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CRITIQUES DE CONCERTS |
22 mars 2025 |
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Nouvelle production de Siegfried de Richard Wagner dans une mise en scène d’Andreas Homoki et sous la direction de Gianandrea Noseda à l’Opéra de Zurich.
Siegfried Ă Marienbad
Remarquable réussite tant musicale que scénique pour le premier Siegfried de Klaus Florian Vogt, au chant probe et à l’incarnation touchante. Cast parfait, direction claire et lyrique chez un Noseda particulièrement inspiré. Quant à Homoki, il fait du Homoki : esthétique et affuté mais dans un cadre noir intrigant parfaitement réussi.
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Pour la suite de son Ring, la scène zurichoise se paie le luxe d’accueillir le premier Siegfried de Klaus Florian Vogt, jusque-là habitué à Lohengrin, Walther et Parsifal où sa voix – qu’on aime ou pas – éthérée et blanche, fait merveille. Siegfried réclame d’autres qualités et cette prise de rôle doit faire reconnaître au chanteur une intelligence et une énergie qui forcent l’admiration.
Si l’on peut perdre en héroïsme, la clarté de l’articulation et la qualité de la ligne font merveille, dans un rôle rarement aussi bien dit et chanté. La poésie et l’émotion que distille le ténor dans les moments d’introspection et de doute (murmures de la forêt, découverte du rocher) parachèvent encore un personnage particulièrement touchant.
Face à lui, Camilla Nylund fait preuve de la même finesse, d’un superbe timbre et d’un chant très soigné voire élégant sans pourtant manquer de vaillance. Et même si l’aigu est peu percutant, cette Brünnhilde n’en est pas moins crédible dans une salle à taille modeste. La jeunesse des deux héros est quoi qu’il en soit parfaitement rendue.
On retrouve avec grand bonheur Tomas Konieczny qui frappe toujours par un instrument très riche, sonore, aux aigus impressionnants mais surtout par une incarnation prenante. Son Wanderer est moins désabusé que revanchard, et sa chute provoquée par Siegfried n’en est que plus saisissante.
Le reste de la distribution est magnifique. Splendide Alberich de Christopher Purves, d’une élocution et d’une aisance confondantes. Même éblouissement pour le Mime de Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, rarement aussi éloquent et probe. Le Fafner de David Leigh est caverneux à souhait mais ne néglige pas sa ligne. Très bel oiseau de Rebeca Olvera, aux aigus dardés, et Erda d’Anna Danik aux graves un peu justes.
Tous sont soutenus par un Philharmonia Zürich dont le son homogène et rond le dispute à la qualité des solistes. La direction de Gianandrea Noseda est particulièrement séduisante, mélange de lisibilité, de sobriété et d’embardées lyriques sans excès à même d’emporter la salle à des sommets dans un sensationnel acte III.
Andreas Homoki expose toujours son esthétisme et la qualité de sa direction d’acteurs. On est dans une vision post-chéraldienne bien pensée, claire et efficace. L’action se déroule toujours dans une demeure bourgeoise aux les meubles démesurément grands, comme pour montrer que les personnages ne sont pas dans leur élément, qu’il leur manque qui le savoir, qui l’amour, qui la peur.
Autre différence par rapport aux deux premiers volets de ce Ring zurichois, les murs sont noirs, qui donnent une ambiance étrange et inquiétante, et les personnages errent dans ces pièces plus ou moins vides tels ceux du film de Resnais, L’année dernière à Marienbad, ce qu’accentue un plateau tournant remarquablement éclairé. Homoki ne néglige pas l’humour dans ce qu’on a parfois qualifié de scherzo du Ring, le tout avec une finesse appropriée. Vivement le dernier volet !
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