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CRITIQUES DE CONCERTS 19 avril 2024

Nouvelle production des Diables de Loudun de Penderecki dans une mise en scène de Simon Stone et sous la direction de Vladimir Jurowski au festival de Munich 2022.

Munich 2022 (2) :
Chair politique

© Wilfried Hösl

Carton plein pour la production des Diables de Loudun de Simon Stone et Vladimir Jurowski à Munich. La mise en scène qui garde un rien de distance face à l’insoutenable, s’accompagne d’une direction musicale magnifiant la force expressive de la musique. L’équipe vocale finit de porter au triomphe une œuvre trop longtemps laissée de côté.
 

Nationaltheater, MĂĽnchen
Le 07/07/2022
Thomas DESCHAMPS
 



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  • Ă€ leur crĂ©ation en 1969, Les Diables de Loudun firent l’effet d’une bombe, tant pour la modernitĂ© de l’écriture que par les audaces du livret. Ces dernières ont sans doute perdu un peu d’impact depuis, et entendre aujourd’hui sĹ“ur Louise chanter « Prends-moi ! Â» ne provoque plus la mĂŞme rĂ©action. Le livre d’Aldous Huxley Ă  l’origine du livret est oubliĂ©, la pièce de théâtre de John Whiting qui en est issue aussi, et le film The Devils (1971) de Ken Russell rangĂ© au rayon des dĂ©lires outranciers.

    Pour Simon Stone, monter cet opéra représentait le risque de passer à côté des enjeux de cette histoire mêlant hystérie religieuse et jeu politique violent, ou celui de verser dans le grotesque. Sa réalisation évite ces écueils, comme celui d’ancrer l’histoire dans une époque précise. Penderecki n’utilise aucun archaïsme pouvant faire référence à la temporalité de cette affaire. Au contraire, tout laisse penser qu’il recherche l’universalisme, même si certains commentateurs voulurent l’ancrer dans la Pologne nazie puis totalitaire du compositeur.

    Sacrifiant à sa passion de la tournette, le metteur en scène dispose sur celle-ci un cube de béton brut vaguement contemporain, qui se transforme en église, en cellule ou en coursives d’immeuble. Les protagonistes évoluent dans des costumes fonctionnels sans référence à un pays particulier. Stone met davantage l’accent sur le politique que sur les soi-disant convulsions religieuses par une seule référence à l’actualité : au plus fort de leur hystérie, les Ursulines deviennent des Pussy Riots, se révoltant ainsi face à la compromission insoutenable du pouvoir spirituel.

    Cette lecture pertinente s’accompagne d’un travail musical magistral de la part de Vladimir Jurowski. Si le compositeur effectua de nombreuses révisions jusqu’en 2012, le chef choisit la version originale laissant hors-champ Louis XIII et Richelieu, et obtient de son orchestre une affolante beauté de timbres. Les cordes graves aux échelles chromatiques tourmentées, les volutes des saxophones ont toutes les séductions du mal incarné. Les oppositions de couleurs, les ombres portées par les cordes aiguës répondent aux inflexions de la scène dans un jeu fascinant.

    D’une précision diabolique, sa direction sait progresser depuis la rareté des premières scènes jusqu’à la tension progressivement insoutenable des dernières. L’illustration sonore du sadisme des scènes de torture du père Grandier est encore dépassée par l’immense tutti qui ponctue le passage du supplicié devant le couvent avant son exécution. Le plateau peut dans ce cadre orchestral admirable éclater dans des portraits inoubliables.

    Sur des sommets d’éloquence, Wolfgang Koch transcende les tourments de Grandier, trouve une séduction vocale toute charnelle et une spontanéité qui n’a d’égale que son inflexibilité morale quant au pouvoir. Face à lui, Martin Winkler est un exorciste prêt à tout, Wolfgang Ablinger-Sperrhacke un agent politique d’une inhumanité sans limite. Tous seraient à citer, mais la Jeanne d’Ausrine Stundyte brûle les planches. Un membre de l’ensemble de l’opéra, Martin Snell, lui prête sa voix remarquablement enregistrée pour les scènes de possession par l’abyssal Léviathan ou le flatulent Béhérit. La chanteuse intègre très naturellement ces inserts dans une incarnation vocale mémorable.




    Nationaltheater, MĂĽnchen
    Le 07/07/2022
    Thomas DESCHAMPS

    Nouvelle production des Diables de Loudun de Penderecki dans une mise en scène de Simon Stone et sous la direction de Vladimir Jurowski au festival de Munich 2022.
    Krzysztof Penderecki (1933-2020)
    Die Teufel von Loudun, opéra en trois actes (1969)
    Livret du compositeur d’après le livre éponyme d’Aldous Huxley et sa dramatisation par John Whiting

    Chœurs de l’Opéra National de Bavière
    Orchestre d'État de Bavière
    direction : Vladimir Jurowski
    mise en scène : Simon Stone
    décors : Bob Cousins
    costumes : Mel Page
    Ă©clairages : Nick Schlieper
    préparation des chœurs : Stellario Fagone

    Avec :
    Ausrine Stundyte (Jeanne), Ursula Hesse von den Steinen (Claire), Nadezhda Gulitskaya (Gabrielle), Lindsay Ammann (Louise), Danae Kontora (Philippe), Nadezhda Karyazina (Ninon), Wolfgang Koch (Grandier), Martin Winkler (Barré), Wolfgang Ablinger-Sperrhacke (Laubardemont), Andrew Harris (Rangier), Ulrich Ress (Mignon), Kevin Conners (Adam), Jochen Kupfer (Mannoury), Thiemo Strutzenberger (d’Armagnac), Barbara Horvath (Cerisay), Sean Michael Plumb (Condé), Piotr Micinski (Ambrose), Christian Rieger (Bontemps), Steffen Recks (un huissier).

     


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