo del Tempo e del Disinganno en forme d'apothéose italienne, à Bruxelles en octobre dernier.
|
Palais des Beaux-Arts, Bruxelles
Le 18/10/2000
yutha TEP
|
|
|
|
Wozzeck chez Big Brother
L’art de célébrer
Géométrie de chambre
[ Tous les concerts ]
|
Ecrit en 1708, Il Trionfo illustre magnifiquement l'assimilation rapide par Haendel, arrivé dans la Péninsule en 1705 dans les bagages du grand-duc de Toscane Fernand de Médicis, du langage musical italien de cette époque. Dans un livret dû à l'auguste et quelque peu ennuyeuse plume du cardinal Pamphili, quatre personnages allégoriques – la Beauté, la Jouissance, le Temps et la Vérité, s'affrontent dans un débat passionné, dont l'issu est contenu dans le titre de l'oeuvre. Face à la platitude dramatique du texte, la musique de Haendel jaillit cependant avec une jeunesse et une profusion qu'il retrouvera rarement par la suite, ménageant des passages de grande virtuosité tant pour les voix que pour les instruments, intégrant dans le corps même de l'oratorio, un véritable concerto pour orgue, que Haendel exécuta sans doute lui-même lors de la création.
Progressivement mais sûrement, l'orchestre du Concerto Italiano se hisse au niveau de perfection technique et plastique de son homologue vocal. On a déjà à plusieurs occasions évoqué la rondeur des cordes emmenées par Francesca Vicari, rare pour une formation sur instruments d'époque, même auprès d'oreilles désormais habituées aux prestations d'un Minkowski ou d'un Jacobs. S'ajoutent ici des vents d'une justesse irréprochable, en particulier le hautbois raffiné d'Andrea Mion.
| | |
Dirigeant de l'orgue (manié avec une dextérité époustouflante lors du fameux concerto), Rinaldo Alessandrini manifeste un souci constant du cantabile encore renforcé par les splendides ornements qu'il impose à ses solistes lors des da capo, intégrant les passages de haute virtuosité à une expressivité toujours juste et ne cherchant jamais à forcer le trait en matière de théâtralité. Il est significatif, à cet égard, qu'il ait adopté la version "épurée" du fameux air Un pensiero nemico di pace confié à la Bellezza (Beauté). Non pas que Deborah York eût été incapable de faire face au déferlement pyrotechnique de cet air : luminosité et densité du timbre, technique d'acier qui lui autorise des pianos aigus impalpables, la jeune soprano anglaise a ravi l'audience par une Bellezza angélique ne demandant qu'à suivre le droit chemin.
Face à elle, Gemma Bertagnolli est moins sûre d'intonation et d'aisance dans les vocalises, mais l'engagement, la sensualité apportée à un rôle tout en séduction vénéneuse et une même lumière dans la voix font taire les critiques. La gravité hiératique du Disinganno ne pouvait trouver meilleur défenseur que Sara Mingardo, assumant aisément tant une large tessiture que les merveilleuses phrases disséminées dans sa partie. Victime d'une grippe, le ténor Nicholas Sears n'a pu montrer ses réelles capacités.
Reste que si le Temps et la Vérité triomphent, la Beauté et la Jouissance se sont bien défendues... On pourra d'ailleurs s'en convaincre au disque car, profitant de l'élan du concert, Opus 111 a mis en boite le programme.
| | |
|
Palais des Beaux-Arts, Bruxelles Le 18/10/2000 yutha TEP |
| Le Concerto Italiano dirigé par Rinaldo Alessandrini interprète Il Trionfo del Tempo e del Disinganno de Haendel | Georg Friedrich Haendel : Il Trionfo del Tempo e del Disinganno
oratorio en deux parties sur un livret de Benedetto Pamphili
Orchestre du Concerto Italiano
Direction : Rinaldo Alessandrini
Avec Deborah York (soprano – La Bellezza), Gemma Bertagnolli (soprano – Il Piacere), Sara Mingardo (contralto – Il Disinganno), Nicholas Sears (ténor – Il Tempo). | |
| |
| | |
|