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CRITIQUES DE CONCERTS |
11 octobre 2024 |
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Première à l’Opéra de Lyon d'Elias de Mendelssohn dans la mise en scène de Calixto Bieito, sous la direction de Constantin Trinks.
Un prophète conquérant
Cet Elias de Mendelssohn mis en scène par Calixto Bieito à l'Opéra de Lyon résonne comme un spectacle bouleversant et tragique. Le plateau vocal, dominé par Derek Welton, Tamara Banješević et Kai Rüütel-Pajula, répond aux enjeux de la dramaturgie, soutenus avec force par la direction de Constantin Trinks et un chœur en tout point admirable.
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Reprise du spectacle créé par Calixto Bieito au Theater an der Wien en 2019, cet Elias plein de bruit et de fureur débarque sur la scène de l'Opéra de Lyon pour les fêtes. Cette lecture dramaturgique insuffle à l’oratorio de Mendelssohn une urgence et une force de tout premier ordre, qui interrogent au passage la question du prophète comme guide spirituel ou dictateur politique. Quels sont les mécanismes à l'œuvre dans cette fascination et cette attirance parfois irrationnelle qu'une foule peut exprimer vis-à -vis d'un chef charismatique ?
Bieito répond à cette question en vidant le plateau de ses artefacts décoratifs, à l'exception de hautes grilles métalliques présentes à l'arrière-scène et pour certaines, manipulées depuis les cintres pour contraindre l'espace vis-à -vis du chœur placé dessous, saisi comme une véritable meute animale et fanatique agglutinée autour du personnage central, et d'où émergent parfois des figures individuelles évoluant en contrepoint pour commenter ou contredire l'action principale. Pressé de questions sur la sècheresse que Dieu fait peser sur son peuple, on voit Elias tenter de sauver une église représentée par une grande maquette en carton que la foule ne tarde pas à déchirer.
L'Ange aux larges ailes blanches le guide dans sa quête, lui indiquant la volonté de Dieu de se rendre chez la Veuve et ressusciter son fils ou bien d'aller défier le roi Achab coupable d'avoir détourné le peuple en le livrant au culte de Baal. Les références très picturales sont abondantes et servent de jalons visuels à un spectacle par ailleurs d'une extrême lisibilité, en particulier dans la représentation des miracles accomplis par Élie, jusqu'à l'image finale montrant le prophète sacrifié par le peuple et sur le point de périr sur son bûcher, version profane du char de flammes dont parle le texte biblique.
Le plateau est d'un excellent niveau, à commencer par le rôle-titre, interprété par un Derek Welton qui n'a rien à envier à Christian Gerhaher à Vienne en 2019. L'intériorité du timbre est encore un peu à l'étroit au I dans Richte mich, Gott mais la palette s'élargit dans les interactions avec le chœur dans la scène finale avec un phrasé et des attaques très contrastées. À ses côtés, la mezzo Kai Rüütel-Pajula reprend le rôle de l'Ange en donnant au personnage une carrure et une urgence de premier plan.
La remarquable prestation de Tamara Banješević donne au personnage de la Veuve une présence incandescente quand Beth Taylor réussit de son côté à incarner une inoubliable Reine Jézabel. La performance des jeunes solistes du Lyon Opéra Studio n'attire que des éloges, à commencer par le Séraphin de Giulia Scopelliti ou l’Ovadyah de Robert Lewis, tous parfaitement soutenus par un Chœur de l'Opéra de Lyon admirablement préparé par Benedict Kearns et soulevés par la direction très sanguine de Constantin Trinks qui porte à ébullition le plateau et l'Orchestre de l'Opéra de Lyon.
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Opéra national, Lyon Le 17/12/2023 David VERDIER |
| Première à l’Opéra de Lyon d'Elias de Mendelssohn dans la mise en scène de Calixto Bieito, sous la direction de Constantin Trinks. | Felix Mendelssohn (1809-1847)
Elias, oratorio op. 70 (1846)
Livret de Julius Schubring d'après le Livre des Rois de l'Ancien Testament
Chœurs, Maîtrise et Orchestre de l’Opéra de Lyon
direction : Constantin Trinks
mise en scène : Calixto Bieito
décors : Rebecca Ringst
costumes : Ingo KrĂĽgler
Ă©clairages : Michael Bauer
vidéo : Sarah Derendiger
préparation des chœurs : Benedict Kearns & Nicolas Parisot
Avec :
Elias (Derek Welton), La Veuve (Tamara Banješević), L'Ange (Kai Rüütel-Pajula), Ovadyah (Robert Lewis), La Reine (Beth Taylor), Le Séraphin (Giulia Scopelliti), Celui qui est perdu (Pete Thanapat), Celle qui attend (Thandiswa Mpongwana), Achab (Yannick Berne), Celui qui cherche (Tigran Guiragosyan), Celui qui implore (Kwang Soun Kim), L'Enfant (Martin Falque). | |
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