Il faut d'abord saluer la manière dont cette excellente idée d'Etés de la danse à Paris a été mise en place. Le lieu est splendide et nullement gâté par des installations d'une belle rigueur de lignes malgré leur ampleur. Il est rare de voir de tels dispositifs aptes à accueillir tant de monde garder un tel esthétisme et demeurer aussi fonctionnels. On est à la fois dans l'histoire et dans la modernité. Les gradins sont d'ailleurs combles ce soir, ce qui prouve le bien-fondé de l'entreprise.

Le San Francisco Ballet est une belle compagnie, typiquement américaine par son énergie, sa joie de danser et sa bonne humeur, ainsi que par la morphologie de ses danseurs. Au moins pour ceux du corps de ballet car, phénomène curieux, sur seize étoiles, on ne compte que quatre américains ! Les autres viennent de France (4), de Cuba (2) d'Espagne (2) et d'Australie, de Chine, d'Ukraine, de Russie. Et pourtant, ils ont tous cette tonicité et cette apparente bonne humeur typique des danseurs américains.

Dans le corps de ballet, c'est là que les morphologies tranchent avec ce que l'on voit chez nous. Bien des filles sont joliment plus rondes que nos standards et la plupart des garçons paraissent plus athlétiques. Mais ce qui frappe, encore une fois, c'est leur dynamisme, leur entrain, leur sourire et ce rayonnement festif si caractéristiques des spectacles américains. Que nous sommes loin de la sinistrose intellectuelle torturée et si souvent nulle que l'on voit actuellement dans le monde contemporain de notre côté de l'Atlantique. A voir ce programme, on se rappelle avec allégresse que la danse est aussi un divertissement et pas un pensum.

Un Who cares ? de Balanchine tonique et plein de charme

Techniquement, pas de reproche à faire. On tourne, on saute, on bat avec passion. Le Concerto Grosso de Tomason, pour cinq garçons est à cet égard une belle démonstration de force et d'agilité physique. Dans des costumes d'un style et d'un goût très américains et qui passeraient mal en temps normal à Garnier par exemple, le festif Who cares de Balanchine est enlevé avec charme, esprit par un corps de ballet bien motivé entraîné par Lorena Feijoo, Sarah van Patten, Vanessa Zahorian et Damian Smith. Tina Le Blanc et notre excellent compatriote Nicolas Blanc avaient auparavant fort élégamment interprété Square Dances de Balanchine, avant les très harmonieux 7 for Eight de Tomason où l'on retrouvait avec plaisir un Joan Boada très en forme et la ravissante Yuan Yuan Tan notamment.

Sans prétendre jouer exactement dans la même cour que les très grandes compagnies style Opéra de Paris ou Mariinski de Saint-Pétersbourg, le San Francisco Ballet a montré de très sympathiques qualités d'ensemble, de forts beaux et valeureux solistes et un peps bien rafraîchissant en cette fin de saison. On attend avec impatience son Don Quichotte !