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DOSSIERS 28 mars 2024

Noël 2003 en CD cadeaux
© Pierre Bretagnolle

La rédaction d'Altamusica tenait à souhaiter à ses internautes un Joyeux Noël, et a pensé pour l'occasion demander à ses collaborateurs une liste de CD cadeaux chers à leur coeur. Chacun a fait en fonction de ses goûts, de ses domaines de prédilection, et comme il paraît que la critique française est particulièrement impitoyable, nos collaborateurs vous ont même proposé quelques CD à offrir... à votre pire ennemi. Joyeux Noël !
 

Le 24/12/2003
Propos recueillis par Yannick MILLON
 
  • Les cadeaux de Noël de Yannick MILLON
  • Les cadeaux de Noël de Gérard MANNONI
  • Les cadeaux de Noël de Françoise MALETTRA
  • Les cadeaux de Noël d'Eugénie ALECIAN



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  • L'art de la symphonie

  • Un monument de granit

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    [ Tous les dossiers ]
     
      (ex: Harnoncourt, Opéra)


  • Jolie rousse fantaisiste



    Les Fantaisies de Patricia Petibon
    Bernstein, Barber, Norman Dello Joio, Haendel, Caldara, Offenbach, Rameau, Chants traditionnels.
    Le Concert d'Astrée, direction : Emmanuelle Haïm
    Europa Galante, direction : Fabio Biondi
    Orchestre de chambre de Grenoble, direction : Marc Minkowski
    Les Folies Françoises, direction : Patrick Cohën-Akenine
    Susan Manoff et Matthew Schwinghammer, piano
    American Boychor
    Catherine King, mezzo-soprano
    Paul Agnew, ténor
    1CD Virgin Classics 558412

    Tu adores les femmes, surtout les jolies rousses qui ont l'art de se mettre en beauté en y ajoutant un grain de folie, et je crois savoir qu'elles te le rendent bien. Mais attention, celle que je t'offre ne peut t'être accessible qu'en rêve ou en CD. Et toi qui aimes tant raconter ta vie à ces sirènes, tu devras, pour une fois, te résigner à écouter. La dame est si belle que je te conseille de te concentrer sur son image et de ne pas la quitter des yeux. Tu la trouveras exquise, émouvante, imaginative, mais très vite tu t'apercevras qu'elle cache bien son jeu. Fée ou sorcière, Patricia Petibon ? A toi de choisir. Bien sûr, tu auras peut-être un peu de mal à t'y retrouver et à la suivre, car elle n'en fait qu'à sa tête, et, « Fantaisies » oblige, elle a tout mélangé dans son programme. Tu vas l'entendre jubiler, implorer, exulter, délirer, jouer de sa voix comme d'un instrument d'une docilité à toute épreuve. Pour te mettre en bouche, je te suggère quatre courtes pochades de Bernstein en forme de petits plats savamment mijotés, à déguster d'un seul trait. Tu peux laisser les trois Noëls québécois pour une autre année, sauf si tu prends déjà Petibon pour un ange. Mais s'il te plait, retiens ton souffle pour écouter l'amoureuse éperdue de la Cantate de Haendel Caro autor di mi doglia, ou la brûlante Madeleine de la Passion de Caldara qui en appelle au ciel et au pardon. Tu te reprendras, car Petibon te remettra immédiatement le coeur en place avec l'air de la folie de Platée, je te connais, tu la trouveras « vertigineuse », avant de te mettre en feu avec les couplets très coquins du Cupidon d'Orphée aux enfers. Et puisqu'elle juge si important d'aller « vers la folie des autres », abandonne-toi, laisse-toi faire
    qui sait ?



     
    Pour une âme romantique



    Frédéric Chopin
    L'oeuvre pour violoncelle et piano
    Sonate en sol mineur, Op.65
    Etude 0p.25, n°7 en mi mineur
    Etude 0p.10, n°6 en ré mineur
    Nocturne Op.9, n°2 en si bémol majeur
    Nocturne en ut dièse mineur (transcription B.Engerer/H.Demarquette)
    Introduction et Polonaise brillante en ut majeur
    Frédéric Chopin et Auguste Franchomme
    Grand Duo concertant en ut majeur sur des thèmes de « Robert le Diable » de Meyerbeer
    Henri Demarquette, violoncelle et Brigitte Engerer, piano
    1CD Intrada 568642

