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CRITIQUES DE CONCERTS |
16 octobre 2024 |
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Concert de l’Orchestre de Paris sous la direction de Jukka-Pekka Saraste, avec le concours de la violoniste Alexandra Conunova à la Philharmonie de Paris.
MĂŞme pas peur !
Rutilante démonstration symphonique avec un Orchestre de Paris chauffé à blanc par la baguette volontaire et impatiente de Jukka-Pekka Saraste, qui soigne ses contrastes dans Bartók avant de donner une Cinquième de Mahler explosive, faisant trembler les murs en un triomphe de la vie sur les forces obscures manquant tout de même beaucoup de métaphysique.
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Deuxième programme de l’année civile déjà pour l’Orchestre de Paris, qui invitait le chef finlandais Jukka-Pekka Saraste. En première partie, Janine Jansen absente pour raisons de santé, c’est la jeune Alexandra Conunova qui tient la partie soliste du rare Concerto pour violon n° 1 de Béla Bartók, partition resserrée de vingt minutes en deux mouvements, œuvre de jeunesse considérée comme perdue jusqu’à ce que le manuscrit réapparaisse en 1958.
L’Andante sostenuto initial se cherche beaucoup, violon peu assuré et orchestre scrupuleux jusqu’à ce que le cor anglais, succédant aux cordes seules, propose quelques bouffées de phrasé qui libèrent les troupes. La jeune violoniste moldave semble d’ailleurs beaucoup plus à l’aise dans les ruptures de l’Allegro giocoso, où les jeux de réponses entre soliste et orchestre fusent, avant un bis virevoltant – mouvement liminaire de la Sonate n° 2 d’Ysaÿe.
Après la pause, Saraste expose crânement sa conception de la Cinquième de Mahler, œuvre charnière d’un homme ayant échappé de peu à la mort suite à une hémorragie en février 1901. Partition de reconquête, entre marche funèbre et trajectoire vers la lumière, que le Finlandais aborde bille en tête, à plein volume dès un tutti initial fracassant, sans cesse dans l’avancée et la relance rythmique, comme pour faire dire au compositeur rescapé « même pas peur ! »
On admire l’énergie de la vision, d’autant que l’Orchestre de Paris brille de mille feux (la trompette de Célestin Guérin, le corno obbligato de Benoît de Barsony), mais on aimerait aussi explorer des zones d’ombres survolées, fins de phrases recto-tono, sans souplesse ni vraie interrogation. C’est que Saraste, sans cesse dans l’affirmative, n’a que faire de métaphysique, qui boucle l’Adagietto en un temps record et dans une esthétique proche de la Sixième de Sibelius, cordes dégraissées et translucides.
Le Scherzo, au tempo confortable, ne prend pas autant de risques dans des épisodes valsés loin de l’esprit viennois, où le seul hautbois ose la suspension. Même sentiment dans le Finale, qui organise ses épisodes fugués telles des balises de terrain d’atterrissage. La vraie urgence, le refus d’étirer même à peine les transitions, on les avait déjà perçus dans le deuxième mouvement, quand les violoncelles errent au-dessus d’un roulement de timbales pianissimo, épisode pris à contrepied, le chef demandant plus de vibrato avec la main gauche quand on aurait aimé s’abîmer dans un no man’s land de doute et de solitude.
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Philharmonie, Paris Le 19/01/2022 Yannick MILLON |
| Concert de l’Orchestre de Paris sous la direction de Jukka-Pekka Saraste, avec le concours de la violoniste Alexandra Conunova à la Philharmonie de Paris. | Béla Bartók (1881-1945)
Concerto pour violon n° 1 (1907-1908)
Alexandra Conunova, violon
Gustav Mahler (1860-1911)
Symphonie n° 5 en ut# mineur (1901-1902)
Orchestre de Paris
direction : Jukka-Pekka Saraste | |
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