Introduit par le Prélude n° 1 d’Henri Dutilleux, D’ombre et de silence aussi vite oublié, le récital de Maroussia Gentet donné en matinée au Centre Marcel Pagnol de la Roque-d’Anthéron et titré Images et métamorphoses se poursuit par une présentation de la pianiste d’ouvrages de Madeleine Isaksson et Pierre Schoeller, récemment créés pour et par elle.

Étonnamment, seuls deux des trois mouvements des Écrits sur l’eau sont présentés, ces deux petites pièces mettant en avant la compositrice franco-suédoise, qui développe à l’instar de Debussy et Ravel une technique d’écriture pour évoquer les flux et reflux marins, notamment par des graves très prononcés. Ce registre profite par ailleurs de la sonorité touffue du piano Bechstein utilisé, quand son aigu trop mat se voit fort heureusement bien exploité par le doigté résolument moderniste de Gentet.

En guise de troisième pièce, le Prélude n° 3 de Philippe Schoeller s’intègre comme un hommage à la peinture et plus particulièrement à celle de Vincent van Gogh. Plus dynamique, cette partition permet à la pianiste de montrer une belle dextérité de poignet, ensuite mise à profit pour le Livre II des Images de Debussy, qui seront redonnées le jour-même lors du récital de Jean-Frédéric Neuburger en fin d’après-midi.

Encore mesurée avec Cloches à travers les feuilles, Maroussia Gentet parvient à mieux traiter les couleurs moirées d’Et la lune descend sur le temple qui fut, toutefois là encore un peu timoré. Seuls Poissons d’or libère véritablement le toucher en trouvant de frétillants tressautements dans la partie droite du clavier. Siza, Étude d’architecture n° 2 d’Hector Parra, créée cette année aux Bouffes du Nord, permet de retrouver un compositeur actuel, en plus de présenter une belle construction par le biais d’une lumière froide plaquée par des accords brusques, écrits en hommage à l’architecte portugais.

Puis Miroirs de Ravel, déjà enregistré en live au Concours d’Orléans de 2019, où Gentet a gagné le Premier Prix, avant de paraître depuis chez b.records, permet une dernière fois à l’artiste d’étaler son jeu coloré, particulièrement bien adapté aux mouvements d’Une barque sur l’océan. Moins puissant par une agilité plus limitée, Alborada del gracioso s’efface pour La Vallée des cloches, éléments à mettre en regard avec ceux imagés par Debussy en amont d’un programme très bien construit, duquel ne dépareillent que les bis, étonnamment dévolus à Chopin.