    Romantique, irrémédiablement romantique tu es. Au coeur des turbulences de ce temps qui nous abreuve d'images terribles et de musiques affolantes, toi, tu rêves de passions ardentes, de grands sentiments, de serments éternels et de délicates souffrances, en t'enivrant du parfum des roses, et en relisant jusqu'à l'ivresse le récit des amours de George Sand et de Chopin. Chopin, plus que Liszt, Brahms ou Schumann, embrase ton imagination de ses Valses, de ses Ballades, et de ses Nocturnes, tandis que le grand rubato du Concerto en fa mineur te plonge dans un état quasi somnambulique. Pourtant, tu me dis n'avoir jamais trouvé une interprétation qui te comble de ses pièces pour piano et violoncelle. La raison est qu'elles sont toujours restées dans l'ombre portée de l'impérialisme de son oeuvre pour piano seul. Mais je suis sûre de moi en t'offrant l'enregistrement de Brigitte Engerer et Henri Demarquette. Deux virtuoses, certes, et surtout une musicienne et un musicien fous de musique de chambre. A l'ultrasensibilité du piano de Brigitte Engerer répond l'intensité du chant du violoncelle d'Henri Demarquette. Aucune préciosité, aucune langueur, aussi divine soit-elle, dans leur jeu, mais Chopin comme il faut l'approcher pour l'aimer et le comprendre. Tu t'émerveilleras d'entendre à quel point ils respirent ensemble, et dans un dialogue si intime et si ardent que, dans la Sonate en sol mineur, il touche à la confidence la plus tendre, pour se laisser soudain emporter par la fièvre qui le surprend. Tu ne résisteras pas au Grand Duo concertant, ni à la Polonaise brillante en ut majeur : tu fermeras les yeux, tu seras dans un très aristocratique salon du Faubourg Saint-Germain, en compagnie de Liszt, de Hugo, de Delacroix, de Musset peut-être, de Mendelssohn sûrement. Et tu les rouvriras, quelques instants plus tard, dans les soies et les dentelles de ta chambre, en méditant sur cette jolie phrase de Liszt : Chopin épancha son âme dans ses compositions, comme d'autres l'épanchent dans la prière.



     
    Pour les rêveurs solitaires



    Franz Schubert
    Sonate pour piano en ré majeur D 850
    9 Lieder :
    Der liebliche Stern
    Tiefes Leid
    Auf der Bruck
    Der Wanderer
    Fülle der Liebe
    Wiedersehn
    Vom Mitleiden Maria
    Im Walde
    Der Schmetterling
    Leif Ove Andsnes, piano et Ian Bostridge, ténor
    1CD EMI CLASSICS 7243 5 57460 2 3

    Tu as décidé d'être seul, loin du monde, loin de tout, et surtout loin du bruit et de la fureur de la ville, pour fuir l'agitation des fêtes de Noël qui ne manque pas, chaque année, de te mettre de méchante humeur. Tu veux, je te cite, te « ressourcer dans la grandeur de paysages encore inviolés ». Tu as donc choisi les neiges finlandaises et les nuits si longues qu'elles font basculer la vie en noir et blanc. Mais, vois-tu, je doute que tu te contentes de la contemplation des glaciers, aussi sublimes soient-ils, des nobles troupeaux de rennes, ou des traîneaux filant à travers les forêts millénaires. Alors, dans le silence sidéral de ton chalet-igloo, je vais t'apporter un supplément d'âme : Schubert. Lui aussi, au mois de mai 1825, avait voulu quitter Vienne, sa ville, pour une longue randonnée dans les montagnes du Salzkammergut, au milieu de lacs et de cascades ignorés du voyageur distrait. De ce printemps fertile allaient naître la Sonate en ré majeur, la plus grandiose, et quelques Lieder. Les trois premiers que tu écouteras sont de ceux-là. Ils disent la recherche d'une étoile dans une ciel déserté, du repos « loin du monde inconstant », de l'oubli dans la profondeur d'une forêt accueillante. Mais c'est la Sonate qui te fera sentir et ressentir plus fort ce que tu veux vivre là-bas : tu y respireras l'atmosphère de liberté des grands espaces que nul horizon ne limite, la luxuriance d'une nature que rien ne saurait dompter. Et si la tristesse l'envahit, ne la chasse pas, elle n'est que passagère, à peine un murmure
    Fais confiance à Leif Ove Andsnes et Ian Bostridge, ils sont les meilleurs médiateurs que je puisse t'offrir pour un tel voyage initiatique.



     





    Deux cadeaux pour mon pire ennemi


    Quoi de pire qu'un ténor ?




