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L'ACTUALITE DE LA DANSE |
19 juin 2025 |
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Reprise des Enfants du Paradis de José Martinez au Ballet de l’Opéra national de Paris.
Charme, technique et délicate émotion
Agnès Letestu & Stéphane Bullion
Parallèlement à la création mondiale de l’Anatomie de la sensation de Wayne Mac Gregor, le Ballet de l’Opéra présente en conclusion de sa saison la fort poétique vision de l’Étoile José Martinez des Enfants du paradis. Bien construit et superbement dansé, le ballet, créé en 2008, affirme sa place dans le grand répertoire.
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Sans prétendre révolutionner l’art de la danse ni copier le film culte présent dans toutes les mémoires, José Martinez, grand danseur et habile chorégraphe, avait su, en 2008, retrouver dans sa chorégraphie, avec les décors d’Ezio Toffolutti et les ravissants costumes de l’Étoile Agnès Letestu, ballerine exceptionnelle et artiste de grand goût, un climat poétique, nostalgique, entre rêve et réalité, emprunt d’une très délicate émotion.
Cette reprise est donc la bienvenue, car le ballet reste paré de toutes ses qualités. Une grève de plus, presque une tradition pour les événements de fin ou de début de saison, a privé les spectateurs de la première distribution, tout comme de la création du Wayne Mac Gregor… et obligé à donner l’Otello de Verdi accueillant la superstar Renée Fleming en version de concert.
Rien ne changera jamais à l’Opéra de Paris que ces escarmouches n’atteignent pas en profondeur. Les grèves passent. On les oublie et l’art demeure. Tant pis pour l’argent des contribuables, catégorie à laquelle appartiennent d’ailleurs aussi les grévistes. C’est donc la deuxième distribution qui est devenu la première et, comme c’est en général le cas ici, elle est aussi d’un éclat indiscutable.
On sait que de manière concise, José Martinez et François Roussillon, sur une partition commandée à Marc-Olivier Dupin, ont su raconter l’histoire imaginée par Prévert et génialement traitée au cinéma par Carné, s’en tenant à ses faits essentiels et à ses ressorts dramatiques primordiaux. Aucun longueur ni aucune hâte. Juste ce qu’il faut d’action, avec beaucoup de danse, ensembles, variations pas de deux et de nombreux rôles à caractériser, ce qui permet un vaste déploiement de talents.
Il y a de la grande technique aussi, mais pas seulement. Simples mais efficaces et très évocateurs des lieux et de l’époque, les décors en perpétuelle mouvance scandent l’action. Agnès Letestu a imaginé des costumes bien diversifiés, conçus avec autant de raffinement que d’intelligence, sachant mieux que quiconque ce qui sied au danseur et peut les mettre en valeur.
C’est d’ailleurs elle-même qui pour la première fois incarne Garance. Quelle beauté, quel grâce sans afféterie, quelle somptueuse aisance technique ! Au sommet de sa carrière, la grande ballerine donne une sorte de leçon globale en tous domaines, montrant en particulier comment on peut être un personnage mythique tout en restant soi-même. Car elle ne copie personne, aucune actrice, aucune danseuse. Elle est Garance avec ses propres et multiples atouts. Une immense réussite.
Stéphane Bullion est aussi pour la première fois Baptiste. Physique athlétique et danse généralement très tonique, on pouvait se demander comment il se glisserait dans la peau du fragile et sensible héros que créa au cinéma Jean-Louis Barrault et qui demande autant de mime, de retenue et d’intériorité que de danse. Pour lui aussi, la réussite est totale. On lui découvre des qualités dramatiques authentiques, une capacité de retenue dans l’expression et le geste que la plupart de ses rôles ne lui avaient pas encore permis de montrer dans cette lumière.
Dans le rôle du redoutable Lacenaire, on retrouve Vincent Chaillet, fulgurant de technique et de théâtralité. Son très grand potentiel ne cesse de se développer depuis qu’il est Premier Danseur et on n’a pas encore vu tout ce qu’il peut apporter désormais dans les premiers grands rôles du répertoire. On l’attend avec impatience en tout premier plan la saison prochaine.
Très charmante et touchante Nathalie de Clairemarie Osta, subtile et fine. Quant au Frédéric Lemaître de Florian Magnenet, il alterne brillante démonstration de grande école avec quelques faiblesses aussi, mais affirme la capacité du danseur à donner vie et relief aux personnages qui ont une épaisseur dramatique. Comte bien présent de Yann Saïz et irrésistible Madame Hermine pulpeuse de Valentine Colasante.
Que de talents divers contient cette compagnie ! On ne cessera jamais de le constater avec admiration. Le 15 juillet, rappelons-le, c’est en dansant pour la première fois lui-même le rôle de Baptiste que José Martinez fera ses adieux d’Étoile, avant de partir prendre la direction de Ballet national d’Espagne.
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Palais Garnier, Paris Le 30/06/2011 Gérard MANNONI |
 | Reprise des Enfants du Paradis de José Martinez au Ballet de l’Opéra national de Paris. | Les Enfants du paradis, ballet en deux actes d’après le scénario de Jacques Prévert et le film de Marcel Carné
chorégraphie : José Martinez
musique : Marc-Olivier Dupin
adaptation : François Roussillon & José Martinez
décors : Ezio Toffolutti
costumes : Agnès Letestu
éclairages : André Diot
Orchestre de l’Opéra national de Paris
direction : Jean-François Verdier
Avec les Étoiles, les Premiers Danseurs et le Corps de ballet de l’Opéra national de Paris |  |
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