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CRITIQUES DE CONCERTS |
22 mars 2025 |
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Le Ring sans paroles de Wagner par l’Orchestre national des Pays de la Loire sous la direction de Constantin Trinks à la Cité des Congrès de Nantes.
Wagner sans paroles
Lorin Maazel, qui aurait voulu diriger le Ring en quinze heures sans discontinuité, proposa dans les années 1980 une version purement symphonique de cette fresque organisée autour des principaux leitmotive. Aujourd’hui, l’ONPL relève à son tour ce défi avec enthousiasme et homogénéité sous la conduite du chef Constantin Trinks, au souffle long et féru de la geste wagnérienne.
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On pourrait hurler à la trahison à l’écoute de ce digest du Ring, œuvre d’un créateur si attaché à l’art total où parole, musique et théâtre ne font qu’un. Lorin Maazel, qui connaissait son Wagner sur le bout de la baguette – il avait dirigé à Bayreuth Lohengrin en 1960, puis le Ring en 1968 et 1969 à la suite de Karl Böhm –, ne pouvait commettre le crime de lèse-majesté dont on l’accusa lorsqu’il entreprit de rassembler en soixante-dix minutes l’essentiel de la Tétralogie sans les voix.
Le grand art consistait dès lors à enchaîner chaque séquence, garder le sens narratif et permettre de retrouver, en conservant l’écriture de Wagner, les principaux avatars des protagonistes de ce monument de l’art lyrique. Constantin Trinks, qui a occupé différents postes à Sarrebruck puis Darmstadt et mène depuis une carrière internationale, est le musicien rêvé pour mener à bien ce voyage. Spécialiste du répertoire allemand, il manifeste à tout moment non seulement une technique éprouvée, mais surtout un sens de la construction qui excelle à mettre en scène ce défi, jusqu’à faire oublier l’absence de chant.
Sous sa baguette, l’ONPL fait feu de tout bois, donnant à cette partition l’allure d’un immense poème symphonique straussien sans jamais perdre de vue la dimension unitaire. Outre la puissance de l’expression dans la montée au Walhalla, la passion exaltée de Siegfried et Brünnhilde, la sensibilité jaillissant au détour des Adieux de Wotan, le tellurisme du final du Crépuscule des dieux, l’impression de clarté s’impose ne serait-ce que dans la recherche de l’équilibre, du dosage, de la fluidité et de la couleur.
Certes, l’acoustique de la Cité des Congrès de Nantes ne peut se comparer à celle du Festspielhaus, d’autant que les pupitres sont à découvert sur la scène. Néanmoins, une impression organique se détache de cette interprétation en tous points remarquable où l’excellence de chaque soliste témoigne du travail accompli durant les répétitions – avec une note toute particulière pour la souplesse du cor de Pierre-Yves Bens ou la prestation éblouissante du timbalier Nicolas Dunesme dans la Mort de Siegfried. La salle comble est partie prenante de cette fête orchestrale.
Comme l’a signalé dans un propos liminaire Jean-Philippe Marteau, cor anglais de l’orchestre applaudi à tout rompre, il est inquiétant que la baisse des subventions imposée par le Conseil régional puisse entacher la réputation de cette formation. L’arrivée en septembre 2022 du chef viennois Sascha Goetzel a d’ailleurs apporté un sang neuf, ce dont témoignent les précédents concerts (une Héroïque d’une énergie à revendre, une Septième de Bruckner à la logique imparable), confirmant les qualités de cette phalange plus que cinquantenaire.
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Cité des Congrès, Nantes Le 06/02/2025 Michel LE NAOUR |
 | Le Ring sans paroles de Wagner par l’Orchestre national des Pays de la Loire sous la direction de Constantin Trinks à la Cité des Congrès de Nantes. | Richard Wagner (1813-1883)
Le Ring sans paroles
Arrangement de Lorin Maazel (1930-2014)
Orchestre national des Pays de la Loire
direction : Constantin Trinks |  |
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