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L'ACTUALITE DE LA DANSE 19 avril 2024

Péplum, de Nasser Martin Gousset au Théâtre de la Ville, Paris.

Insolubles hiéroglyphes
© Laurent Philippe

Grand retour et consécration sur la scène du Théâtre de la Ville pour Nasser Martin-Gousset, chorégraphe inclassable qui nous livre avec ce pharaonique Péplum une oeuvre de haut-vol, à la fois jouissive et mystérieuse, sobre et grandiose, jamais racoleuse car calibrée à merveille.
 

Théâtre de la Ville, Paris
Le 03/04/2007
François FARGUE
 



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  • On retrouve dans la dernière proposition de Nasser Martin Gousset prĂ©sentĂ©e Ă  Paris au Théâtre de la Ville tous les Ă©lĂ©ments qui constituent depuis plus de quinze ans l'oeuvre singulière de ce chorĂ©graphe Ă  part et de fait un temps Ă©cartĂ© de certains crĂ©neaux qui peinaient Ă  l'identifier. C'est la loi du genre que la France aime tant. Ă€ court de mot propre, les Anglais nous ont justement empruntĂ© ce mot, spĂ©cificitĂ© si française. Il y aurait bien justement chez Nasser un certain dandysme Ă  l'anglaise qui se fiche de l'air du temps et qui se joue des genres. Tour Ă  tour plaisant, amusant, noir ou lunaire, entre le rock, la danse et le cinĂ©ma, le travail de Nasser Ă©clate sous les lumières implacables de Jean-Luc Chanonat dans son dernier opus nommĂ© en toute simplicitĂ© et non sans une certaine grandiloquence PĂ©plum.

    PĂ©plum. Le mot vient Ă©trangement du grec, « peplon Â» signifiant – avec ou sans jeu de mot – « tunique Â», telle celle arborĂ©e Ă  mi-fesse dans celui de Nasser Martin Gousset par un centurion admirable et admirablement malmenĂ©, dĂ©vĂŞtu, violĂ© par une horde de dĂ©sÂśuvrĂ©s prĂ©-tropĂ©ziens menĂ©s – Ă  la cape Ă©carlate – par le chorĂ©graphe s'autoproclamant empereur en affichant lui-mĂŞme son portrait sur les murs. C'est toute la Rome antique rĂ©unie sur ce plateau, la chevelure L'OrĂ©al de l'Ă©phèbe, le glaive brandi du guerrier, les mignardises de la nymphette mais aussi l'Ă©normitĂ© du satrape – forcĂ©ment sublime Olivier Dubois.

    Dans un tonnerre de batterie ou au son de la voix chaude d'Elisabeth Taylor, voire des extases de Donna Summer, s'y déploient des danses de l'extrême où les corps d'abord se libèrent et finalement se rangent, s'ordonnent et se détraquent au terme de ce sursaut de rigidité militaire. Faut il voir dans cet enchaînement – le cas de le dire – un message précis de l'auteur ? Pour la petite histoire en tous cas, rappelons les origines égyptiennes de Martin Gousset, piste peut-être pour expliquer le choix du film Cléopâtre de Mankiewicz comme fil conducteur de ce spectacle.

    © Laurent Philippe

    Mais ce Cléopâtre en carton pâte et technicolor, il devait en rêver depuis longtemps. Le kitsch n‘échappe jamais à Nasser. Son péplum à lui aux esthétiques parfaites reste pourtant d'une sobriété étonnante. Du film de la Fox d'ailleurs on ne perçoit que la rumeur – les voix tout de même de Taylor-Burton – et l'on ne saisit au vol qu'une image volée d'elle drapée en noir et blanc de tout son pharaonique orgueil, ou bien celles figées du tournage.

    Sur scène, ce PĂ©plum en abyme dĂ©voile lui aussi ses coulisses. Une autre piste peut-ĂŞtre. Tout drapĂ© qu'il soit de merveilleuses lumières, vidĂ©os live et images papier glacĂ©, il cherche semble-t-il aussi Ă  se mettre Ă  nu, prĂ©vient de la scène Ă  venir, souligne le fictif. Cela donne un curieux mĂ©lange. Entre action et relâche, « jouissivitude Â» totale de la danse et intermèdes languissants, entre enveloppantes mĂ©lopĂ©es et batterie aliĂ©nante, on se heurte Ă  rentrer tout Ă  fait dans cette pièce intrigante qui jamais ne nous interpelle directement mais dont on contemple bercĂ© ou mĂ©dusĂ© la morne ou trĂ©pidante folie.

    Péplum ou l'absurdité du pouvoir, du vice et de violence face à l'amour à mort, sublime d'Antoine et Cléopâtre ? Horreur d'un monde aux amours impossibles ? Qui sait ? Ce péplum qui ne dit pas tout s'achève d'ailleurs avec une belle élégance lointaine et les corps, pour toute réponse, semblent nous dessiner dans l'espace autant d'insolubles hiéroglyphes.




    Théâtre de la Ville, Paris
    Le 03/04/2007
    François FARGUE

    Péplum, de Nasser Martin Gousset au Théâtre de la Ville, Paris.
    PĂ©plum
    conception et chorégraphie : Nasser Martin-Gousset
    décor : Philippe Meynard
    costumes : Hélène De Laporte
    Ă©clairages : Jean-Luc Chanonat
    musiques originales : Alex North's Cléopâtra
    montage, arrangement son : Steve ArgĂĽelles
    son : Djengo Hartlap
    images : Quentin Descourtis & Julien Delmotte

     


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