Votre enfant ne jure que par les rythmes binaires ? Vous avez bien songé à titiller ses tympans avec du Stravinski ou du Bartók mais vous êtes sur le point de renoncer ? Pas de panique : Elektra Nonesuch a l'excellente idée pour les 70 ans du compositeur d'éditer une grande rétrospective de l'oeuvre de Steve Reich. Englobant des oeuvres de 1966 à 2004, ces « phases Â» permettent de suivre l'évolution de celui qui a été remixé par les Dj's les plus prestigieux – argument imparable pour votre rejeton. De la Music for eighteen musicians, extraordinaire musique d'ambiance au bouleversant chef-d'oeuvre que sont les Differents Trains joués par le Kronos Quartet, c'est l'oeuvre de toute une vie qui se trouve contenue dans ces cinq CD à un prix défiant l'imagination. L'occasion d'apprécier l'étendue d'un talent qui, du lumineux minimalisme des débuts, sut confronter son écriture aux remugles de notre époque.

Quel est le lien entre un film hollywoodien narrant la fondation de l'Amérique et les cadeaux de Noël Altamusica ? Certes, l'Adagio du 23^e concerto pour piano de Mozart accompagne l'éblouissement fragile du premier amour de l'héroïne, mais plus encore, à l'instar de la Ligne rouge du même réalisateur, le Nouveau Monde est l'un des films les plus musicaux qui aient jamais été réalisés. Terrence Malick raconte en effet moins une histoire que des mouvements : des élans, des ruptures, la recherche d'un éphémère unisson. Les plans s'enchaînent comme s'allieraient les timbres d'un orchestre. Cet univers mouvant évoque un univers pré-Ring – magistrale utilisation du prélude de l'Or du Rhin de Wagner – mais également le monde harmonieux de Claude Debussy, instants inouïs conscients de leur disparition.

Altamusica a déjà par deux fois évoqué cet opéra crée à Berlin en janvier dernier. Le DVD se fait l'écho des représentations lyonnaises qui eurent lieu en mars. Il permettra de voir et de revoir la fameuse horloge géante présente dans la mise en scène de Peter Mussbach mais surtout de s'approprier le livret aussi touffu que brillant de Dusapin himself. Dans les bonus, le compositeur s'emploie avec la maestria qu'on lui connaît à éclairer son oeuvre, et bien filmé par Yvon Gerault, ce DVD est l'occasion de s'enivrer d'une musique aussi sombre que magnifique. Les performances intenses des chanteurs, Georg Nigl et Urban Malmberg en tête, s'en trouvent magnifiées.

Programmation généreuse pour ce nouveau CD consacré à l'orchestre de John Adams. Si The Dharma at Big Sur et My father knew Charles Ives – tous deux composées en 2003 – ne sont pas les pièces les plus abouties de leur auteur, elles permettent néanmoins de dresser un portrait aussi vaste que complet du compositeur contemporain le plus joué dans le monde. On y retrouve en effet les grands crescendi d'Eldorado, le pastoralisme mélancolique de The wound dresser, le motorisme de Naive and Sentimental Music
mais également une synthèse très personnelle d'un siècle de musique américaine. Car cette musique déborde le simple cadre « répétitif Â» auquel on l'a longtemps cantonnée ; mélange d'influences de Ravel, de Mahler et de Sibelius, la musique de John Adams rend aussi hommage, avec d'inévitables superpositions de fanfares, au grand pionnier que fut Charles Ives.

On se souvient d'Iris dévoilée, portrait en neuf adjectifs d'une « femme chinoise Â», qui déroulait ses tendres circonvolutions dans le premier CD que Virgin consacrait au compositeur franco-chinois. Sortie en février dernier, cette deuxième galette dresse un panorama couvrant un peu moins de vingt ans de création. On retiendra surtout San Xiao (Rire trois fois), merveilleux exemple de musique contemporaine pour instruments traditionnels chinois et Yuan pour orchestre qui signifie origines. La musique de Qigang Chen est souvent à la recherche d'un passé enfoui. Des bribes de mélodies en ravivent le souvenir, l'attisent puis éclatent dans la lumière d'une enfance retrouvée. Cette musique instinctive est également d'un incomparable raffinement harmonique.