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ENTRETIENS 23 avril 2024

Le passé retrouvé (8) :
Jessye Norman

© Marie Noelle Robert

Entretien avec Jessye Norman sans date précise, mais apparemment au début de sa grande carrière, avant un concert au palais des Congrès à Paris et alors qu'elle avait déjà enregistré pour Philips des opéras de jeunesse de Verdi. La grande Jessye nous parle alors de ses débuts et de ses projets.
(Entretien réalisé en 1978 pour le Quotidien de Paris).

 

Le 30/08/2004
Propos recueillis par GĂ©rard MANNONI
 



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  • Comment votre carrière a-t-elle commencĂ© ?

    Ma carrière a vraiment commencé en septembre 1968, lorsque j'ai remporté le concours de Munich. On m'a alors proposé une tournée dans toute l'Allemagne et ensuite dans d'autres pays européens. C'est l'année suivante, en 1969, que j'ai décidé de m'installer en Europe et que j'ai fait mes débuts sur scène en décembre au Deutche Oper de Berlin.

     

    Une carrière européenne est-elle indispensable pour une cantatrice américaine ?

    Bien sûr ! Je ne voulais en aucun cas rester une cantatrice américaine. Je voulais être internationale et chanter partout. C'est ce qui s'est passé. En outre, j'ai toujours eu l'impression d'appartenir à l'Europe et j'y suis très heureuse.

     

    Quand avez-vous eu le désir de devenir cantatrice ?

    J'ai toujours adoré chanter, dès l'âge de deux ans, je crois. Mais ce n'est qu'après le lycée que j'ai décidé d'entrer à l'université pour travailler le chant. J'ai eu une bourse. Dans ma famille, ce n'était pas une voie très normale. On était plutôt médecin ou professeur. J'avais toujours été intéressée par l'opéra mais un peu comme tout le monde. Faire cela comme études et éventuellement comme métier a été vraiment une décision personnelle. J'ai pris mes études très au sérieux, sans savoir vraiment jusqu'où cela me mènerait. Quand est venu le moment de voyager et de passer des concours, je l'ai fait, toujours aussi sérieusement. J'avais travaillé ma voix et une partie du répertoire pendant un peu plus de quatre ans. Le terrain était donc déblayé. Passer des concours était une manière de me mesurer aux autres, de voir quel niveau j'avais réellement atteint, et s'il fallait que je continue.

     

    Aviez-vous déjà une idée du répertoire que vous souhaitiez bâtir ?

    Au début d'une carrière, on suit surtout les conseils des chefs d'orchestres. On vous dit que vous avez une belle voix et que vous pourriez chanter, par exemple, la Messe en si de Bach. Alors vous l'apprenez et vous la chantez. Un peu plus tard, quand on commence à mieux maîtriser ses moyens, à en avoir une conscience plus claire, on va vers les ouvrages qui vous semblent les plus appropriés et les plus attrayants. Pour moi, ce furent les Lieder de Wolf ou de Strauss, les premiers opéras de Verdi, ceux de Mozart. On les apprend et on voit où on peut les chanter. C'est comme ça que ça se passe maintenant pour moi.

     

    Vous êtes devenue célèbre très vite. Quel rôle ont joué dans votre rapide ascension les chefs d'orchestres, les directeurs de théâtre, les professeurs ?

    Je travaille toujours avec le professeur que j'ai eue en arrivant à l'université en 1963. J'ai travaillé aussi avec d'autres gens, mais je suis revenue à elle et elle joue un très grand rôle dans le développement de ma carrière. Les chefs d'orchestre m'ont aussi beaucoup aidée. En Allemagne, au début, ce furent les chefs d'orchestre des radios. Il y en a beaucoup. Ensuite, bien sûr, Colin Davis, qui m'a beaucoup aidée car c'est quelqu'un de merveilleux, un musicien incroyable. J'ai aussi beaucoup travaillé avec Zubin Mehta et James Levine. Avec Giulini et Barenboïm, ce furent aussi des expériences extrêmement enrichissantes et instructives pour moi. J'ai également eu des gens très talentueux comme partenaires dans mes récitals, comme Dalton Baldwin, Irwin Gage, Martin Issep. J'ai énormément appris avec eux tous, sans pouvoir dire lequel a été le plus important.

     

    Que pensez-vous de l'importance grandissante des metteurs en scène dans le monde de l'Opéra ?

    Il me semble qu'ils ont souvent trop de pouvoir ou tout au moins qu'ils ne collaborent pas assez avec les chefs d'orchestre. Il faudrait un travail commun beaucoup plus poussé. Faire chanter Erda du fond des coulisses, à plat ventre, c'est peut-être excellent du point de vue théâtral, mais trop difficile vocalement. Ils devraient se renseigner d'abord sur la technique du chant et sur ce qu'est la musique.

     

    Vous chantez Berlioz, l'opéra italien et allemand, la mélodie. Que préférez-vous dans tout cela ?

    Je ne sais pas. J'ai eu beaucoup de chance de chanter des oeuvres aussi différentes. C'est vrai que je suis très attirée par les premiers opéras de Verdi. Je n'ai pas envie de chanter Le Trouvère ou la Force du destin pour l'instant, mais j'aime beaucoup des opéras comme Il Corsaro ou Un giorno di regno, Ernani, Nabucco, ou Macbeth, même s'ils ne sont pas pour ma voix. J'aime aussi beaucoup la musique de Mahler et tout ce qui s'en approche. C'est peut-être dû à l'enseignement reçu à l'université. Quand ma voix se sera encore développée, j'aimerais beaucoup chanter davantage de Wagner. D'abord Sieglinde, et puis peut-être dans quelques années Isolde et Senta. Mais je ne sais pas si j'y arriverais !

     

    Et dans le répertoire français, qu'aimeriez-vous aborder en dehors de Berlioz ?

    Je n'y ai pas encore vraiment songé, mais sans doute un opéra comme l'Africaine me tenterait, ou certains opéras de Massenet.

     

    Préférez-vous chanter en récital ou avec orchestre ?

    C'est très différent. En récital, toute la responsabilité repose sur moi. Avec orchestre aussi, même si on a l'appui du chef. Mais à l'opéra, il entre en jeu tant d'autres facteurs que le chant. Il y a le costume qui va ou ne va pas, les dernières modifications du metteur en scène, plein de choses qui vous stressent et influent sur la voix. Il suffit d'un rien pour que la voix s'altère. Mais quand un opéra est bien fait, comme il doit l'être, il n'y a rien de comparable au monde. En revanche quand c'est raté, c'est absolument monstrueux !

     

    Qu'aimez-vous faire dans le peu de temps libre que vous laisse le chant ?

    Beaucoup de choses ! J'adore lire, faire la cuisine, acheter des tissus, aller au théâtre, aller écouter les autres chanter.

     

    Avez-vous déjà répété dans la grande salle du palais des Congrès ?

    Non, pas encore. Ce soir seulement. Il paraît qu'elle est très grande, trop grande même pour la musique et la voix. Mais je verrai bien.




    Fin de la série d'été 2004 Le Passé retrouvé.

    A l'année prochaine...

     

    Le 30/08/2004
    GĂ©rard MANNONI


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