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ENTRETIENS 25 avril 2024

La Fondation montre la voix

Le 3 avril prochain, la Fondation France Télécom réunira pour sa grande fête annuelle, le gratin des ensembles qu'elle soutient. L'occasion de faire le point sur un mécénat sans lequel la vie musicale française ne serait pas ce qu'elle est. Rencontre avec sa directrice Anne Pawloff.
 

Le 27/03/2002
Propos recueillis par Yutha TEP
 



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  • Pourriez-vous nous dĂ©crire rapidement l'organisation de la Fondation ?

    Nous sommes une équipe de 10 personnes réparties sur trois domaines de mécénat : la musique vocale, l'aide aux personnes autistes et enfin depuis le début de l'année dernière, celui que nous appelons le « Net Solidaire ». La musique prend naturellement sa place dans nos perspectives, elle est un langage universel, créant des liens entre des artistes et un public. Nous oeuvrons pour la reconnaissance pour les musiciens, pour l'élargissement de ce public, et pour la diffusion d'oeuvres peu connues. En ce qui concerne l'autisme, cela se comprend tout aussi bien : l'autisme est l'un des problèmes les plus graves concernant la communication, et nous concerne, je dirais, de manière naturelle, puisque la communication fait partie des valeurs profondes de notre entreprise. La recette de la Nuit de la Voix sera d'ailleurs intégralement reversée à l'aide aux personnes autistes.

     
    Pour la musique, on répète très régulièrement que sans l'action de la Fondation France Télécom, premier mécène musical du pays, le paysage musical français ne serait pas ce qu'il est. Pourriez-vous détailler la nature de cette intervention ?

    Dans la musique, c'est 1,98 millions d'euros par an, pour un budget global de 3,7 millions d'euros en 2002. En dehors de la Fondation, le mécénat de France Télécom a la chance d'être relayé par l'ensemble de la structure de l'entreprise – c'est-à-dire nos directions régionales – sur toute la France dans les trois domaines de mécénat. Dans le domaine spécifique de la musique, les directions régionales, avec les deniers de leur propre budget de communication, financent les opérations qui ont un rayonnement strictement local, du type un concert ou un petit festival local. Aux 1,98 millions d'euros de la Fondation, on peut donc rajouter à peu près 1 million d'euros versés directement par nos directions régionales.

     
    Comment s'organise la coordination entre tous ces intervenants ?

    Il y a déjà les personnes qui s'occupent de chaque domaine de mécénat au sein de notre équipe. Nous ne sommes ni musicien ni pédopsychiatre ni encore spécialiste de l'usage d'Internet. Cependant, nous nous entourons depuis le début d'une commission de sélection comportant des personnes extérieures spécialistes du domaine concerné. Pour la musique, il y a un directeur d'opéra de région, un directeur de scène nationale, des critiques musicaux, un musicologue, un ancien directeur de la musique et de la danse qui est maintenant conseiller-maître à la Cour des Comptes, et qui a une vision économique de la culture, ce qui est important.

     
    Et en régions ?

    Une personne dans notre équipe est chargée de la coordination des projets régionaux. Nos correspondants en région jouent le rôle de détecteur et de relais dans les trois domaines de mécénat. Quand ils repèrent une action intéressante, ils nous en parlent, nous en parlons entre nous, et selon la nature de ce projet, s'il a besoin d'une évaluation au niveau de son opportunité artistique, ce projet passe en comité. De même, quand nous recevons directement à la Fondation des projets qui concernent une région, nous avertissons immédiatement les directions de région et nous leur demandons leur avis. Pour la musique toujours, nous avons un système de co-financement comme je vous l'ai dit. Quand un projet a un rayonnement strictement local, il est du ressort financier de la direction régionale concernée.

     
    Pourtant, vous semblez parfois intervenir directement sur les grands événements musicaux.

