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DOSSIERS 29 mars 2024

Cecilia Triumphans
© Decca-Universal

© Decca-Universal

Elle n'a que trente ans et la voici déjà canonisée Diva par la presse comme le public unanimes. Cecilia Bartoli ne l'a pourtant pas volé, car son triomphe ne doit rien à une quelconque compromission de son art, et il est rare d'entendre une telle réussite aller de paire avec des choix de carrière si risqués. Une ode s'imposait.
 

Le 23/11/2001

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  • Entretien avec Cecilia Bartoli

    Depuis peu, votre carrière s'est développée à une vitesse vertigineuse ; comment vivez-vous ce succès ?


    Très franchement, je n'aurais jamais imaginé un tel développement, ni une telle accélération. C'est une situation d'autant plus inattendue pour moi que je vais dans une direction très particulière, toujours vers les sources de la musique. Il est beaucoup plus facile d'obtenir une grande popularité avec les ouvrages du XIXè siècle. Avec le XVIIIè, la difficulté est plus grande, malgré le goût toujours vivace du public pour le baroque.

     

    C'est dans cette direction que vous aller poursuivre votre parcours ?

    Vers la fin du baroque et le classicisme, pour l'instant, mais je compte bien redescendre, si je puis dire, jusqu'à Monteverdi. Mais mes projets exigent du temps, des heures et des heures d'études, de recherches de partitions. Je les pense toujours à long terme, quelquefois sur un ou deux ans. J'agis avec passion, amour et patience.

     

    Vous sentez-vous une responsabilité envers le public ?

    Oui, mais envers les compositeurs aussi. Cela dit, j'ai les mêmes pensées envers Mozart et Rossini, que j'ai beaucoup chanté à mes débuts et que je connais bien, qu'envers Vivaldi ou Gluck.

     

    Votre " Vivaldi album ", qui s'est vendu en France à plus de 100 000 exemplaires, a fait de vous une véritable star et vous êtes l'une des rares cantatrices classiques à attirer ce que l'on appelle couramment " le grand public ". Pourquoi ?

    Franchement, je n'en sais rien. Je me demande, d'ailleurs, comment on peut dire qu'une cantatrice est une star. Je vous assure que je ne me réveille pas le matin dans la peau d'une actrice d'Hollywood ! Je ne suis qu'une interprète, un véhicule entre le compositeur et ceux qui m'écoutent.

    Il y a des Rolls et des Fiat 500, c'est vrai. Mais Vivaldi est un musicien extrêmement populaire, et je pense que son nom a déjà suffi à attirer les gens, et pas seulement les mélomanes. Peut-être aussi ai-je réussi à faire passer certaines choses, à aller au-delà des notes qui étaient écrites, mais pour moi, cela reste un mystère.

     

    Que vous apporte votre statut de vedette, pour ne pas dire de " superstar " ?

    La possibilité de choisir. Beaucoup de compositeurs ont besoin qu'on s'occupe d'eux. C'était un peu le cas de Vivaldi, dont les ouvrages lyriques sont encore trop peu connus. Et maintenant Gluck, auquel mon nouveau disque est consacré.

     

    Il est encore peu courant, en Italie, qu'un cantatrice renommée choisisse le répertoire baroque et classique...

    L'Italie demeure le pays du melodramma, de l'opéra tel qu'on l'entendait au XIXè siècle et qui n'a rien perdu de sa popularité. Tout ce qui se passe avant est difficile à imposer. J'ai chanté au Comunale de Bologne, à La Scala de Milan. Mais il y a vraiment, là-bas, un problème de répertoire et de programmation.

    Je pense que nous sommes en retard sur les autres pays européens, sur l'Allemagne, l'Autriche et même la France. Mais à Paris, pour mes concerts de décembre, je serai accompagnée par une jeune formation italienne, Le Nuove Musiche ; nous travaillons régulièrement ensemble et nous sommes parvenus à une vraie complicité.

     

    C'est une question de tradition ?

    Pas seulement. C'est aussi une question d'éducation. Il y a bien longtemps que dans l'enseignement la musique n'est plus obligatoire. Il n'est donc pas étonnant que le renouvellement du public soit difficile. Verdi et Puccini sont toujours prioritaire sur les affiches des théâtres, et l'Italie a été très longue à exploiter son patrimoine musical, ce qu'elle ne fait que timidement.

     

    C'est pour cela que vous avez effectué certaines prises de rôle ailleurs, à Zurich, par exemple ?

