Partout dans le monde, les opéras, l'oeuvre orchestrale et la musique de chambre de Mozart constituent cette année un incontournable de toute programmation. Paradoxalement, rares sont les compagnies de danse à se faire l'écho de cette « mozartmania Â», omission injuste au regard du nombre de pièces imaginées à partir de ce matériau d'exception. Frédéric Olivieri, directeur français du Ballet, décide de lui rendre hommage avec quatre pièces toutes inédites pour ses danseurs.

Jeunehomme

La soirée débute avec la reprise de Jeunehomme du chorégraphe allemand récemment disparu Uwe Scholz. Classique ou néo-classique, l'oeuvre créée en 1986 par le Ballet de Monte-Carlo se caractérise par une grande musicalité. Chaque note du Concerto pour piano n° 9 appelle un pas et l'ensemble se lit comme une unique partition. Malheureusement, le mouvement manque de caractère et les interprètes ne peuvent s'affranchir suffisamment des difficultés techniques incluses dans le langage de Scholz.

Vanitas

Christopher Wheeldon était annoncé pour la création de la deuxième partie mais l'orchestre de la Scala en a différé l'exécution pour des raisons manifestement assez complexes. Fabrizio Monteverde a accepté de le remplacer au pied levé, imaginant une oeuvre composite à partir de l'Andante du Concerto pour piano n° 22 et d'une Cantate. Le vocabulaire classique comporte quelques figures et combinaisons de pas assez modernes. Les quatre garçons qui entourent Sabrina Brazzo, illustre danseuse, semblent investis dans cette pièce sans prétention mais qui dépasse le contexte très agité de sa commande.

Deux pièces de Jiří Kylián

En dernière partie de soirée, le public milanais salue l'entrée au répertoire de deux chefs-d'oeuvre souvent présentés ensemble du tchèque Jiří Kylián. Sechs Tänze fut néanmoins créé en 1985 quand Petite Mort vit le jour en 1991. Le climat mystérieux voire mystique de cette dernière conserve une grande originalité. L'emploi des épées et du voile demeure le seul artifice dans cette chorégraphie épurée et admirablement musicale.

Le parallèle avec Uwe Scholz s'impose et montre combien Kylián connaît la musique de Mozart sans chercher à en illustrer la magie. Les danseurs, probablement enchantés par cette nouvelle acquisition, s'en montrent à la hauteur. Les couplent diffèrent en taille et se meuvent en harmonie, aucun effort visible ne trouble cette fluidité des phrases, avant que le noir se fasse.



Après une courte pause, changement dans la continuité mozartienne : Sechs Tänze nous plonge dans la gaieté et un certain libertinage propres à une partie de la vie du compositeur. Jiří Kylián expliquait récemment que les Tchèques affectionnent particulièrement cet aspect de Mozart probablement plus heureux à Prague que dans aucun autre lieu. Les perruques en pétard, les visages poudrés et outranciers, les danseurs s'amusent visiblement sur scène et le public leur répond. Malgré plusieurs représentations, on sourit toujours autant d'une telle joie de vivre et de danser.

Viva Verdi ! s'écrient habituellement les Milanais aux abords de la Scala, mais ce soir, c'est Viva Mozart ! que semblent entonner les solistes de la compagnie décidément à la fête pour cet anniversaire.