|
|
CRITIQUES DE CONCERTS |
05 octobre 2024 |
|
Nouvelle production d’Armide de Gluck dans une mise en scène de Lilo Baur et sous la direction de Christophe Rousset à l’Opéra Comique, Paris.
La Rose de Damas
Lilo Baur transcende le décoratif dans une mise en scène enracinant les passions d’Armide et Renaud dans un mode sylvestre tour à tour enchanteur et désolé. Cette variation climatique aux images d’une grande richesse laisse une empreinte puissante alors que Christophe Rousset emmène vigoureusement au succès une distribution où Véronique Gens triomphe.
|
|
Lutte des classes
Petits bonheurs au purgatoire
Folle Ă©quipe
[ Tous les concerts ]
|
Les premières scènes avec un décor fait de panneaux de moucharabieh, des costumes pittoresques pour la cour d’Hidraot à Damas inscrivent la production de cette Armide dans une certaine fidélité au livret. Pour un ouvrage dont la dernière représentation scénique parisienne remonte à 1913, on sait gré à la metteuse en scène Lilo Baur de ne pas avoir cherché midi à quatorze heures.
Pour autant, ce travail ne risque-t-il pas de sombrer dans le décoratif comme le suggère au II le dévoilement d’un arbre splendide ornement du monde de la magicienne ? Les hommes et femmes des chœurs sont alors vêtus de cuir et paille pour parfaire une ambiance puissamment sylvestre. Lilo Baur ne tombe pas dans le piège d’une énième relecture contemporaine des croisades pour se concentrer sur le cœur du livret de Quinault : les affres de l’amour.
L’enracinement terrien de cette très tragique carte de Tendre se teinte ici et là d’un humour discret et d’une ingénuité rafraîchissante, jusqu’au personnage de Renaud, si peu guerrier ici, ressemblant davantage à un Peter Pan assagi. Dans cette conception, la multiplication des personnages secondaires, faiblesse d’un livret considéré en son temps comme un parangon de perfection s’estompe, et l’acte IV sans les protagonistes prend même une importance remarquable avant l’anéantissement sentimental du V. Dans la fosse, les Talens lyriques offrent un miroir dramatique.
Christophe Rousset impose souvent des tempos très allants voire rapides, qui accusent parfois d’une manière un peu roide le classicisme de la composition. C’est sans doute très juste stylistiquement mais face à la scène on aurait pu imaginer plus de gourmandise et de fantaisie, notamment dans les danses. Le chef privilégie une ligne claire et élégante que ce soit dans l’orchestre ou pour les interventions du chœur Les éléments dont le français est d’une limpidité confondante.
Sur le plateau, c’est le triomphe sans mélange de l’Armide si longtemps attendue de Véronique Gens. La chanteuse intègre l’expérience à l’émotion sans que jamais le fil vocal ne perde ses proportions idéales. C’est presque l’inverse pour le Renaud de Ian Bostridge qui fait un personnage scénique des plus étranges et qui maîtrise la langue, mais dont l’émission heurtée rompt parfois l’équilibre entre chant et déclamation. Le reste de la distribution n’apporte que des satisfactions et même davantage en ce qui concerne le duo formé par Enguerrand de Hys et Philippe Estèphe au IV. Leur présence ardente se double d’une éloquence émouvante.
| | |
|
Opéra Comique - Salle Favart, Paris Le 05/11/2022 Thomas DESCHAMPS |
| Nouvelle production d’Armide de Gluck dans une mise en scène de Lilo Baur et sous la direction de Christophe Rousset à l’Opéra Comique, Paris. | Christoph Willibald Gluck (1714-1787)
Armide, drame héroïque en cinq actes (1777)
Livret de Philippe Quinault
Chœur Les Éléments
Orchestre Les Talens lyriques
direction : Christophe Rousset
mise en scène : Lilo Baur
décors : Bruno de Lavenère
costumes : Alain Blanchot
Ă©clairages : Laurent Castaingt
Avec :
Véronique Gens (Armide), Ian Bostridge (Renaud), Edwin Crossley-Mercer (Hidraot), Anaïk Morel (La Haine), Philippe Estèphe (Aronte / Ubalde), Enguerrand de Hys (Artémidore / Le Chevalier danois), Florie Valiquette (Sidonie / Mélisse / une bergère), Apolline Raï-Westphal (Phénice / Lucinde / Plaisir / une naïade). | |
| |
| | |
|