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CRITIQUES DE CONCERTS |
11 décembre 2024 |
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Concert de l’Orchestre de Paris sous la direction de Manfred Honeck, avec le concours du pianiste Igor Levit à la Philharmonie de Paris.
La carpe et le lapin
La réputation flatteuse attachée au directeur musical de Pittsburgh, Manfred Honeck, rend d’autant plus aiguë la déception suscitée par un concert marqué par une musicalité bruyante et peu stylée résultant d’un intérêt très mince pour la balance orchestrale et d’une articulation qui se résume trop souvent à la brutalité. Au point qu’il vaut mieux en rire…
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Est-ce à cause du public bruyant qui n’arrive pas à faire silence que Manfred Honeck rate le début de La Valse de Ravel ? Les musiciens de l’Orchestre de Paris semblent divisés en deux groupes : d’un côté les cordes très disciplinées et assez nuancées, de l’autre les vents lancés aussitôt à plein régime appuyés lourdement par les percussions. Curieux antagonisme qui ruine la progressivité de l’œuvre, pourtant essentielle à sa réussite. Le malaise qui devrait advenir au fur et à mesure est ici immédiat et perdure jusqu’au climax final articulé avec la finesse d’une horde d’éléphants qui met inévitablement un peu de temps à stopper son élan. L’effectif pléthorique déployé pour le concerto en fa de Gershwin laisse imaginer le pire.
Il se réalise dans la confrontation avec le piano délicat d’Igor Levit. Cela relève du mariage de la carpe et du lapin. Honeck conserve une jolie transparence aux cordes mais appuie pesamment les riffs aux cuivres. À la dentelle étrange du pianiste germano-russe s’oppose un swing à la Franck Pourcel excellemment réalisé par les musiciens. Seul le mouvement lent surnage de cette conception pour le moins brutale. Aussi craignait-on un traitement aussi rude pour le Concerto pour orchestre de Bartók donné après l’entracte.
Heureusement, la direction de Manfred Honeck s’y montre moins velléitaire. Une Introduzione de très bonne facture ne pèche que par des traits fortissimo aux harpes florissantes qui trahissent une nouvelle fois un laisser-aller du chef dans la balance orchestrale. Les deux caprices (II et IV) sonnent de manière fort brillante. Mais au centre du concerto, l’Élégie surprend d’une autre manière : le chef use de rubatos pour une ambiance cinématographique où l’inquiétude est suivie d’un certain sentimentalisme qu’on n’associe pas naturellement au compositeur du Château de Barbe-Bleue. Ici cela nous évoque plutôt un épisode de Scooby-Doo et le Château des Carpates !
La première partie du Finale sonne certainement pesante, mais le Presto apparaît très modéré, articulé de manière scolaire. Ayant tiré ses cartouches une nouvelle fois trop tôt, Honeck mène le pupitre de cuivres à une saturation qui a dû laisser les valeureux musiciens les lèvres en feu.
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Philharmonie, Paris Le 19/05/2022 Thomas DESCHAMPS |
| Concert de l’Orchestre de Paris sous la direction de Manfred Honeck, avec le concours du pianiste Igor Levit à la Philharmonie de Paris. | Maurice Ravel (1875-1937)
La Valse (1920)
George Gershwin (1898-1937)
Concerto en fa (1925)
Igor Levit, piano
Béla Bart¬ók (1881-1945)
Concerto pour orchestre (1944)
Orchestre de Paris
direction : Manfred Honeck | |
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