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ENTRETIENS 09 mai 2024

Anniversaire de cuivre

Voilà trente ans maintenant que les Sacqueboutiers de Toulouse oeuvrent pour leurs instruments, participant à toutes les grandes aventures de l'interprétation à l'ancienne. Avant leur concert du 3 avril à l'église Saint-Roch de Paris, Jean-Pierre Canihac, l'un des fondateurs, a accepté de répondre à quelques questions.
 

Le 02/04/2003
Propos recueillis par Yutha TEP
 



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  • Pouvez-vous faire un état des lieux pour le trentième anniversaire des Sacqueboutiers ?

    J'avoue que nous sommes très rassurés par la réputation dont l'ensemble bénéficie, et qui nous a permis depuis notre naissance en 1974, de prendre part aux grands rassemblements concernant notre répertoire. Le dernier en date est L'Orfeo de Monteverdi avec Emmanuelle Haïm et Le Concert d'Astrée, pas seulement au disque puisque nous partons en tournée avec eux. Je suis sûr que ce sera un grand événement ! Au fil des années, nous sommes devenus une sorte de section de cuivres des grandes formations, une sorte de big band pour Philippe Herreweghe, William Christie ou Jordi Savall. Même Nikolaus Harnoncourt nous a sollicités.

     
    L'équipe est restée la même ?

    Presque. Bien sûr, certains de nos compagnons ont pris de l'âge et des responsabilités qui les empêchent de poursuivre la route avec nous. Disons que Daniel Lassalle et moi restons les deux piliers des Sacqueboutiers. Nous sommes tous les deux professeurs à Toulouse, Lyon et Barcelone, alors il est facile de travailler ensemble. Nous incorporons évidemment de nouveaux membres pour que la relève se fasse sans heurt, et je suis heureux de vous dire qu'il y a un bon nombre de jeunes musiciens de très haut niveau, dont beaucoup ont été mes élèves ! Globalement, l'ensemble se porte bien, nous faisons une cinquantaine de concerts par an un peu partout en Europe.

     
    La situation a donc bien changé par rapport à vos propres débuts.

    Enormément. J'ai découvert le cornet un peu par hasard, et avec mes camarades, nous avons dû tout mettre en place, aller fouiller les bibliothèques pour trouver de la musique. Les jeunes ont maintenant des repères, et une formation instrumentale excellente. C'est une très bonne chose, mais en même temps, c'est plus dur pour eux, car il est maintenant difficile de se faire une place, tant la concurrence est rude.

     
    Beaucoup de musiciens de qualité, mais au final peu de formations de votre type


    Non, c'est vrai. Je le répète, il y a de très bons musiciens, mais ils mènent des carrières un peu isolées, engagés ponctuellement par divers ensembles, ce qui empêche la naissance d'un vrai groupe de cuivres anciens.

     
    Et en bibliothèque, les recherches sont loin d'atteindre leur terme.

    Il reste énormément de choses à découvrir, même si la période florissante pour nos intruments est relativement courte, environ une centaine d'années ! Il n'y a pas assez de chercheurs, alors qu'une bibliothèque comme celle de Bologne regorge de manuscrits et d'imprimés inexplorés. Par ailleurs, peu de gens s'intéressent vraiment à l'organologie. Nous travaillons actuellement à Regensburg, sur des manuscrits de la cour de Kromeriz, où le comte entretenait une ensemble constitué d'un violon, d'un trombone, un basson et un cornet. Des musiciens comme Biber ou Schmelzer y ont laissé leurs empreintes.

     
    Votre travail concerne cependant des périodes bien plus tardives.

    Bach a laissé 18 cantates qui font appel à un cornet. Et il y a bien sûr cette polémique autour de Gluck et d'Orfeo : Gluck a écrit sur sa partition « 2 cornets à bouquin et sacqueboutes », en référence claire à Monteverdi, et j'ai participé plusieurs fois à des productions de cet opéra. En termes de répertoire, nous attachons beaucoup d'importance à la musique italienne, nous tournons souvent avec un cornet, une sacqueboute, un orgue et une soprano, spécialement pour jouer cette musique.

     
    Quels sont vos projets pour la musique française ?

    Il s'agit ici de l'une de nos grandes frustrations. On sait qu'il y avait six cornets et des sacqueboutes à la Chapelle Royale de Versailles, mais on n'a aucune mention claire de leur participation aux événements musicaux. Pourtant, ils devaient forcément être employés d'une manière ou d'une autre ! Est-ce qu'ils jouaient colla parte avec les voix ? On ne sait pas

     
    Avec Pierre Cao, il s'agira de musique allemande et italienne, avec un nombre important de musiciens.

    Oui, nous serons une vingtaine d'instrumentistes. Pierre est aussi professeur à Barcelone, et c'est dans ce contexte que nous avons commencé à parler d'une collaboration entre nos deux formations. Comme Pierre est un grand spécialiste de la musique allemande et que je suis un amateur de musique italienne, nous avons fait un programme commun : de Venise à Dresde

     
    Votre dernier enregistrement chez Ambroisie s'intitule « La Sacqueboute ». Pourquoi pas « Le cornet » ?

    Tout simplement parce que le disque a été conçu autour de Michel Becquet. Il est l'un de nos plus grands trombonistes français, qui a travaillé avec Daniel Lassalle pour se familiariser avec la sacqueboute. Quelques mois lui ont suffit pour maîtriser l'instrument ! Quand on est un tromboniste de son niveau, la technique ne pose en réalité pas beaucoup de problème, c'est le style qui joue ensuite. Nous l'avons invité à jouer ce programme, qui est une sorte de patchwork de la littérature pour sacqueboute. L'idée est intéressante, car on peut élargir l'audience de nos instruments en intéressant les instrumentistes modernes à leur pratique. Michel Becquet parcourt le monde entier, et il peut faire des miracles pour la promotion de la sacqueboute. Daniel Lassalle lui-même pratique aussi l'instrument moderne, et il rayonne beaucoup dans les formations modernes. Ainsi, certains des super-solistes de l'Opéra de Paris jouent aussi de la sacqueboute ! On constate le même phénomène pour les chefs, qui s'intéressent de plus en plus aux cuivres anciens. Il faut dire que les cuivres modernes sonnent souvent trop fort dans les orchestres, et certains chefs demandent des instruments anciens. Par exemple, Michel Becquet revient de Leipzig, où ils ont joué des symphonies de Mozart : le chef a voulu des cuivres naturels.

     
    Ce qui n'est pas encore évident, y compris en France.

    Certes non. Nous avons pris part, il y a quelque temps, à un cycle à la Cité de la Musique consacré aux cuivres, mais la France n'est pas prodigue en événements de ce type, certains pays d'Europe sont beaucoup plus actifs. L'an passé, nous avons participé à des rencontres autour du cornet à bouquin, et cette année, nous faisons la même chose à Leipzig. Nous voulons organiser le même type de manifestation à Toulouse. Beaucoup de travail en perspective.

     


    En concert, le 3 avril, église Saint-Roch, Paris
    Avec Arsys-Bourgogne
    Pierre Cao, direction.
    Œuvres à double choeur de Heinrich Schütz et Giovanni Gabrieli

    Vient de paraître :
    La Sacqueboute
    Ambroisie AMB9929

     

    Le 02/04/2003
    Yutha TEP


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