    Si le projet a un rayonnement national, voire international, comme par exemple le Festival de Beaune, celui d'Aix-en-Provence, ou encore celui d'Ambronay pour la musique classique, Jazz à Vienne ou Jazz à Marciac pour le jazz, nous co-finançons le mécénat avec la direction régionale à une hauteur de 50%. Il est évident qu'une direction régionale n'a pas toujours assez de budget pour prendre entièrement en charge le mécénat de Beaune ou d'Aix-en-Provence. Il en est de même pour ce que j'appelle une action de fond, c'est-à-dire les soutiens aux ensembles vocaux, qui se font sur plusieurs années, et qui sont un accompagnement pour le développement d'activité d'un jeune ensemble qui démarre. Là, nous estimons que c'est une action qui est du ressort de la Fondation. Cet ensemble va, à partir du moment où la Fondation va s'engager, avoir des concerts dans toutes les régions ; du coup, les directions de région bénéficient des concerts de cet ensemble quand il passe dans leur région, elles en profitent pour inviter des clients ou des partenaires pour un concert qui a le soutien de la Fondation. Idem pour les projets de formation, comme le Concours Voix Nouvelles dont la finale s'est tenue le lundi 25 février. Toutes les directions de région ont participé dans les villes qui ont servi de point de relais, aux demi-finales et aux finales régionales, mais c'est la Fondation qui finance entièrement la co-organisation de cette manifestation avec le Centre National de Formation Lyrique.

     
    Vous avez aussi un gros travail de promotion interne dans l'Entreprise France Télécom.

    Bien sûr. Il y a une très grosse information faite auprès des 150 000 employés de France Télécom, sur les événements soutenus par la Fondation et les directions régionales, sachant que la Fondation s'occupe directement des concerts à Paris, puisque nous sommes installés à Paris. Depuis sa création en 1987, notre mécénat a autant une vocation externe d'image qu'un objectif de communication interne bien défini. Cela veut dire que quand nous soutenons un festival ou un ensemble vocal, nous négocions systématiquement des conditions d'accès à tarifs privilégiés pour les salariés de l'entreprise ou pour ses actionnaires. C'est pareil pour les enregistrements que nous soutenons. Et cela passe de plus en plus par le biais du site Intranet de France Télécom, où nous faisons des offres spéciales : cela concerne quand même 40 disques par an ! Et nous faisons en sorte que toutes les entités de France Télécom achètent ces disques, pour faire des cadeaux à leurs clients ou à leurs salariés par exemple. Il y a donc une véritable irrigation du personnel de France Télécom. Nous soutenons une collection de jazz très appréciée en interne : ces disques se vendent à plusieurs milliers d'exemplaires !

     
    Quels ensembles soutenez-vous actuellement ?

    Nous avons deux types de soutien. Certains bénéficient d'une aide annuelle au fonctionnement, qui couvre toutes leurs activités, de leurs recherches musicales jusqu'à l'enregistrement de leurs disques, des montages de programme. Cela n'est qu'une contribution à leur budget total, mais c'est vraiment une aide de fond. Six ensembles répondent à ce critère à l'heure actuelle : Le Poème Harmonique de Vincent Dumestre, Doulce Mémoire, Les Eléments de Joël Suhubiette, Le Concert d'Astrée d'Emmanuelle Haïm, Diabolus in Musica dirigé par Antoine Gerber dans la musique médiévale, Dialogos dirigé par Katarina Livljanic plutôt sur un répertoire de musique traditionnelle méditerranéen et des Balkans.

     
    Il y a bien sûr des soutiens plus légers.

    Au bout de cinq ou six ans, nous sommes bien obligés de changer notre mécénat à leur égard, car l'ensemble a normalement acquis une certaine notoriété. Et il faut bien que nous puissions accueillir de nouveaux ensembles ! Nous soutenons ainsi 11 ensembles au projet. Cela veut dire que ces ensembles nous sollicitent pour une aide spécifique sur le développement d'un programme qu'ils veulent faire tourner, ou sur un enregistrement : Cinq de Coeur par exemple, The Voice Messengers ensemble de jazz, Evasion (ensemble de six jeunes chanteuses qui font de la musique du monde). Ils ne fonctionnent pas comme des ensembles classiques, ils préparent des programmes et les donnent sur une longue durée, avec beaucoup de dates. Au sein de ces ensembles au projet, nous trouvons aussi des formations que nous avons soutenues au fonctionnement pendant cinq ou six ans dès leur démarrage, qui sont Accentus de Laurence Equilbey et Les Talens Lyriques de Christophe Rousset. Ces ensembles ont souvent trouvé une implantation régionale, comme Christophe Rousset, en résidence à Montpellier.

