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CRITIQUES DE CONCERTS |
14 octobre 2024 |
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Version de concert de l’opéra 4.48 Psychosis de Venables par l’Ensemble Intercontemporain sous la direction de Matthias Pintscher à la Cité de la Musique, Paris.
Dépression d’automne
Créé en 2016 à Londres puis remonté en France dès 2019 au Festival Musica, ainsi que dans de nombreuses salles par le monde, 4.48 Psychosis de Philip Venables est à nouveau repris cet automne, cette fois en version de concert par l’Ensemble Intercontemporain et son directeur musical Matthias Pintscher, toujours magnifiquement porté par le sextuor vocal féminin.
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Découvert en France à Strasbourg dans le cadre du Festival Musica, 4.48 Psychosis, d’après la pièce définitive de Sarah Kane, est redonné à Paris en coproduction avec le Festival d’Automne, qui propose cette fin d’année un parcours autour du compositeur Philip Venables, notamment décrit par un passionnant portrait musical fin octobre à l’Espace Cardin.
À l’inverse de son nouvel opéra créé à Montpellier cet été, Denis & Katya, resserré autour des deux protagonistes principaux, Philip Venables et Ted Huffmann – également metteur en scène de la première production – ont, pour cet ouvrage interdit par son auteur à toute transposition autre que théâtrale, déployé l’unique personnage autour de ses voix intérieures, au total de six.
À une voix près, celle de Suzy, cette fois portée par la soprano Karen Bandelow, la distribution remet en avant les artistes déjà entendues en Alsace, avec pour cette version de concert une Gwen encore plus marquante en la personne de Gweneth-Ann Rand. À l’autre bout du spectre et de la scène, Lucy Schaufer offre à Lucy son ample et profond timbre de mezzo-soprano.
Musicalement, la partition n’hésite pas à utiliser toutes les formes possibles ainsi que des techniques de collage, qui servent particulièrement à surexploiter les contrastes. Dans le style d’une œuvre de 2015 présentée pendant le portrait d’octobre, Illusions, Venables intègre en fond un léger filin de bossa nova pour parfois apaiser l’atmosphère, avant de tout faire exploser, comme pour tenter de décrypter les phases différentielles d’un état dépressif irrémédiable.
Il ajoute au chant le texte déclamé, en même temps inscrit sur l’écran d’arrière-scène et traité à la manière des récitatifs baroques, pour lesquels le clavecin est remplacé par les coups de deux percussionnistes. L’un assène les questions en tapant sur une plaque métallique, voire en sciant une buche, tandis que l’autre y répond majoritairement sur une grosse caisse, la peau frappée avec des baguettes, bâtons ou directement avec les poings.
Débuté par les halètements de Gwen, la pièce se développe également par le tissu instrumental et bénéficie à la Cité de la Musique d’un Ensemble intercontemporain racé, alternativement bien contenu et dynamisé par son directeur musical Matthias Pintscher. Derrière les voix souvent présentes et suramplifiées, l’ensemble laisse ressortir la qualité de ses musiciens, notamment la contrebasse de Nicolas Crosse.
Intéressante, cette reprise de 4.48 Psychosis marque un peu plus l’importance de Philip Venables sur la scène musicale contemporaine, particulièrement identifiable à son style très personnel, notamment dans le mélange d’influences amalgamées pour créer un tout toujours parfaitement cohérent et puissant.
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Cité de la Musique, Paris Le 16/12/2021 Vincent GUILLEMIN |
| Version de concert de l’opéra 4.48 Psychosis de Venables par l’Ensemble Intercontemporain sous la direction de Matthias Pintscher à la Cité de la Musique, Paris. | Philip Venables (*1979)
4.48 Psychosis, d’après la pièce de Sarah Kane
Gweneth-Ann Rand, soprano – Gwen
Robyn Allegra Parton, soprano – Jen
Karen Bandelow, soprano – Suzy
Samantha Price, mezzo-soprano – Claire
Rachael Lloyd, mezzo-soprano – Emily
Lucy Schaufer, mezzo-soprano – Lucy
Ensemble intercontemporain
direction : Matthias Pintscher | |
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