|
|
CRITIQUES DE CONCERTS |
09 décembre 2024 |
|
Nouvelle production de Salomé de Strauss dans une mise en scène d’Andrea Breth et sous la direction d’Ingo Metzmacher au festival d’Aix-en-Provence 2022.
Aix 2022 (2) :
Lavandière de nuit
Cette Salomé mise en scène par Andrea Breth joue la carte d'une réalité parallèle, faite de rêves et de fantasmes dans un décor volontairement sombre et symboliste. Vocalement, un cast irrégulier et la prestation d'Elsa Dreisig laissent un parfum d'inachevé malgré le travail de haute couture d'Ingo Metzmacher qui fait de l'Orchestre de Paris un écrin sur mesure.
|
Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence
Le 05/07/2022
David VERDIER
|
|
|
|
Le renoncement de Barbe-Bleue
Frénésie de la danse
Clavecin itératif
[ Tous les concerts ]
|
De retour après Jakob Lenz de Rihm en 2019, Andrea Breth propose cette fois à Aix une Salomé. Son décorateur Raimund Orfeo Voigt a imaginé pour l'occasion un univers sombre et inquiétant qui joue sur les effets de contraste avec un personnage de jeune fille plus tout à fait innocente mais pas encore perverse. Si la mise en scène est de toute évidence construite autour de cette anti-héroïne, on peut regretter la façon avec laquelle Elsa Dreisig surjoue un registre invariablement fantomatique et désincarné, tel le personnage du folklore germanique de la lavandière de nuit, sans l'épaisseur ni la présence qui lui permettraient de mettre en valeur certains arrière-plans psychologiques.
Insistant sur le hiératisme des poses et des gestes, cet enchaînement de scènes relève à la longue d'une série de panneaux comme autant de stations d'un chemin de croix profane. Ce parfum suranné de Regietheater finit par enliser l'intrigue dans une lecture un rien normative et distanciée, avec une version de la Cène où la tête de saint Jean-Baptiste chante dans un plateau d'argent façon Grand-Guignol, tandis que les Juifs esquissent une pantomime illustrant la tentation d'une conversion. La Danse des sept voiles confond érotisme et ésotérisme avec comme seule idée la multiplication des Salomé tandis que la scène finale brille d'une froideur redoutable, le projecteur braqué sur un baiser sordide au fond d'une citerne carrelée.
Vocalement à l'étiage, le niveau du plateau met paradoxalement en valeur l'interprétation d'Elsa Dreisig. Le choix de la version allégée (dite " de Dresde ") permet à la voix de mieux négocier l'endurance et le volume nécessaires. Mais les aigus sont invariablement droits et durcis, résultat d'une concentration et d'une maîtrise qui fait disparaître tout naturel. Au-delà des purs aspects techniques, on est surtout gêné par ce jeu en retrait qui prive le personnage de sa personnalité en substituant au sanguin une forme d'esthétisation.
John Daszak est un Hérode débraillé, sans véritable ligne ni caractère tandis que l’Iokanaan de Gabor Bretz reste en deçà du rôle et du convenable. Angela Denoke promène le fantôme de sa Salomé mais, à part quelques gestes vocaux qui font entendre le fauve formidable, son Hérodiade atteint les limites de la surface vocale du rôle. Joel Prieto gagne en Narraboth de précieux galons qu'on aimerait entendre dans un emploi plus sollicitant.
La réussite de la soirée réside dans la fosse, avec un Ingo Metzmacher aux petits soins qui fait de l'Orchestre de Paris un écrin sonore adapté jusque dans le moindre détail à toutes les variations de dynamique. Ce Strauss n'est certes pas le plus tellurique ni le plus délirant qu'on ait entendu mais il a le mérite d'une intelligence et d'une attention à la lisibilité des lignes grâce auxquels on reconnaît un grand interprète dans ce répertoire redoutable.
| | |
|
Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence Le 05/07/2022 David VERDIER |
| Nouvelle production de Salomé de Strauss dans une mise en scène d’Andrea Breth et sous la direction d’Ingo Metzmacher au festival d’Aix-en-Provence 2022. | Richard Strauss (1864-1949)
Salome, drame en un acte op. 54 (1905)
Livret d’après Oscar Wilde
Orchestre de Paris
direction : Ingo Metzmacher
mise en scène : Andrea Breth
décors : Raimund Orfeo Voigt
costumes : Alexandra Charles
Ă©clairages : Alexander Koppelmann
chorégraphie : Beate Vollack
Avec :
Elsa Dreisig (Salome), Gábor Bretz (Jokanaan), John Daszak (Herodes), Angela Denoke (Herodias), Joel Prieto (Narraboth), Carolyn Sproule (Ein Page der Herodias), Léo Vermot-Desroches (Erster Jude), Kristofer Lundin (Zweiter Jude), Rodolphe Briand (Dritter Jude), Grégoire Mour (Vierter Jude), Sulkhan Jaiani (Fünfter Jude / Zweiter Soldat), Kristján Jóhannesson (Erster Nazarener / Ein Kappadozier), Philippe-Nicolas Martin (Zweiter Nazarener), Allen Boxer (Erster Soldat), Katharina Bierweiler (Eine Sklavin). | |
| |
| | |
|