    Vous savez, l'année ou les années qui suivent l'arrêt d'un soutien au fonctionnement sont parfois délicates à gérer pour les ensembles, et vous pensez bien qu'ayant vécu la vie de ces ensembles au jour le jour pendant cinq ou six ans, nous ne pouvons pas les abandonner du jour au lendemain. Nous aidons donc certains de leurs projets particulièrement lourds. Je précise un point important, qui est la diffusion du projet sélectionné. Quand nous recevons par exemple, un magnifique projet d'opéra mais qui ne fait l'objet que d'une représentation, aussi beau artistiquement soit-il, nous ne l'acceptons rarement, quelle soit notre frustration. Parallèlement encore, nous avons des ensembles comme Mala Punica de Pedro Memelsdorf, La Simphonie du Marais, Calliope de Régine Théodorisko, que nous aidons au projet parce que cela correspond à leur besoin, et que c'est notre volonté.

     
    Et vous avez aussi des « bébés ».

    Oui, il y a cette dernière catégorie, un peu notre pépinière, avec des ensembles que nous ne connaissons pas encore et qui ne nous connaissent pas tout à fait, et donc que nous ne pouvons pas encore faire bénéficier d'un soutien sur cinq ou six ans. Dans ce cas, nous aidons sur un programme précis et l'enregistrement qui va avec. Il y a dans cette catégorie l'ensemble Gachet de Mantoue qu'a fondé Raoul Lechenadec et qui développe avec cinq voix d'hommes un magnifique programme de musique Renaissance et de création contemporaine. Nous avons un beau partenariat avec l'Ensemble XVIII-21 et Jean-Christophe Frisch, qui ne sont évidemment pas des inconnus, autour d'un programme de Leçons de Ténèbres.

     
    Pour votre fameuse Nuit de la Voix, plusieurs ensembles seront présents.

    Bien sûr ! La Nuit de la Voix est une grande fête vocale, mais elle est aussi destinée à présenter les ensembles que nous soutenons, aussi bien au public, qu'à la presse ou aux organisateurs de concert. Il y aura par exemple le Jeune Choeur de Paris, qui est une véritable école de chant pour des jeunes qui sortent des maîtrises, de 15 à 30 ans. Ces jeunes artistes sont dans une période pré-professionnelle. Le Jeune Choeur de Paris a fait ses preuves en tant que formation, Laurence Equilbey va donc plus loin en créant une véritable structure de formation qui est quelque chose de très originale, et qui manque pour des chanteurs qui sont à ce point-là de leur carrière. Nous avons aidé le Jeune Choeur de Paris de façon légère pendant quelques années, ce n'était pas une structure qui demandait beaucoup de moyens, mais il fallait quand même des locaux et une direction artistique. Laurence Equilbey est assistée de Geoffroy Jourdain pour la direction du choeur. C'est Laurence qui a conçu cette année ce projet de véritable structure de formation, et là nous nous engageons réellement pour soutenir cette structure. Seront également présents Le Concert d'Astrée, Le Poème Harmonique, le Choeur d'Enfants de Créteil, Les Eléments.

     
    Et une guest-star, GĂ©rard Lesne ?

    Nous avons apporté notre soutien, d'une manière ou d'une autre, à plus de cinquante ensembles depuis notre création. Dans cette liste, on retrouve bien sûr des « noms » comme La Chapelle Royale de Philippe Herreweghe, A Sei Voci ou précisément le Seminario Musicale de Gérard Lesne, qui nous fait l'amitié de venir à la Nuit de la Voix, ce qui nous touche beaucoup, parce que c'est un homme très occupé. Je ne vous cache pas que nous sommes très fiers d'avoir accompagné pendant quelques années un musicien de son talent. Ce qui fait la valeur de notre travail, c'est justement de voir que tel artiste est maintenant connu et engagé dans les plus grandes salles et festivals de France et à l'étranger. C'est une relation de partenariat, presque solidaire.




    Douzième Nuit de la Voix
    Le 3 avril, 20 h 30, Salle Gaveau, Paris.
    Recettes intégralement reversées à l'aide aux personnes autistes.
    Avec Le Concert d'Astrée & la soprano Laura Claycomb (Emmanuelle Haïm, direction), Le Poème Harmonique (Vincent Dumestre, direction), le Choeur d'Enfants de Créteil (Scott Alan Prouty, direction), Le Jeune Choeur de Paris (Laurence Equilbey & Geoffroy Jourdain, direction), Les Eléments (Joël Suhubiette, direction), Il Seminario Musicale (Gérard Lesne, direction). Soirée animée par Achille Tonic.
    Tarif unique : 15 Euros.
    Renseignements au 01 48 24 16 97.

    Pour plus de renseignements sur le Net Solidaire et l'aide aux personnes autistes, visitez le site de la Fondation France Télécom

     

    Le 27/03/2002
    Yutha TEP


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