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| DOSSIERS |
27 avril 2024 |
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Des offrandes musicales
Les marchés du disque et du livre classiques sont, paraît-il, perpétuellement enrhumés. En guise de modeste contribution pour sauver un capitalisme qui lui est cher, altamusica propose de le soutenir en demandant à ses lecteurs d'offrir des CD et des livres à leurs amis. Et puisqu'il faut aider les ventes à gonfler, pourquoi ne pas offrir aussi des disques à ses ennemis ?
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L'art de la symphonieUn monument de granitLes cadeaux de Noël 2013 d'Altamusica[ Tous les dossiers ]
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Il est à noter que certains de nos collaborateurs ont choisi les mêmes disques, altamusica a respecté leurs préférences
4 disques à offrir à des amis
Joseph Haydn
"Trois sonates anglaises"
sonate en ut majeur Hob XVI 50, sonate en ré majeur HOB XVI 51, sonate en mi bémol majeur HOB XVI 52. Variations en fa mineur.
Jean-Claude Pennetier, piano
1 CD Lyrinx 177
Les Sonates de Haydn font partie du jardin intime de Jean-Claude Pennetier. Il les joue volontiers au concert, et en avait jadis enregistré quelques-unes. Il donne à ces pièces exemplaires tout le raffinement sonore qui sied aux ciselures de leurs contours. C'est une musique de détail, partagée entre l'univers baroque finissant dont elle souligne les reflets, et l'univers romantique naissant dont elle pointe l'inquiétude. Ces trois sonates anglaises sont moulées dans la forme sonate classique, elles n'en partagent pourtant pas l'univers austère. Écrites lors du deuxième séjour du compositeur en Angleterre en 1795, elles s'articulent chacune sur un thème unique que Haydn explore avec génie. Tout l'art de Pennetier est de construire un discours rêveur dans un univers formel aux accès beaucoup plus secrets qu'il n'y paraît. Du grand art.
Igor Stravinsky
Le sacre du printemps
Version pour piano à quatre mains de Fazil Say
Fazil Say, piano
1 CD Teldec 8573 81041-2
Deux mains ne suffisent pas à transmettre les fulgurantes inventions du Sacre du Printemps, il en faut toujours quatre. Fazil Say fait donc le pari d'écrire sa transcription personnelle, et de la jouer en utilisant les ressources du re-recording qui permettent de grossir, d'attirer l'attention et surtout de donner à entendre la totalité de ce que Stravinsky a écrit. Le résultat est un objet sonore purement virtuel, passionnant à écouter. On y découvre une oeuvre qu'on croit connaître sous un jour aussi troublant que de voir la terre photographiée de Mars.
Et on oublie vite l'artifice car il est impossible de ne pas se laisser emporter par l'absolue maîtrise du rythme, des plans sonores, des couleurs et des idées musicales du jeune démon turc. Fazil Say ruse avec les sons et avec notre culture. Comme nous, il a beaucoup écouté l'original. Son intuition et son savoir faire parviennent à créer des illusions sonores à tomber à la renverse. Son jeu extraverti convient parfaitement. Ses délires sonores (et digitaux) sont maîtrisés et convaincants à tel point qu'on se prend à oublier l'orchestre. Ce Sacre du Printemps est l'hommage le plus outrancier et le plus excitant qui ait été donné depuis longtemps à cette partition.
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Olivier Messiaen
Quatuor pour la fin du temps et La mort du Nombre
Ensemble Alice Ader
Jaël Azzaretti (soprano), James Oxley (ténor)
Alice Ader (piano), Christophe Poiget (violon), Philippe Berrod (clarinette), Isabelle Verrier (violoncelle)
1 CD Assai 222112
Le Quatuor pour la fin du temps est une méditation inspirée par l'Apocalypse et un message d'espoir qu'Olivier Messiaen lança du Stalag où il était détenu en 1940. Au centre de celle-ci, le Temps, dans une perspective métaphysique et musicale. Œuvre essentielle du XXe siècle, elle concentre en un ensemble instrumental original, constitué des musiciens qui étaient avec lui prisonniers, l'essentiel de la pensée d'un compositeur qui se considère comme rythmicien, coloriste, ornithologue et théologien. Ce disque est une parfaite introduction à son oeuvre.
Il rapproche une pièce de jeunesse peu jouée, La mort du Nombre, et ce quatuor. Le texte d'introduction signé d'Hélène Pierrakos est parfait de concision, la qualité de l'enregistrement impeccable. La pianiste Alice Ader a rassemblé ici des musiciens dont on sent les affinités collectives. Aucun ne privilégie l'effet personnel, aucun ne cherche à briller. Dans une aveuglante simplicité d'interprétation, ils communient ensemble avec toute l'humilité qu'il convient à cette musique rédemptrice, et nous en communiquent l'empreinte tour à tour fiévreuse et apaisée.
