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CRITIQUES DE CONCERTS |
14 octobre 2024 |
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Récital de Florestan vs Eusebius de Jean-François Heisser au Théâtre des Bouffes du Nord, Paris.
Inspirations romantiques
En récital aux Bouffes du Nord, Jean-François Heisser associe la figure romantique de Schumann, par son cycle Davidsbündlertänze, à des pièces inspirées par sa musique aux contemporains Lachenmann et Widmann. Le programme intègre également les Bagatelles op. 126 de Beethoven et L’invitation à la danse de Weber.
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Sur un beau piano à queue Chickering de 1868 à cordes parallèles avec seulement deux pédales, Jean-François Heisser construit pour La Belle Saison un programme autour du cycle Danses des compagnons de David de Schumann, dans lequel sont intégrées six des Onze Humoresques du compositeur de notre temps Jörg Widmann.
Intitulé Florestan vs Eusebius, ce concert associe l’idée du moderne contre le réactionnaire à celle de courtes pièces, distinctes des grandes œuvres majoritairement en forme sonate. Ouverte avec les Six Bagatelles op. 126 de Beethoven, la soirée montre d’abord un pianiste un peu en difficulté par le manque de souplesse dans la première, puis à mesure plus serein.
Le geste se libère véritablement avec la n°3 et même si la n°4 Presto n’est pas très rapide, elle offre un geste plus ouvert en plus de profiter de la très belle sonorité du piano, surtout dans la première moitié du clavier, aux médiums et graves chauds et pleins. Jouée juste après, la courte pièce Wiegenmusik d’Helmut Lachenmann, basée sur un extrait des Scènes d’enfants, convainc totalement par la grande culture de Heisser pour aborder ce type de partition contemporaine, sans en exagérer les angularités.
Encore plus passionnante, L’Invitation à la danse de Weber est ensuite décrite brièvement par le pianiste, sans tact pour expliquer que deux timides finissent par se parler pour valser ensemble, avant de finalement se séparer… Avec ce programme, il semble que cette musique soit la première pièce instrumentale à décrire une histoire, et qu’elle ait marqué Berlioz autant que les Viennois et Ravel pour leurs valses.
Avec la main gauche pour l’homme et la droite pour la femme, Heisser peut maintenant accorder et désaccorder ses mouvements facilement selon la partition, toujours en profitant de la sonorité de l’instrument, en même temps qu’il doit utiliser les techniques de mains croisées puis se servir parfois de tout l’écartement du clavier pour créer la distance entre les deux amants.
En dernière partie, le cycle de Schumann est augmenté tous les trois morceaux par des Humoresques de Widmann. L’idée n’est stylistiquement pas mauvaise, puisque là encore l’œuvre du compositeur contemporain est inspirée du romantique, mais le résultat, interprété lentement, crée un corpus de presque cinquante minutes, auquel manque parfois un peu de contraste, même si l’on apprécie particulièrement les derniers numéros.
Hésitant à revenir pour offrir un bis, Heisser se remet finalement devant le Chickering pour un beau Moment musical n° 2 D.780 de Schubert, puis rappelle que l’instrument en présence a été joué aux États-Unis par Gottschalk, artiste à l’origine du ragtime, dont il donne une version volontairement moderne et défigurée, bien adaptée à l’aigu court et mat de la dernière octave du clavier.
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Théâtre des Bouffes du Nord, Paris Le 25/03/2024 Vincent GUILLEMIN |
| Récital de Florestan vs Eusebius de Jean-François Heisser au Théâtre des Bouffes du Nord, Paris. | Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Six Bagatelles, op. 126
Helmut Lachenmann (*1935)
Wiegenmusik
Carl Maria von Weber (1786-1826)
Aufforderung zum Tanz, op. 65
Robert Schumann (1810-1956)
Davidsbündlertänze, op. 6
Jörg Widmann (*1973)
Elf Humoresken (extraits)
Jean-François Heisser, piano | |
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