    Duetto
    Marcelo Alvarez et Salvatore Licitra, ténors
    Sartori, Shearman, Marrale, Wood, Pacco, Saggese, Gabriel Fauré, Bizet, Cilea, Puccini.
    1 CD Sony SK 90418

    Puisque tu t'entêtes, avec une incroyable arrogance, à prétendre jouer dans la cour des grands, je pense qu'il est temps de te convaincre de renoncer à une pratique détestable qui depuis trop longtemps nous oblige à vivre des moments difficilement supportables. Pas une fête, pas un anniversaire, pas même un deuil (!), où tu ne te lèves, gonflé d'orgueil, au milieu du banquet de rigueur, pour annoncer que tu vas chanter. Personne n'a encore osé te rappeler que le ridicule peut tuer, sans pitié et sans appel. Mais, moi, je le fais aujourd'hui, car il faut en finir avec ce cauchemar. Ta voix de ténor (léger heureusement !), tu répètes à qui veut l'entendre, l'avoir découverte par hasard (je te signale que c'est là le sort commun). Tu te vantes de l'avoir conservée « dans toute sa pureté ». Pauvre fou, tu t'égares ! Une voix doit se chercher, s'éduquer, s'affiner, s'épuiser à polir le grain de son timbre, ce que tu as toujours superbement voulu ignorer. Le résultat est là : désolant. Alors, je te donne une dernière chance, en t'offrant non pas un ténor, mais deux : l'argentin Marcelo Alvarez, et le sicilien Salvatore Licitra, les héritiers désignés des Domingo, des Kraus, des Pavarotti, des Carreras
    , de ceux dont, naturellement, tu considères la réputation « totalement surfaite ». Tes idoles, à toi, tournent exclusivement en 78 tours, ce qui t'évite des comparaisons assassines, le disque qui gratte présentant des vertus hasardeuses propres à te donner bonne conscience. Je veux que tu écoutes, en boucle si possible, Alvarez et Licitra. Tu comprendras ce qu'une voix doit receler de puissance, de générosité et d'intelligence, pour exprimer la douleur, la passion, la colère, des sentiments dont visiblement le sens t'échappe. Tu entendras des artistes qui ont appris à s'écouter, à articuler à la perfection, à jouer de la spécificité de leur timbre, à s'accorder sur les phrasés sans jamais altérer la ligne de chant. Tu sauras alors ce que chanter suppose. Et si l'électrochoc échoue, il ne me restera plus qu'à te subir encore et encore, en espérant qu'à court terme, ta voix se brise enfin, et définitivement. Tu vas me maudire ? Tu auras tort. Ce cadeau, crois-moi, est ton seul salut !



    A un pseudo-opposant politique



    Ludwig van Beethoven
    Fidelio
    Angela Denoke (Leonore)
    Jon Villars (Florestan)
    Alan Held (Don Pizarro)
    László Polgar (Rocco)
    Juliane Banse (Marzelline)
    Rainer Trost (Jaquino)
    Thomas Quasthoff (Don Fernando)
    Arnold Schoenberg Chor
    Berliner Philharmoniker
    direction : Sir Simon Rattle
    2CD EMI CLASSICS 7243 5 57559 2 6

    Tu te dis un farouche opposant politique à toute forme d'oppression – je dirais plutôt à tout et à n'importe quoi – mais nul ne t'a jamais vu défiler en tête d'une manifestation populaire, avec banderole et porte-voix. Tu réserves tes discours pour les dîners en ville, où les bouffons de ton genre sont une vraie providence pour les maîtresses de maison, soulagées de ne pas à voir relancer la soirée quand la conversation s'épuise. Tu me pardonneras (là, je suis sans illusion !), mais pour une fois, je vais de mettre en face d'un héros, un certain Florestan – non, tu ne connais pas ! – qui, lui, s'est vraiment dressé contre ce que tu nommes – sans jamais t'en être approchée – « la tyrannie des puissants », un combattant, un vrai, pour la liberté des peuples. De son histoire, Beethoven a fait un chef d'oeuvre universel, un opéra, Fidelio. Comment le saurais-tu, toi qui as toujours refusé de m'accompagner à Bastille ou à Garnier, « ces repaires de privilégiés » comme les appellent tous ceux qui, comme toi, ont un siècle de retard sur leur temps ? Tu y verras aussi la plus noble des femmes, Leonore (c'est elle qui se cache sous le nom de Fidelio), mettre sa vie en jeu pour sortir l'homme qu'elle aime des grilles de l'infâme Don Pizarro, qui le retient avec ses compagnons d'infortune dans le cul-de-basse-fosse d'une sinistre forteresse. J'ai mis toutes les chances de mon côté – et du tien, si tu permets – en choisissant une des interprétations parmi les plus bouleversantes : des voix vibrantes et habitées, un choeur d'un réalisme surprenant, un orchestre somptueux, un chef visiblement inspiré, qui a aussi un sens aigu de la théâtralité très particulière de Fidelio, et une prise de son si bien pensée qu'elle « donne à voir » la tragédie qui se joue devant nous. Et si tu n'es pas sensible à cet hymne au courage, à la détermination et à la fraternité, alors, j'aurais perdu tout espoir de te voir te hisser, un jour, à la hauteur d'un combattant digne de ce nom. Mais lh50 de ta vie y suffira-t-elle ?


    Françoise Malettra






     

    Françoise MALETTRA
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