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ENTRETIENS 29 mars 2024

Philippe Fénelon, en quête de vérité
© Patrick Riou

Il a réussi la quadrature du cercle. À 54 ans, après le Chevalier imaginaire, Salammbô, les Rois, Philippe Fénelon vient de donner naissance à son quatrième opus lyrique, Faust, qui sera porté sur les fonds baptismaux le 25 mai au Capitole de Toulouse. Portrait d'un compositeur qui a su séduire des patrons d'Opéras aux personnalités opposées.
 

Le 22/05/2007
Propos recueillis par Nicole DUAULT
 



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  • Depuis quand ĂŞtes-vous passionnĂ© par l'opĂ©ra ?

    Depuis très jeune, à l'époque où j'étais dans la classe d'Olivier Messiaen au Conservatoire. À Garnier, une loge était réservée aux étudiants
    j'Ă©tais le seul Ă  y aller.

     

    Pourquoi avoir choisi le mythe de Faust, et ce texte du poète autrichien Nikolaus Lenau, quasiment inconnu en France, plutôt que celui de Goethe ?

    C'est après avoir parlé avec Nicolas Joel, directeur du Théâtre du Capitole, que j'ai pensé à écrire un Faust. La structure du texte de Lenau en vingt-quatre fragments m'a intéressé. Ses trois mille quatre cents vers m'ont permis de reconstruire une dramaturgie en sept tableaux. Le thème abordé est bien entendu la quête de la vérité à travers la science, la religion, l'amour conjugal. Mon Faust est un rebelle, quand il signe un pacte avec le diable, celui-ci le pousse au crime. Il ne lui livre pas son âme mais se suicide et laisse la place à un autre personnage que j'ai conçu, qui est à la fois le poète, le narrateur qui parcourt l'opéra en le commentant. Il s'appelle Görg ; il est l'Homme, l'espoir.

     

    Pour SalammbĂ´, vous aviez fait appel Ă  l'Ă©lectroacoustique de l'IRCAM.

    Oui, mais l'électroacoustique n'est pas vraiment mon univers. Il y a encore beaucoup à écrire en do majeur ! Que signifie être moderne ? Le seul fait que j'écrive un opéra aujourd'hui veut dire que je le suis, car j'ai une réflexion sur le monde, une vision personnelle. Je ne reproduis pas un modèle du passé. Vous pouvez alors bien sûr penser que j'aurais pu opter pour un sujet contemporain, mais je dis des choses sur le monde d'aujourd'hui dans Faust.

     

    À Barcelone où vous vivez, vous êtes bien loin des chapelles parisiennes. On se demande alors comment vous avez réussi.

    Je suis un solitaire, et ne l'envisage pas sous un jour négatif. Je me suis construit à l'écart, je me suis donné seul les moyens d'exister.

     

    Dans quelles conditions travaillez-vous ?

    Tôt le matin. Comme en Espagne le déjeuner est à 14 h, j'ai du temps pour travailler de longues matinées. Et du point de vue pratique, je n'écris pas avec un crayon mais avec un stylo et du typex parce que je peux corriger rapidement. Quant à la question de l'audition interne, je dirais que je perçois ce que j'écris de manière globale, par le biais de l'architecture et de l'orchestration. Je ne pars pas d'une réduction pour piano comme cela se faisait couramment il y a cinquante ans, car quand on écrit d'abord au clavier, on a tendance à en rajouter dans l'épaisseur. En écrivant directement pour l'orchestre, on a au final une partition plus souple.

     

    Qu'est-ce que cette Judith que vous préparez pour l'Orchestre de l'Opéra de Paris et qui sera donnée à Pleyel en novembre ?

    Un monodrame, un monologue dans la lignée d'Erwartung de Schoenberg. C'est pour cette raison d'ailleurs que Gerard Mortier a souhaité que Judith soit créée à la salle Pleyel et non à l'Opéra. Je l'ai écrite pour Jeanne-Michèle Charbonnet. Il s'agit de l'adaptation d'une tragédie de Friedrich Hebbel construite en cinq tableaux et d'une durée d'environ cinquante minutes.

     

    Stéphane Lissner au Châtelet pour le Chevalier imaginaire, Hugues Gall à l'Opéra de Paris pour Salammbô, Thierry Fouquet à Bordeaux pour les Rois, Nicolas Joel à Toulouse pour Faust puis la saison prochaine Gerard Mortier à Paris pour Judith : vous avez réussi à faire jouer vos ouvrages lyriques dans des théâtres dont les directeurs sont des personnalités antagonistes.

    Ce sont surtout eux qui sont venus me chercher, Hugues Gall par exemple, que je ne le connaissais pas avant qu'il m'aborde pour travailler avec moi. Quant à Gerard Mortier, il est venu voir les Rois à Bordeaux, et c'est à cette occasion que j'ai fait sa connaissance. Qu'est-ce qui les réunit tous ? Une seule chose, bien suffisante à mes yeux : l'amour de la musique.

     

    Quels sont vos projets immédiats après Faust ?

    La soprano Aline Kutan, qui avait créé le rôle de Pasiphae dans les Rois, chantera le 6 juin à Bienne deux airs de concert que j'ai écrits sur des textes de Corneille, qui mettent en valeur sa voix de colorature et sont un clin d'œil au Ah, Perfido ! de Beethoven. Ensuite, les Solistes de Lyon-Bernard Tétu créeront deux pièces conçues autour du Cantique des Cantiques, et je poursuivrai aussi une collaboration avec le chorégraphe Michel Kelemenis le 30 juin à Marseille, pour un Pasodoble qui mettra en regard les timbres d'une banda avec les miens.

     

    Vous publiez également, cette fois en tant qu'auteur littéraire, des Histoires d'opéras chez Actes Sud.

    J'ai regroupé des textes que j'avais écrits pour les programmes de l'Opéra de Paris ainsi que d'autres, notamment sur Faust. J'y tente d'apprivoiser le sens d'oeuvres-clé comme Pelléas et Mélisande, la Damnation de Faust, Lulu, le Nez. L'écriture est pour moi une passion et une énigme. Depuis quarante-cinq ans, je tiens des carnets liés à la vie quotidienne. Ce qui m'intéresse, c'est le pourquoi des choses.




    À voir :
    Faust, de Philippe FĂ©nelon
    Création mondiale
    Choeur et Orchestre du Capitole
    direction : Bernhard Kontarsky
    Théâtre du Capitole, Toulouse
    Du 25 mai au 1er juin

    En savoir plus sur le compositeur :
    www.philippefenelon.net

     

    Le 22/05/2007
    Nicole DUAULT


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