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Giovanni Battista Pergolesi
Stabat mater
Musique napolitaine pour la fête de la vierge des sept douleurs
Patrizia Bovi, Pino de Vittorio, Bernard Arrieta
Les Pages et les Chantres de la Chapelle, direction Olivier Schnebelli
Le Poème harmonique, direction Vincent Dumestre
Alpha 009
Il fallait oser ! Cet enregistrement rapproche des musiques traditionnelles de la région napolitaine et le célebrissime Stabat mater de Pergolèse dont d'innombrables exécutions en concert, souvent très loin de sa réalité première, on fait oublier qu'il parachève une tradition ancestrale. Depuis le XVIe, la musique de nombreux auteurs plus ou moins connus décrivant la Passion de la Vierge, accompagnait certains rituels, processions et autres, pratiqués par des congrégations des arts et métiers de l'Italie du Sud. Ainsi, Olivier Schnebelli, Vincent Dumestre et leurs ensembles ont-ils eu l'idée de se rapprocher de Patrizia Bovi, spécialiste du répertoire religieux et populaire italien, dans le but d'une évocation de la "Fête de la Vierge des Sept Douleurs".
Cette cérémonie avait lieu le vendredi précédant les Rameaux et sa tradition était liée à l'Eglise de San Giorgio Maggiore. Entre le XVI et le XVIIIe, prières, musique et processions résonnèrent sous les voûtes et dans les rues. C'est à cet univers contrasté que nous convient ces artistes inventifs. À ce projet excitant et dérangeant, il ne manque que le bruitage pour faire plus vrai que nature. Les morceaux de musique populaire - un régal de spontanéité - rapprochés des savants mélismes du Stabat mater nous font un effet cinématographique : appelons cela un travelling spatio-temporel ! Le Stabat mater de Pergolèse sort revigoré de cette source de jouvence, les oreilles aussi.
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1 disque à offrir à un ennemi
Montserrat Caballé
Roses from 2000
Arias extraites de Verdi, Mascagni, Offenbach, Lehà r, Leoncavallo, Massenet
Orchestre philarmonique de la radio de Hannovre (NDR)
Direction : Miquel Ortega
BMG 74321 75066
Cette mosaïque rassemble tout ce que le mauvais goût a soufflé à l'oreille d'un éditeur soucieux de son bilan de fin d'année pour satisfaire l'aficionado inconditionnel. Peu importe que la diva plafonne en se prenant pour le choeur des hébreux tout entier dans Nabucco, qu'elle soit à bout de souffle dans le vilain tango figurant en plage 3, qu'elle s'époumone en famille avec mademoiselle sa fille, Montserrat Marti, dans Chorizos y polacos. Ce n'est pas grave si elle chevrote dans un traditionnel suisse, c'est pour la couleur locale.
Tant pis si la mollesse de l'élocution ne permet pas de comprendre un seul mot français dans la Périchole puisque la langue allemande n'est pas plus épargnée dans les deux opérettes de Lehà r. Stop ! N'écoutons pas plus loin. Lisons maintenant : "Je voudrais, pour mon public, être plus qu'une cantatrice
on doit sentir que l'amour contenu dans ce nouveau disque compact est l'amour que je porte à mon public." Voilà ce que confie la cantatrice à son éditeur au milieu de quelques tartes à la crème sur Massenet et le Pape. Le pire, c'est que la grande Caballé est sincère : pour elle, ce disque n'est pas un coup de marketing. Elle est parmi les dernières diva, peut-être la dernière, qui ont toujours cru que leur public faisait corps avec elles. Callas le croyait, Tebaldi aussi. Tant d'amour autorise-t-il tant de surdité ? |
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1 livre à offrir à un ami
Robert Schumann
par Brigitte François-Sappey
Bibliothèque des grands musiciens
Éditions Fayard (280 F)
Le projet de Brigitte François-Sappey est donné dès l'ouverture de cet important ouvrage de plus de mille pages : "non pas tout admirer, mais tout réévaluer et tenter de tout comprendre selon les propres aspirations de l'artiste et les critères de son temps." On aura compris qu'il s'agit d'une enquête passionnante. Laissons de côté la troisième partie, s'adressant plutôt aux spécialistes, qui analyse la totalité de l'oeuvre musicale, les deux premières constituent un tableau saisissant et roboratif du monde quotidien, spirituel, intellectuel et musical du compositeur. Les relations du compositeur avec les cercles de poésie, son engagement dans la vie musicale : chaque acte de sa vie est passé en revue. On en découvre beaucoup.
Sa carte du Tendre est exemplaire de l'Allemagne romantique : Brigitte François-Sappey analyse avec finesse les relations de Clara et de Schumann à l'éclairage des conventions de l'époque. Sur les causes de sa folie, de sa maladie et de sa mort, - ces sujets de tant de gloses - l'auteur reste circonspecte : l'exploration des comptes-rendus médicaux de l'époque démontrent un mélange de pathologies psychiques et somatiques dont le vocabulaire n'a pas été, à ce jour, suffisamment étudié pour qu'il y ait certitude.
Elle propose une conclusion provisoire qui a le mérite de la poésie et témoigne de son humilité de chercheur : "en marge de tout diagnostic médical, si je devais résumer ma perception de Schumann (
), je choisirais deux mots complémentaires qui jalonnent son oeuvre, douleur et passion."
Il est à noter que certains de nos collaborateurs ont choisi les mêmes disques, altamusica a respecté leurs inclinations. Par ailleurs, puisqu'on n'offre pas nécessairement des livres ou disques de parution récente, certains ont carrément préféré des valeurs sûres.
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