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L'ACTUALITE DE LA DANSE 19 avril 2024

Ten Chi, de Pina Bausch au Théâtre de la Ville, Paris.

Le Japon selon Pina
© Laurent Philippe

Beauté absolue et dépouillement toujours plus grand au Théâtre de la Ville pour Ten Chi, pièce inspirée à Pina Bausch par une résidence de sa compagnie au Japon. Une peinture du pays du soleil levant sous ses deux aspects les plus significatifs : la recherche de pureté stylistique, et les petites manies qui font souvent sourire les occidentaux.
 

Théâtre de la Ville, Paris
Le 03/05/2005
Gérard MANNONI
 



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  • D'année en année, le travail de Pina Bausch se dépouille de tout ce qui gênait parfois mais était aussi une des particularités de son style, à savoir une multiplicité de gags drôles ou plus ou moins violents, voire sado-maso, et une omniprésence du texte. Une sorte de volupté dans la longueur et la répétition, aussi. Tout cela, bien sûr, était noyé dans une qualité unique de la danse, de la gestuelle, de la recherche théâtrale et scénographique.

    Avec Ten Chi, la grande chorégraphe atteint un nouveau sommet dans le raffinement d'une danse somptueuse, beaucoup plus présente qu'autrefois, sensuelle, imaginative, défendue ici surtout par les femmes. Ces danseuses aux jambes interminables, longilignes ou joliment plus dodues, vêtues de robes rétros fluides aux couleurs modern style, ont une façon unique de se mouvoir sur des talons aiguilles aussi bien que pieds nus, avec une alliance de force et de souplesse, de lascivité et de distinction qui demeurent une des signatures inégalables de Pina Bausch.

    Sans parler des visages, où l'on retrouve ces expressions doucereuses promptes à devenir agressives, ces timidités ou ces fureurs que s'approprient la nouvelle génération d'interprètes et qu'illustrent toujours avec le même talent ravageur une Nazareth Panadero, danseuse et comédienne d'exception. De beaux solos de Dominique Mercy, lui aussi irremplaçable, et d'un ou deux garçons, mais ils sont plus rares, servant surtout à mettre les filles en valeur. Plusieurs duos et ensembles sont également des pièces d'anthologie.

    © Laurent Philippe

    Et comme toujours, Peter Pabst a imaginé des éléments scéniques, originaux, queue, dorsale et nageoire d'un cachalot qui semble émerger de l'océan, et qui, grâce à la poétique pluie de pétales blancs qui tombent sans discontinuer de la fin de la première partie à la fin du spectacle, se transforme quasiment en un jardin Zen sous la neige. Cette fausse neige devient d'ailleurs si épaisse sur le sol qu'elle modifie peu à peu le rapport des danseurs avec le plateau, un peu comme le faisaient par exemple la terre dans le Sacre du Printemps, ou l'eau dans d'autres pièces.

    De la beauté fascinante de tout cela ressortent deux images différentes du Japon. L'une, distanciée, est justement celle de cette pureté de ligne, de finesse de comportement, qui donne la tonalité générale du spectacle. Il y a quelques allusions à la gestuelle théâtrale traditionnelle, à l'habillement, aux rapports humains si strictement codifiés dans ce pays. Et puis, il y a de l'humour, pour rappeler les manies, les excès en tous genres qui sont indissociables de la civilisation nipponne, avec ses bons côtés et ceux qui nous font sourire. Un savant dosage qui ne tourne pas à la caricature méchante et ne quitte jamais le terrain de l'esthétisme.

    Il est prévisible que cet affront fait à la non-danse et au non-spectacle tellement à la mode en ce moment et pour quelque temps encore sans doute, sera reçu comme un déclin d'inspiration de la part de Pina Bausch. Il serait plus honnête d'y constater le résultat somptueux d'une remise en question et d'une évolution permanentes que bien peu de créateurs de cette dimension ont le courage ou la lucidité de faire. C'est une leçon magistrale pour tous les petits maîtres qui croient jouer dans la cour des grands alors qu'ils ne sortiront sans doute jamais de celle de la maternelle.



    Théâtre de la Ville jusqu'au 15 mai.




    Théâtre de la Ville, Paris
    Le 03/05/2005
    Gérard MANNONI

    Ten Chi, de Pina Bausch au Théâtre de la Ville, Paris.
    Ten chi
    Une pièce de Pina Bausch
    chorégraphie et mise en scène : Pina Bausch
    décor et vidéos : Peter Pabst
    costumes : Marion Cito
    Avec les danseurs du Tanztheater Wuppertal.

     


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