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CRITIQUES DE CONCERTS |
13 octobre 2024 |
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Version de concert de L’Or du Rhin de Wagner sous la direction de Yannick Nézet-Séguin au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
L’homme au bras d’or
La très réussie version de concert de l’Or du Rhin présentée par Yannick Nézet-Séguin et son ancien Orchestre de Rotterdam ne manque pas d’engagement. Celui d’une très solide équipe de chanteurs jouant la comédie sans partition, et celui d’un orchestre qui trouve des ressources quasi-inépuisables. Un Wagner au premier degré, où la surenchère l’emporte parfois sur les nuances.
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Yannick Nézet-Séguin est un des bras les plus remarquables de notre temps. Par bras, il ne faut pas entendre la musculature, à la plastique saillante chez ce chef, mais sa gestique de la main droite, infatigable et très fluide. De cette manière, le Québécois entraîne irrésistiblement l’Orchestre philharmonique de Rotterdam sur les cimes wagnériennes de L’Or du Rhin.
Si le prélude démarre trop fort et met sous une lumière crue les faiblesses de timbres de l’ensemble, la suite de la soirée montre un orchestre discipliné et motivé, à l’instar du pupitre de cors d’une puissance à toute épreuve. Cette direction aux qualités narratives évidentes dessine un Nibelheim saisissant de forces telluriques, à l’exception malheureuse des enclumes qui tintinnabulent depuis les coulisses comme un gamelan javanais !
En revanche, les instrumentistes prêtent leur voix avec un effet décoiffant pour les cris des Nibelungen. Au pied du Walhalla, Nézet-Séguin se fait souvent plus prudent, perdant parfois son caractère cursif et rendant les disputes entre les dieux un peu laborieuses. Tout se dissipe avec l’entrée au Walhalla, assurément majestueuse, servant parfaitement le dessein wagnérien, conclusion triomphale attendue. Il faut dire que l’ensemble du plateau appelle également beaucoup d’éloges.
Wotan portant quelques stigmates, Michael Volle maîtrise toutes les facettes du rôle, de la finesse à la plus grande rouerie. Gerhard Siegel n’est pas en reste pour un Loge aux accents parfois expressionnistes. Face à eux, Samuel Youn déploie une voix longue qu’il soumet à des effets très nombreux, du murmure à la tonitruance. Son impressionnant Alberich vole ainsi souvent la vedette à ses partenaires. Dans la confrontation, le Mime de Thomas Ebenstein conserve une belle musicalité. En revanche, aux côtés du toujours éloquent Fasolt de Stephen Milling, le Fafner de Mikhail Petrenko paraît trop court.
Côté dames, Jamie Barton use avec beaucoup de goût d’un timbre superbe en Fricka, tandis que la Freia de Christiane Karg brûle le sien avec engagement. Remplaçant Denyce Graves, Wiebke Lehmkuhl fait de la scène d’Erda un des très beaux moments de la soirée, où le verbe de la prophétie est servi par un art du chant confondant. Annoncé en 2021, reporté pour cause de pandémie, ce prologue aux trois journées du Ring n’aura peut-être pas de suite, car si les forces de Rotterdam reviennent la saison prochaine ce sera pour un programme tout autre, avec leur nouveau directeur musical, Lahav Shani.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 23/04/2022 Thomas DESCHAMPS |
| Version de concert de L’Or du Rhin de Wagner sous la direction de Yannick Nézet-Séguin au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Richard Wagner (1813-1883)
Das Rheingold, opéra en un acte et quatre scènes (1869)
Michael Volle (Wotan)
Gerhard Siegel (Loge)
Jamie Barton (Fricka)
Christiane Karg (Freia)
Thomas Lehman (Donner)
Issachah Savage (Froh)
Wiebke Lehmkuhl (Erda)
Samuel Youn (Alberich)
Thomas Ebenstein (Mime)
Stephen Milling (Fasolt)
Mikhail Petrenko (Fafner)
Erika Baikoff (Woglinde)
Iris van Wijnen (Wellgunde)
Maria Barakova (Flosshilde)
Orchestre philharmonique de Rotterdam
direction : Yannick NĂ©zet-SĂ©guin | |
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