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CRITIQUES DE CONCERTS |
14 octobre 2024 |
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Concert anniversaire des 80 ans de Peter Eötvös par l’Orchestre philharmonique de Radio France sous la direction de Gergely Madaras à la Maison de la Radio, Paris.
Ancré dans le XXe siècle
Après deux concerts de l’Ensemble intercontemporain, l’ultime chapitre des célébrations parisiennes du quatre-vingtième anniversaire de Peter Eötvös se déroule à Radio France avec sa Maîtrise, son Orchestre Philharmonique dirigé par Gergely Madaras et deux invités de marque, le comédien Lambert Wilson et le harpiste Xavier de Maistre.
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Auditorium de la Maison de la Radio, Paris
Le 18/01/2024
Chloë ROUGE
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Madrigalesques et légers, les 13 Haïkus pour chœur d’enfants s’inspirent de l’ascèse de la poésie japonaise pour figurer les délicats animaux que sont l’uguisu, l’alouette, le moineau, le papillon et la grenouille. Peter Eötvös, absent pour ce concert anniversaire car souffrant, emploie le chant homorythmique, le parler, les bruitages, la micropolyphonie (qui rappelle Ligeti) avec une harmonie légèrement dissonante. Autant d’éléments que la Maîtrise de Radio France fait résonner avec justesse, humour et délicatesse. Dépeinte ainsi, la fragilité de la nature se teinte d’inquiétude.
Dans Egyedül, composée en 1956 et révisée en 2006, la nature paisible et nocturne appelle « la solitude ». La direction de Sofi Jeannin en fait ressortir les moindres variations. Le chœur suit avec souplesse les indications de sa cheffe pour un résultat angélique et immersif. La Maîtrise laisse place à la création du Concerto pour harpe d’Eötvös par son dédicataire, Xavier de Maistre qui, malgré la maîtrise technique, manque souvent de moelleux dans le son.
Dès le deuxième mouvement, le compositeur hongrois s’essaie à une micro-tonalité où la harpe avec scordatura rencontre les quarts de tons du cor. Dans une atmosphère vaporeuse, le dialogue se crée entre deux mondes séparés par un miroir. Un peu anecdotiques, les micro-intervalles auraient pu être plus convaincants s’ils avaient concerné davantage d’instruments. Du reste, on retrouve l’orchestration enchanteresse et équilibrée d’Eötvös pourtant diluée dans des sections trop longues et un discours confus.
Entre citations célèbres orchestrées (Oiseau prophète, Alléluia du Messie, Cantate 21) et questionnement philosophique emprunté à Kant, l’Halleluja-Oratorim balbulum avec son prophète bègue qui ne peut prédire l’avenir, a de quoi séduire. Pourtant, Peter Eötvös et Peter Esherházy tombent dans un discours fataliste aseptisé où le monde semble s’être arrêté après les attentats du 11 novembre 2001. Si l’humour, certes cynique, se veut être le point central de l’œuvre, il n’atteint pas celui du Grand macabre de Ligeti où les citations, dissimulées, sont aussi légion.
On ne peut s’empêcher de penser que le compositeur a perdu lui aussi son sens de la prophétie au XXIe siècle. On admirera cependant Lambert Wilson en récitant au ton didactique, les voix de l’Ange (Katharina Kammerloher) et du Prophète (Artavazd Sargsyan) ainsi que l’Orchestre Philharmonique de Radio France dans cette partition foisonnante.
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Auditorium de la Maison de la Radio, Paris Le 18/01/2024 Chloë ROUGE |
| Concert anniversaire des 80 ans de Peter Eötvös par l’Orchestre philharmonique de Radio France sous la direction de Gergely Madaras à la Maison de la Radio, Paris. | Peter Eötvös (*1943)
13 Haikus pour chœur d’enfants
EgyedĂĽl
Maîtrise de Radio France
direction : Sofi Jeannin
Concerto pour harpe
Xavier de Maistre, harpe
Halleluja-Oratorium balbulum
Lambert Wilson, récitant
Katharina Kammerloher, mezzo-soprano
Artavazd Sargsyan, ténor
Orchestre Philharmonique de Radio France
direction : Gergely Madaras | |
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