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CRITIQUES DE CONCERTS |
05 octobre 2024 |
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Nouvelle production de Hamlet de Thomas dans une mise en scène de Krzysztof Warlikowski et sous la direction de Pierre Dumoussaud à l'Opéra national de Paris.
Une histoire de la folie
Belle réussite que cet Hamlet dans une mise en scène signée Krzysztof Warlikowski qui croise l'onirisme et la terreur comme jalons de la folie du personnage. Le plateau superlatif est dominé par un Ludovic Tézier anthologique, aux côtés d’Eve-Maud Hubeaux, Lisette Oropesa et Jean Teitgen, sous la direction brillante de Pierre Dumoussaud.
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Hamlet d'Ambroise Thomas fait un retour triomphal à l'Opéra de Paris d’où il était absent depuis 1938. Ce puissant chef-d'œuvre du grand opéra français revient en grâce un peu partout, y compris à l'Opéra Comique qui en a proposé une mise en scène de Cyril Teste. Le secret de cette réussite est dû d’abord à une mise en scène onirique et puissante, qui se hisse au sommet d'une saison plutôt terne, et compte parmi les spectacles les mieux calibrés de Krzysztof Warlikowski.
L'alchimie repose sur la parfaite cohérence des éléments scénographiques qui inscrivent l'ouvrage dans une esthétique d'une unité en soins psychiatriques où se croisent les problématiques du pouvoir et de la coercition. Les décors entourent l'action de hauts pans grillagés montant vers les cintres avec un couloir latéral où les patients font les cent pas et une scène principale qui coulisse en profondeur et que divisent des cloisons mobiles.
Les éclairages utilisent une palette identifiable au premier regard, du rouge incarnat au vert émeraude, avec une insistance sur les surfaces mates et métalliques. La grande salle et les tables rappellent l'hôpital San Clemente photographié par Raymond Depardon mais l'intérêt se concentre sur les projections vidéo – images mentales d'un personnage à la dérive entre une folie feinte ou réelle et l'obsession de venger un parricide que Warlikowski a souhaité placer en perspective de l'amour incestueux d'Hamlet pour sa mère Gertrude.
Le roi assassiné est cet inquiétant clown blanc qui apparaît à Hamlet et plane au-dessus de la scène, fascinant et terrifiant personnage entre Pagliacci et Caligari auquel répond un Hamlet en version négative et costume noir pour souligner le funeste couronnement à la toute fin de l'opéra. Le principe du flashback montre une Gertrude âgée sur son fauteuil roulant regardant tel un miroir un écran qui diffuse Les Dames du bois de Boulogne de Robert Bresson. Adapté des Liaisons dangereuses, le film donne ici un relief particulier au stratagème qui réunit Hamlet et Ophélie-Agnès.
Ludovic Tézier remporte la palme de la soirée, faisant de sa prise de rôle un moment d'anthologie. La voix est pleine et parfaitement projetée, d'une noirceur et d'une densité à fleur d'un texte dont il exprime tantôt le trouble irascible, tantôt l'effroi de la folie. Son duo avec Eve-Maud Hubeaux (Gertrude) traduit chez la mezzo un volume, des accents et une palette remarquable.
Lisette Oropesa (Ophélie) donne sa scène de la folie in-extenso, avec une large gamme colorature où le contrôle du souffle et de la ligne se jouent d’un espace aussi vaste que Bastille. Jean Teitgen offre à Claudius le relief psychologique d'un personnage à la fois souverain et vacillant, avec un timbre abyssal d'une beauté sans pareille. Ni le spectre de Clive Bayley, ni le Laërte de Julien Behr ne dépareillent dans cette superbe galerie de portraits.
Autre belle réussite, la direction de Pierre Dumoussaud parvient à donner une cohérence à une matière musicale souvent reléguée à une rutilance de mauvais aloi. Remplaçant Thomas Hengelbrock, le jeune chef français affirme pour ses débuts in loco un raffinement des lignes et un brio des accents qui transcendent cette fresque lyrique dont on se félicite du retour en grâce.
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Opéra Bastille, Paris Le 11/03/2023 David VERDIER |
| Nouvelle production de Hamlet de Thomas dans une mise en scène de Krzysztof Warlikowski et sous la direction de Pierre Dumoussaud à l'Opéra national de Paris. | Ambroise Thomas (1811-1896)
Hamlet, opéra en cinq actes (1868)
Livret de Jules Barbier et Michel Carré d’après l’œuvre éponyme de Shakespeare
Chœurs et Orchestre de l’Opéra national de Paris
direction : Pierre Dumoussaud
mise en scène : Krzysztof Warlikowski
décors et costumes : Malgorzata Szczęśniak
éclairages : Felice Ross
vidéo : Denis Guéguin
préparation des chœurs : Alessandro Di Stefano
Avec :
Ludovic Tézier (Hamlet), Lisette Oropesa (Ophélie), Jean Teitgen (Claudius), Ève-Maud Hubeaux (Gertrude), Julien Behr (Laërte), Clive Bayley (Spectre), Julien Henric (Marcellus), Frédéric Caton (Horatio), Philippe Rouillon (Polonius), Alejandro Baliñas Vieites (Premier Fossoyeur), Maciej Kwaśnikowski (Second fossoyeur). | |
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