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L'ACTUALITE DE LA DANSE |
27 avril 2024 |
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Gala für Klavier, Stimme und Tanz de John Neumeier aux Journées de ballet à l’Opéra de Hambourg.
La voie de ses maîtres
Chaque année au solstice d’été, John Neumeier organise à Hambourg deux semaines de festivités avec ses propres créations, invitant des compagnies et des artistes qui lui sont chers. La densité du programme ne faiblit pas pour la trente-neuvième édition de cette manifestation et les quarante ans de la compagnie.
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Au milieu de ces Journées hambourgeoises de ballet, John Neumeier a programmé un gala pour piano, voix et danse. Fidèle à son humilité parfois exacerbée, Neumeier entend par là une grande soirée de danse, à laquelle se joignent Christoph Eschenbach et Christopher Park pour le piano et Matthias Goerne pour la dernière pièce. La soirée s’articule autour de trois pièces pour piano solo, chorégraphiées dans les années 1970 et une création sur des lieder de Mahler.
Kinderszenen fut créé en 1974, au tout début de l’épopée Neumeier à Hambourg. La musique de Robert Schumann est connue de chacun, Christoph Eschenbach en propose une interprétation qui surprend par sa lenteur au départ et dont l’intensité s’avère progressivement séduisante. Dix danseurs gagnent tour à tour la scène, comme si le pianiste assumait le rôle de répétiteur du cours.
La danse est précise, aussi exigeante que le piano en recital ; les interprètes font corps avec la mélodie romantique. Hélène Bouchet se distingue dans un solo, travail de bas de jambe d’autant plus estimable qu’il demeure plein d’esprit et d’une grande musicalité. Thiago Bordin, premier soliste brésilien, conserve son enthousiasme ravageur comme partenaire autant que dans ses variations. Voici une pièce que bien des compagnies dignes de la danser devraient faire entrer à leur répertoire.
Changement de pianiste, Christopher Park, élève d’Eschenbach, s’attaque à la transcription pour piano de la célèbre partition d’Igor Stravinski. Petruschka-Variationen s’assume comme une pièce de jeunesse du chorégraphe (1976) au caractère juvénile. L’âme saltimbanque de la marionnette et de la fête foraine perdure.
Les six danseurs explosent de vitalité, deux d’entre eux finissent seulement leur apprentissage à l’école, très intégrée à la compagnie au demeurant. Neumeier cultive une fascination et une collection pour les ballets russes et plus particulièrement pour Vaslav Nijinski. Dans ces variations, il se départit de tout argument mais l’esprit de la pièce originale demeure prégnant et la musique donne libre cours au mouvement, incomparablement plus que dans la chorégraphie de la création de Michel Fokine.
Fascination pour Nijinski réaffirmée dans la troisième œuvre au programme : Vaslaw. Créée en 1978, longtemps reprise à l’Opéra de Paris, magistralement interprétée à l’époque par Patrick Dupond, il s’agit d’une citation allusive à la vie, l’inspiration et la folie du danseur et chorégraphe révolutionnaire.
Alexandre Riabko se révèle tout aussi inspiré. Ce danseur ukrainien fascine plus par son charisme et sa générosité sur scène que par sa technique néanmoins irréprochable. Il appartient à cette catégorie de danseurs qui illuminent une pièce et que le public plébiscite. Eschenbach joue Bach avec émotion et non sans regarder les interprètes dont la remarquable Patricia Tichy, la seule danseuse sans pointes qui apporte une belle gravité à l’ensemble.
La soirée s’achève avec Um Mitternacht, du nom de l’un des cinq Rückert-Lieder de Gustav Mahler. Eschenbach retrouve Matthias Goerne, remarquable comme à son habitude, un luxe que s’autorise John Neumeier qui, au-delà de ses maîtres chorégraphes, admire tellement les compositeurs qu’il s’offre les plus belles interprétations.
Cette pièce fut présentée à Essen au mois de mai de cette année et convainc immédiatement tant Neumeier renouvelle la symbiose avec le compositeur. Edvin Revazov, créateur du rôle de Tadzio dans Mort à Venise, se trouve une fois encore magnifiée par le chorégraphe. Peu expressif, il n’en demeure pas moins le point focal de la pièce grâce à sa plastique et à sa technique.
Rendons justice également à Anne Laudere, sa partenaire à la ville, ainsi qu’à l’incomparable Silvia Azzoni qui, avec Hélène Bouchet, figurent parmi les danseuses les plus charismatiques de l’actuelle compagnie. Comme à chaque apparition, Neumeier reçoit l’amour fidèle de son public hansétique parfois si avare d’applaudissements. Ce jubilé en appelle d’autres.
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Staatsoper, Hamburg Le 22/06/2013 Vincent LE BARON |
| Gala für Klavier, Stimme und Tanz de John Neumeier aux Journées de ballet à l’Opéra de Hambourg. | Gala für Klavier, Stimme und Tanz
Kinderszenen
Petruschka-Variationen
Vaslaw
Um Mitternacht
chorégraphie : John Neumeier
(photo : Martin Brand) | |
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