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L'ACTUALITE DE LA DANSE |
24 avril 2024 |
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booty Looting de Wim Vandekeybus par la compagnie Ultima Vez au Théâtre de la Ville, Paris.
Numéro d’acteur
Même si Wim Vandekeybus réussit comme toujours à faire le spectacle et à aborder les mythes de façon originale et personnelle, booty Looting pousse à ses limites extrêmes un genre où la danse est quasiment expulsée au bénéfice du texte, du numéro d’acteur et d’une accumulation de gadgets visuels à l’efficacité inégale.
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Déjà l’an dernier, dans Œdipus/bêt noir, Wim Vandekeybus, l’un des esprits les plus inventifs et les plus originaux de l’école flamande, avait laissé le texte trop envahir l’espace sur la danse. Mais celle-ci, magnifique, était encore assez présente pour que l’œuvre ne bascule pas totalement vers une sorte de théâtre dansé à mi-chemin entre plusieurs modes d’expression scénique.
Avec booty Looting, créé en 2012 à Venise, la balance penche du mauvais côté, si l’on peut dire. C’est la parole qui domine, omniprésente, défendue par Jerry Killick dont l’impact scénique indiscutable et l’engagement absolu galvanisent l’attention, occupent l’espace sonore et visuel.
Ce qu’il fait est fort, impressionnant même de conviction et parfois de distanciation au bon moment, mais si l’on y ajoute l’impact violent du travail du photographe Danny Willems qui bâtit peu à peu un autre univers à la fois complémentaire et parallèle, le mouvement dansé devient secondaire, presque absent, voire inutile.
Réduite à quelques brèves séquences acrobatiques, magistralement exécutées c’est vrai, la danse semble superflue, anecdotique, à côté du jeu théâtral et photographique à qui sont confiés les chocs et les émotions les plus significatifs, les plus forts, les plus intéressants.
On dira que c’est volontaire, bien sûr, que le propos est plus complexe. C’est vrai, mais ce serait nettement plus défendable si le texte lui-même était d’une autre qualité. Il n’a finalement qu’un intérêt limité, cherche un style qu’il ne trouve guère et si l’on admire le professionnalisme brillant et l’investissement profond de Jerry Killick, on se lasse vite de ce flot verbal qui finit par gêner la lecture des images multiples proposées.
Autour du mythe de Médée, Vandekeybus tisse une toile complexe sur une trame lisible malgré toutes les transpositions et les diversions. C’est souvent confus, mais il se crée finalement un univers visuel qui se suffirait à lui-même. En quelque sorte, il y a deux spectacles qui tentent de fusionner sans vraiment y parvenir. Une sorte de soliloque remarquablement incarné mais pas toujours passionnant pour autant et une accumulation d’effets visuels toujours intéressants mais souvent trop cumulés.
Trop d’idées peut nuire, et si l’on garde le souvenir d’évocations et de commentaires forts sur la violence et la cruauté profondes de l’histoire de Médée et de Jason, on regrette que la place de la danse soit si réduite et que Vandekeybus n’ait pas davantage fait confiance aux si habiles danseurs de sa compagnie au bénéfice d’une parole qui n’a rien de très mémorable.
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Théâtre de la Ville, Paris Le 14/04/2014 Gérard MANNONI |
| booty Looting de Wim Vandekeybus par la compagnie Ultima Vez au Théâtre de la Ville, Paris. | Booty Looting
mise en scène, chorégraphie, scénographie : Wim Vandekeybus
assistant artistique et dramaturgie : Greet Van Poeck
création lumières : Davy Deschepper, Francis Gahide, Wim Vandekeybus
création son : Antoine Delagoutte
musique originale live : Elko Blijweert
Live still photographie : Danny Willms
Créé et interprété par Jerry Killick, Birgit Walter, Luke Jessop, Dimitry Szypura, Elena Fokina, Luke Murphy | |
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