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CRITIQUES DE CONCERTS |
12 septembre 2024 |
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Reprise de Tannhäuser dans la mise en scène de Tobias Kratzer, sous la direction de Nathalie Stutzmann au festival de Bayreuth 2024.
Bayreuth 2024 (4) :
Liberté Fraternité Sainteté
Le tout meilleur de l’Atelier Bayreuth où le Tannhäuser ébouriffant de Tobias Kratzer ne prend pas une ride avec son mélange de dérision, d’insolence et de profondeur. La direction ouvragée de Nathalie Stutzmann et la distribution toujours exemplaire confirment le coup de génie qui n’en finit pas de s’enrichir et de se bonifier. Humour, émotion, et au fond une vraie piété.
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Tannhäuser oppose au metteur en scène contemporain son enjeu épineux. On peut suivre Antigone, peut-être même les familles ennemies du Cid. Mais l’Homme moderne peut-il s’émouvoir de l’avis du Pape sur un homme damné auprès de Vénus et racheté par la mort d’une femme ? Face à cette difficulté, plusieurs attitudes : assumer, nier, contourner.
Kratzer (le bien nommé) a choisi de gratter. De creuser. Et il a trouvé du pétrole, avec une sacrée hauteur de vue. S’il n’était que l’éblouissante farce shakespearienne de deux modèles de théâtre et de vie qui s’affrontent, la foire de l’insouciance versus la grandeur académique, avec l’impayable virtuosité de moyens techniques parfaitement mesurés, repensés chaque année – hommage applaudi pendant l’ouverture au si regretté Stephen Gould –, le spectacle serait déjà quelque chose.
Mais la sainteté d’Elisabeth consiste ici à s’abaisser, à rencontrer la Cour des miracles, à se mêler à ceux qui ne sont rien (Le Gateau Chocolat est devenu un premier de cordée au III), à partager la cuillère d’un marginal, et même à s’offrir corps et âme (il faut réécouter Hop-là de Barbara !), dans une séquence émaillée de larmes et reniflements du public.
Loin de nous l’idée de relayer les polémiques récentes sur la supposée atteinte à la Cène lors de la cérémonie d’ouverture des JO, ou la controversée Immersion (Piss Christ) d’Andres Serrano. Il y a un coup de génie à conjoindre dans le même spectacle un exposé éthique des limites à l’exercice insouciant de la liberté (lorsque partir sans payer au Burger King aboutit à la mort d’un policier) et une réflexion théologique sur l’humilité, la tolérance, la déchéance comme viatique à la sainteté.
Que demander de plus ? Une partie musicale à l’avenant. C’est le cas avec la direction ciselée de Nathalie Stutzmann, mouvante, verbale, qui cherche partout l’accent et le phrasé. Nul doute que le fabuleux savoir-faire de l’orchestre est pour beaucoup dans la réalisation de nuances et de couleurs faisant corps avec le texte et les voix au péril de la mise en place – concours de chant au bord du précipice. Rencontre fructueuse d’une routine (au tout meilleur sens du terme) exemplaire et de la passion de l’articulation.
Parmi les nouveaux venus, Irene Roberts campe une Vénus bien trempée en dépit d’une certaine largeur d’émission, plus charismatique que séductrice, absolument Frei im Wollen, frei im Tun, frei im Genießen (libre dans sa volonté, dans ses actions, dans son plaisir), selon le mot de Wagner qui sert de slogan aux joyeux lurons. Timbre et musicalité de soprano blond à l’ancienne, malgré une émission ici ou là fantomatique, Elisabeth (Teige) évolue de la bourgeoisie glacée à la sainteté hagarde aux côtés d’un Klaus Florian Vogt rayonnant, moins dans la grande ligne de chant que dans une jeunesse insolente et expressionniste. Un sommet.
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Festspielhaus, Bayreuth Le 04/08/2024 Thomas COUBRONNE |
| Reprise de Tannhäuser dans la mise en scène de Tobias Kratzer, sous la direction de Nathalie Stutzmann au festival de Bayreuth 2024. | Richard Wagner (1813-1883)
Tannhäuser, opéra romantique en trois actes (1845)
Livret du compositeur
Version de Dresde
Chor und Orchester der Bayreuther Festspiele
direction : Nathalie Stutzmann
mise en scène : Tobias Kratzer
décors & costumes : Rainer Sellmaier
vidéo : Manuel Braun
Ă©clairages : Reinhard Traub
préparation des chœurs : Eberhard Friedrich
Avec :
Günther Groissböck (Landgraf Hermann), Klaus Florian Vogt (Tannhäuser), Markus Eiche (Wolfram von Eschenbach), Siyabonga Maqungo (Walter von der Vogelweide), Olafur Sigurdarson (Biterolf), Martin Koch (Heinrich der Schreiber), Jens-Erik Aasbø (Reinmar von Zweter), Elisabeth Teige (Elisabeth), Irene Roberts (Venus), Flurina Stucki (Ein junger Hirt), Le Gateau Chocolat (Le Gateau Chocolat), Manni Laudenbach (Oskar), Simone Lerch, Irene Roberts, Laura Margaret Smith, Annette Gutjahr (Edelknaben). | |
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