    Oui. Zurich est pour moi un opéra exemplaire, avec lequel le terme de collaboration prend tout son sens. Je peux, là-bas, prendre des risques, expérimenter, faire des choses que je ne ferais pas ailleurs, dans des salles trop grandes. J'ai pu ainsi aborder la Nina de Paisiello, par exemple, dans sa version avec les récitatifs chantés.

     

    Comment en êtes-vous venue à la musique ancienne ?

    Je dois en grande partie sa découverte à Nikolaus Harnoncourt, qui m'a convaincue que j'avais un matériau vocal et un esprit qui me permettaient d'aller vers ce répertoire. J'en suis tombée amoureuse, et je l'aime de plus en plus.

    Le monde lyrique du XVIIIè siècle est exubérant, plein de couleurs ; au contraire du romantisme, il n'a pas peur de montrer les sentiments humains dans leur nudité et leur violence. Mais cette extraversion se manifeste toujours au travers d'une structure solide, à l'intérieur de laquelle on peut pourtant faire preuve de flexibilité et de fantaisie.

     

    Cette imagination, comment la déployez-vous dans les da capo qui terminent les arias ?

    Ce sont des moments fascinants, dans lesquels on arrive à faire des choses inouïes, qu'on ne peut pressentir dans l'air. C'est un mystère. Mais derrière le da capo, il y a une psychologie, un état d'esprit, pas seulement une prouesse technique. Il ne suffit pas de changer les notes pour le réussir. Avec Gluck, c'est différent ; sa musique appartient au classicisme et ses da capo n'en sont pas vraiment, contrairement à ceux que l'on trouve chez Haendel et Vivaldi.

     

    Pourquoi vous êtes-vous attachée à Gluck ?

    Parce que je me suis passionnée pour Pietro Metastasio, dont les livrets ont été mis en musique par de nombreux compositeurs, dont Vivaldi. Je voulais continuer à chanter ses textes, à approfondir les rapports intimes entre les poèmes et la musique. Les deux, chez Gluck, sont au même niveau, alors que très souvent l'un domine l'autre.

    Je me suis intéressée au Gluck le moins joué, celui de la période italienne, qui est très riche et beaucoup moins connu que la période française. La Clemenza di Tito, par exemple, est un ouvrage magnifique, et Gluck reprendra une partie de l'air de Sesto Se mai senti spirarti sul volto pour en faire O malheureuse Iphigénie dans Iphigénie en Tauride.

     

    Vous ne vous bornez pas à chanter ; vous faites aussi de nombreuses recherches dans les bibliothèques pour trouver des airs inédits, des raretés...

    C'est indispensable. Je ne veux pas qu'un disque ou un concert soient une simple suite d'airs enfilés les uns après les autres, je veux un véritable projet.

     

    Quand prenez-vous le temps de travailler votre voix ?

    En principe, je travaille ma technique tous les jours. Mais il faut aussi laisser la voix se reposer, ce qu'il m'arrive de faire deux ou trois semaines par an, pendant lesquelles je ne chante pas du tout. Cela dit, si ce repos est bon pour la voix, il ne l'est pas pour les muscles. Un chanteur, c'est comme un athlète, il faut toujours veiller à sa condition physique.

     

    Mais vous vous intéressez quand même au monde extérieur ?

    J'aime sortir, j'aime regarder la télévision, aller sur les marchés, chez les antiquaires. Mais j'essaie de protéger au maximum ma vie privée. Lorsqu'on atteint une certaine popularité, on est très exposé, les gens pensent qu'ils ont le droit de tout savoir ; ma popularité, je ne la dois à rien d'autre qu'à la musique.

     

    Partagez-vous toujours votre activité entre l'opéra et le concert ?

    J'essaie de donner aux deux une importance égale. Je donne environ entre 50 et 55 représentations par an, moitié concerts, moitié opéras. Et je n'accepte pas plus de deux productions, surtout si je dois aborder un nouveau rôle. Dans les mois qui viennent, je vais reprendre Nina à Zurich, et mettre dans la peau de Fiorilla pour Le Turc en Italie de Rossini.

     

    Aimez-vous les répétitions ?

    Ce sont des moments formidables, à tel point que lorsqu'arrive le soir de la première, j'ai l'impression que quelque chose vient de se terminer.

     

    Avez-vous encore le trac ?

    Toujours, mais c'est nécessaire. C'est important d'avoir le trac, c'est une chose positive, c'est se sentir vivant, c'est avoir la possibilité de faire des choses qu'on ne ferait pas autrement.

     

    Michel PAROUTY
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