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L'ACTUALITE DE LA DANSE |
18 avril 2024 |
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Face à face, de Joëlle Bouvier au Théâtre des Abbesses, Paris.
Bouvier seule et plurielle
Retour de Joëlle Bouvier, absente depuis quelques années du Théâtre de la Ville. Elle s'y présente seule en scène dans sa propre chorégraphie, Face à face, dans la partie de la programmation dévolue au Théâtre des Abbesses. Une riche heure de danse et de théâtre, de la part d'une grande chorégraphe et interprète qui donne envie de pénétrer son univers plus avant.
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Une heure seule en scène, Joëlle Bouvier ne parie pas sur l'exercice le plus aisé pour son passage au Théâtre des Abbesses. Longtemps associée à Régis Obadia, la chorégraphe doit trouver sa propre identité, une recherche personnelle qu'elle nous livre en partie dans sa pièce justement nommée Face à face. Dans un décor posé avant son entrée en scène et prétexte à sa danse, imaginé avec Claire Sternberg, elle entre sur le plateau en robe longue et talons. Les cheveux tirés en un chignon des années 1950, elle apparaît telle une actrice américaine de l'époque, en quête de rôles ou d'aventures.
La représentation progresse par saynètes qui s'enchaînent de manière plaisante, sur une bande-son mixée par Pardillo / Urbina. Avec ce patchwork très éclectique, la danseuse fait preuve d'une grande musicalité. La danse contemporaine en manque parfois et le mouvement qu'elle a imaginé séduit d'abord en cela.
Parmi les images les plus marquantes, l'arrivée avec un bouquet de pages de journaux transformé en torche évoque une statue de la liberté déchue, peut-être le premier symbole d'une femme séduite par l'Amérique qui débarque à New York ou en Californie sans trop d'illusions. D'ailleurs, les parallèles avec l'univers cinématographique ou la comédie musicale abondent. Le parapluie pliant, aux baleines capricieuses, forme un clin d'œil souriant au plus grands succès d'Hollywood. De même, l'atmosphère hitchcockienne affleure à maintes reprises, tels ces clichés post mortem brillamment décrits.
Aspects du désir et de la séduction
Les volutes de fumée que Bouvier forme et apprivoise avec emphase illustrent la féminité qui se dégage de l'ensemble de cette pièce. La chorégraphe se joue de son corps de danseuse très bien conservé et sans ostentation, elle analyse bien des aspects du désir et de la séduction féminins. À cet effet, la sortie en scène buste dénudé, par une porte dérobée dans le décor laisse présager un travail d'introspection plus important encore.
Malgré un dernier quart d'heure un peu trop étiré, Bouvier rythme très efficacement la pièce par l'utilisation du décor notamment de dessins à la craie qui tracent un imaginaire fertile. Ainsi, sans être tous clairement identifiables, les trous de serrure, fenêtre ou tableau donnent le diapason à des séquences souvent amusantes. Tel un tableau de Matisse à la perspective écrasée, le décor met en scène la danseuse qui comme la troupe de Pina Bausch ou de Robin Orlyn, navigue avec adresse entre théâtre et danse.
Le pari du solo, d'osé s'avère réussi et légitime la chorégraphe dans son indépendance créatrice. En résidence depuis 2004 au Théâtre des Gémeaux de Sceaux, l'envie de connaître plus en profondeur son oeuvre se fait pressante.
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Théâtre des Abbesses, Paris Le 27/03/2007 Vincent LE BARON |
| Face à face, de Joëlle Bouvier au Théâtre des Abbesses, Paris. | Face à face
chorégraphie : Joëlle Bouvier | |
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