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ENTRETIENS 25 avril 2024

Angelika Kirchschlager, la muse incarnée

Angelika Kirschlager

Il n'a guère fallu de temps à Angelika Kirchschlager pour s'imposer à l'opéra et au concert. Nicklausse et la Muse des Contes d'Hofffmann à Bastille et cet été à Orange, la jeune et jolie mezzo autrichienne est une femme de tête dont la douceur va de pair avec la détermination.
 

Le 13/04/2000
Propos recueillis par Michel PAROUTY
 



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  • Vous assistiez au récital de Cecilia Bartoli, et, depuis que vous êtes à Paris, on vous voit régulièrement au concert. Vous aimez écouter les autres ?

    J'aime énormément aller au concert, plus aux concerts de musique symphonique et de musique de chambre, d'ailleurs, qu'à l'opéra, mais je n'ai pas souvent le temps, sauf ici, entre les représentations des Contes d'Hoffmann. Cecilia et moi, nous avons le même agent et nous nous connaissons bien ; elle est venue m'entendre dans les Contes. Je suis absolument ahurie de ce qu'elle peut réussir techniquement, j'ai les mains moites en l'écoutant, je me dis qu'elle fait ce que moi je ne pourrai jamais faire.

     
    Mais elle semble se diriger vers un répertoire de plus en plus spécialisé, aimeriez-vous une telle démarche ?

    Pas vraiment. Je suis naturellement curieuse, j'aime ce qui est nouveau. J'ai fait des tas de choses, vous savez, j'ai même joué un petit rôle dans un film sur Hugo Wolf. D'un autre côté, on peut dire que je me spécialise dans Mozart et Richard Strauss, tout simplement parce que c'est ma culture, j'ai grandi avec eux et je m'en sens très proche, leur musique fait partie de moi, et elle tombe très naturellement dans ma voix, ce qui n'est pas le cas, par exemple, du répertoire français, pour de simples questions de langue maternelle. C'est encore plus flagrant dans les mélodies que dans l'opéra puisqu'au lieu d'avoir un personnage qui vous soutient, vous êtes seule sur scène avec les mots des poèmes.

     
    Pour votre premier récital au disque, vous aviez choisi Mahler et Korngold, êtes-vous particulièrement attirée par ces compositeurs ?

    Je les aime énormément, mais je chante aussi beaucoup Schubert. Ce qui m'intéresse, lorsque j'enregistre un disque, c'est d'avoir un fil conducteur, dans ce cas, c'était Alma Mahler. Pour le disque suivant, nous avons voulu des berceuses. Par les temps qui courent, c'est une aventure de faire un disque et de trouver un projet qui va être accepté. Si je propose un récital Hugo Wolf, par exemple, on me répondra que ce n'est pas assez commercial, alors que c'est une idée qui me tient vraiment à coeur, je possède à fond les textes, les mélodies sur des poèmes de Gottfried Keller sont peu connues, mais, effectivement, c'est difficile de vendre un tel disque à des Non-Germaniques. J'ai pensé aussi à Kurt Weill, mais est-ce que ça a un sens de graver une fois de plus Les sept pêchés capitaux ?

     
    Vous chantez Nicklausse dans Les Contes d'Hoffmann, est-ce, pour vous, une prise de rôle ?

    Non. J'avais déjà chanté ce rôle à Vienne, mais sans les arias, et en remplacement, pour trois représentations seulement. C'est donc la première fois que je le fais presque intégralement, et en répétant. Sans ses airs, Nicklausse est un personnage qui n'a pas le moindre intérêt, alors qu'en fait il est essentiel. C'est amusant de jouer en même temps la Muse, qui commence et conclut l'opéra. Je ne sais pas encore quelle sera la version adoptée à Orange cet été, nous verrons bien.

     
    Avez-vous d'autres rôles français à votre répertoire ?

