Créée à Aix-en-Provence en 1991 et reprise partout dans le monde avant de s’installer pour un long temps à l’ENO, la production d’A Midsummer Night’s Dream avait participé à la reconnaissance de Robert Carsen comme l’un des metteurs en scène d’opéra les plus importants de sa génération, en même temps qu’elle avait largement contribué à redonner de la place sur les scènes à l’œuvre de Britten. Et si elle n’avait rien perdu de sa féérie à Lyon en 2008, la reprise de Rouen cette saison démontre après trente-deux ans que les grandes productions ne vieillissent pas.

Placée sur un lit géant au I, la proposition se développe vers autant de lits à taille humaine qu’il faut former de couples au II, le vert magique de la couverture envahissant petit à petit une partie des protagonistes, qui glissent vers le songe jusqu’à se retrouver surélevés dans le ciel au III. Aux décors et costumes de Michael Levine s’adaptent les lumières de Peter van Praet, sous l’onirisme d’un quart de lune naissant, plus gros à mesure que la comédie se développe.

Particulièrement efficace, cette mise en scène montre à quel point l’opéra est toujours un art moderne et comme une mise en scène adaptée à un public contemporain peut toucher, les jeunes comme les plus âgés se retrouvant sous leurs effusions de rires lors des répétitions au II et plus encore pendant la représentation de Pyrame et Thisbé, préparées par le Bottom bien projeté de Joshua Bloom, auquel revient de porter la célèbre tête d’âne une partie de l’ouvrage.

Parfaitement accordés pour porter le comique du livret, ses comparses artisans jouent et chantent dans un anglais souvent très audible, pour laisser ressortir le ténor Anthony Gregor en Flute et la basse Barnaby Rea en Quince. Des rôles principaux, le contre-ténor Paul-Antoine Bénos Djian porte l’Obéron écrit pour Alfred Deller avec une belle clarté, surpassé cependant par la dynamique scénique du Puck surexcité de Richard James-Neale, tandis que des femmes se démarque la Tytania expressive de Soraya Mafi.

Associé au superbe Trinity Boys Choir londonien sur scène, l’Orchestre de l’Opéra national de Rouen dirigé par son directeur musical Ben Glassberg contribue en fosse à la dynamique de la soirée grâce à une belle justesse, aussi caractéristique aux cuivres qu’à la harpe ou surtout aux percussions, toujours très équilibrées par rapport à la scène.