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CRITIQUES DE CONCERTS |
11 octobre 2024 |
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Concert de l’Orchestre de Paris sous la direction de Klaus Mäkelä avec le concours de la violoniste Isabelle Faust à la Philharmonie de Paris.
DĂ©lires contrapuntiques
Avec un programme d’une rare cohérence l’Orchestre de Paris et son tout jeune directeur musical Klaus Mäkelä donnent une soirée de haute volée, tant par des qualités instrumentales où l’homogénéité le dispute à l’expression que par une vision d’œuvres entre écriture archaïsante et classicisme de Hasse, Mozart et Brahms d’une maturité exceptionnelle.
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Jouer deux tubes du répertoire, les assortir de deux pièces pour cordes seules et en faire une soirée excitante, voilà un art consommé de la programmation. En ouvrant le concert avec Fugue et grave en sol mineur, une pièce très rare de Hasse jadis enregistrée par Reinhard Goebel, Klaus Mäkelä montre une culture musicale profonde sans caractère gratuit. Avec quarante cordes, il fait de cette pièce déjà archaïsante pour son époque un objet fascinant, véritable kaléidoscope de nuances et d’expressions. L’écriture contrapuntique devient sous sa baguette un terrain de jeu pour les musiciens de l’Orchestre de Paris à la sonorité très unie et lumineuse, sans aucune lourdeur, avec une théâtralité de grand style.
Le Concerto pour violon de Brahms qui suit n’appartient évidemment pas au même monde, mais des couleurs se mettent curieusement en résonnance avec ce qui a précédé et, finalement, on entend l’intérêt soutenu du compositeur pour la musique ancienne. L’archet d’Isabelle Faust ne cherche aucune lutte avec l’orchestre sans ne jamais rien lâcher d’un discours fauve et tendre à la fois. C’est que la violoniste respecte les multiples indications piano ou pianissimo de la partition.
Le chef l’accompagne entièrement dans sa lecture à mille lieux des tonitruances parfois entendues. Tout l’orchestre semble se fondre en symbiose dans une sonorité unie et soyeuse, presque diaphane, où émergent le hautbois et les timbales. Les racines hongroises des mélodies s’éloignent. Au pittoresque se substitue un journal musical intime et bouleversant jusque dans la joie du final. L’introspection est encore de mise dans un bis élégant : la Romance de l’opus 118 arrangée pour violon et orchestre en 2019 par l’Argentin Oscar Strasnoy.
Après l’entracte, en symétrie avec la première partie, Adagio et fugue en ut mineur de Mozart forme un nouveau portique théâtral. Et pourtant le mouvement initial de la Symphonie Jupiter prend l’auditeur par surprise. Certes, Mäkelä et ses musiciens prennent à la lettre le Vivace indiqué par la partition, mais ce sont les attaques et les phrasés surarticulés qui creusent les contrastes entre les éléments purement cursifs et la mélodie du troisième thème.
L’Andante cantabile reste très allant et enchante grâce à une balance orchestrale de rêve où bois et cuivrent se fondent avec les cordes dans un jeu de nuances toujours mobiles qui se prolonge dans un Menuetto particulièrement dansant. Le mouvement conclusif par son mélange des formes anciennes et classiques couronne brillamment le programme. Il se dégage une joie autant espiègle que profonde de l’habilité incroyable des musiciens à se déchaîner tout en respectant scrupuleusement un cadre aussi formel. Le dernier épisode fugué éclate et s’impose avec une évidence grisante.
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Philharmonie, Paris Le 10/02/2022 Thomas DESCHAMPS |
| Concert de l’Orchestre de Paris sous la direction de Klaus Mäkelä avec le concours de la violoniste Isabelle Faust à la Philharmonie de Paris. | Johann Adolf Hasse (1699-1783)
Fugue et grave en sol mineur pour cordes
Johannes Brahms (1833-1897)
Concerto pour violon en ré majeur op. 77 (1878)
Isabelle Faust, violon
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Adagio et fugue en ut mineur pour cordes (1788)
Symphonie n° 41 en ut majeur KV 551 « Jupiter » (1788)
Orchestre de Paris
direction : Klaus Mäkelä | |
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