    Relativement peu. J'ai chanté la Périchole, mais en allemand. Et je garde un très beau souvenir du Chérubin de Massenet, que j'ai interprété au Kammeroper de Vienne et à Londres, c'est un ouvrage peu connu mais vraiment ravissant. J'aimerais qu'on me propose Marguerite dans La Damnation de Faust et Mélisande. On m'a déjà demandé Charlotte de Werther mais je n'accepterai pour l'instant que dans une salle de petite taille. J'ai procédé de la même façon quand j'ai abordé le Compositeur dans Ariane à Naxos que je viens de chanter encore voici quelques jours au Barbican de Londres, sous la direction exceptionnelle de Simon Rattle ; j'y ai débuté à Lausanne, dans un théâtre de dimension moyenne.

     
    Et le répertoire italien ?

    Il représente très peu dans ma carrière, hormis les ouvrages italiens de Mozart. Je ne chanterai plus jamais Rosina du Barbier de Séville par exemple, d'autant que je n'ai jamais eu la chance de participer à une bonne production. Je disais toujours "ouf !" à la fin des représentations. Ce personnage, qui n'évolue pas du début à la fin de l'opéra, ne m'intéresse pas. Quant à la musique, elle me paraît très artificielle, sans émotion réelle. Mais c'est vraiment, de ma part, une question de tempérament, d'affinités et d'éducation.

     
    Comment êtes-vous devenue chanteuse ?

    Par accident. Etant enfant, j'avais chanté dans les choeurs de Carmen, mais j'avais de nombreux centres d'intérêt en dehors de l'opéra. À dix-neuf ans, il m'a fallu prendre une décision, mais j'aurais aussi bien pu travailler à la radio, devenir musicologue, enseignante, m'occuper des handicapés.

     
    On sent que votre vie de famille a pour vous une importance capitale, n'est-ce pas ?

    Mon fils et mon mari sont essentiels dans ma vie. Si je chante beaucoup à Vienne, c'est pour être près d'eux.

     
    Pensez-vous à de nouveaux rôles ?

    Ces dernières années ont été très riches en prises de rôles, entre Dorabella dans Cosi, Sesto et Annio dans La Clémence de Titus, Idamante dans Idomeneo, Périchole, Nicklausse. Je vais chanter Lauretta dans Gianni Schicchi, ce sera probablement le seul rôle puccinien de ma carrière. À l'Opéra de Vienne, en octobre, j'incarnerai Peter Pan dans un spectacle pour enfants de Hiller, avec mon mari en capitaine Crochet ! J'attends avec impatience, en 2002, Sophie's Choice, à Covent Garden ; c'est un opéra qu'écrit pour moi Nicholas Maw d'après le roman de William Styron.

     
    Vous aimez particulièrement les rôles de travesti ?

    Quand je suis en scène, je ne pense pas que je joue un travesti ; en même temps c'est un défi mais qui n'est pas très compliqué à relever. Si un metteur en scène m'aide et me fait trouver en moi des aspects que j'ignorais, tant mieux. De tous ces personnages, c'est Idamante que je préfère. Quant au Compositeur d'Ariane à Naxos, c'est un rôle fascinant mais épuisant, le plus exigeant que je connaisse. À chaque fois, je me dis : "Plus jamais !"

     
    Écoutez-vous souvent les enregistrements des interprètes qui vous ont précédée ?

    Très rarement, je n'ai pas envie d'être influencée. Une chose me frappe, pourtant, chez les plus anciens, ceux des années 1920 ou 1930, c'est leur liberté ; ils étaient peut-être moins respectueux que nous des partitions mais ils chantaient avec une telle musicalité et une telle joie ! J'aimerais prendre ce genre de risques."

     


    Discographie :

    Lieder de Gutstav Mahler, Alma Mahler, Korngold (Sony)
    When night falls/Berceuses (Sony)

     

    Le 13/04/2000
    Propos recueillis par Michel PAROUTY


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