|
|
L'ACTUALITE DE LA DANSE |
24 avril 2024 |
|
Bamboo Blues de Pina Bausch au Théâtre de la Ville, Paris.
Polémique sur Pina
Avis très divergents et accueil réservé du public du Théâtre de la Ville, Bamboo Blues, le nouveau Pina Bausch, suscite de multiples discussions. La grande chorégraphe est-elle en mal d’inspiration ? Se lasse-t-on d’elle à Paris ? Ou bien suit-elle tout simplement une évolution bien légitime ? Questions.
|
|
L’amour virtuose
Ivresse grecque
Flambeau partagé
[ Tout sur la danse ]
|
C’est indiscutable, l’univers de Pina Bausch a changé, au moins en grande partie. L’Inde telle qu’elle veut nous la raconter est un pays plus doux que violent, plus décoratif que sombre et encore en émergence, bref, un univers assez tranquille. Peu importe à la limite la véracité de cette vision, d’ailleurs moins calme qu’elle ne peut y paraître au premier abord. Ce qui s’impose est une évolution assez incroyable du style même de la chorégraphe dont nous avons eu la chance de suivre, grâce au Théâtre de la Ville, quasiment tout le parcours. Alors, ici encore, tâchons d’être clair et aussi juste que possible.
Que veut le public et une partie de la critique ? On pourrait bien répondre : du nouveau, toujours du nouveau, mais dans une direction bien déterminée, celle dans laquelle souffle le vent de la mode, d’une mode imposée par un quarteron qui s’efforce de faire la pluie et le beau temps dans le monde la création chorégraphie et, en fait, ne sème que la plus totale confusion.
Si un chorégraphe s’en tient à un style précis, on lui reproche de se répéter. S’il évolue… nous y voilà , il doit le faire comme l’attend une avant-garde qui parle et écrit sur la danse plus qu’elle ne s’affirme sur scène ou dans les studios. Nous avons vécu en musique le terrorisme sériel, époque heureusement révolue, les compositeurs ayant reconquis la liberté d’écrire comme ils le veulent, sans allégeance aux règles strictes du dodécaphonisme.
Le jour approche sûrement où un identique terrorisme pratiqué dans le monde de la danse s’estompera, permettant sans encombres de chorégraphier avec des pas et des ensembles qui bougent vraiment, sans forcément une multiple d’ingrédients annexes, parole, gadgets, vidéos etc., fascinants quand on les emploie bien comme peu savent le faire, cache-misère d’inspiration pour la majorité des autres.
Pour en revenir au cas Pina, il paraît clair que depuis le travail sur les opéra baroques, les pièces fondatrices comme Café Muller, Bandonéon, Arien, Nelken, le Sacre du printemps et bien d’autres, puis le début des grands voyages à travers le monde, la chorégraphe suit son chemin et s’exprime d’une manière qui a toujours été évolutive. Alors, que voyons-nous aujourd’hui ?
Effectivement, un spectacle d’où la parole est réduite à quelques secondes, comme des citations, où les gags sado-maso n’existent quasiment plus non plus, où les femmes ne sont plus violentées en permanence – que l’on se rappelle cette grande interprète de Pina qui ayant pris sa retraite publia une autobiographie intitulée avec humour Je suis une femme honorable, tant elle avait subi de sévices sur scène ! – où l’on danse sans arrêt, solos ensembles, duos, somptueusement construits et interprétés.
Beaucoup de jeunes danseurs aussi. Si les filles restent en majorité longilignes dans leurs belles robes longues de Marion Cito ou leur saris, les garçons sont désormais plus petits, plus musclés, plus chevelus, et eux aussi échappent, à une brève séquence près, à leurs traditionnelles apparitions en robe et talons haut.
De quoi dérouter, effectivement, tous ceux pour qui Pina se réduit aux premières affirmations d’un néo-expressionnisme hérité, détourné de Kurt Jooss, ou qui lui pardonneraient volontiers de changer si elle apportait de l’eau à leur moulin qui tourne dans le sens du non-spectacle videur de salles et d’un intellectualisme de plus en plus élitiste. Alors, vive Bamboo Blues !
| | |
|
Théâtre de la Ville, Paris Le 18/06/2008 Gérard MANNONI |
| Bamboo Blues de Pina Bausch au Théâtre de la Ville, Paris. | Bamboo Blues, une pièce de Pina Bausch
mise en scène et chorégraphie : Pina Bausch
décor et vidéos : Peter Pabst
costumes : Marion Cito
collaboration musicale : Matthias Burket & Andreas Eisenschneider
Avec les danseurs du Tanztheater Wuppertal | |
| |
| | |
|