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ENTRETIENS 20 avril 2024

Stefano Secco, l'évidence faite ténor

On y attendait Neil Shicoff puis Roberto Alagna, c'est finalement Stefano Secco qui a assuré les deux séries de représentations du Simon Boccanegra très controversé de Johan Simons. Véritable révélation que ce ténor italien au timbre authentiquement ensoleillé, aux antipodes de Jonas Kaufmann, auquel il succède dans la Traviata hors norme de Christoph Marthaler.
 

Le 15/10/2007
Propos recueillis par Mehdi MAHDAVI
 



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  • Les attentes du public sont-elles plus fortes vis-Ă -vis d'un tĂ©nor italien ?

    J'ai beaucoup de collègues étrangers, très célèbres, et le public attend tout autant d'eux. Néanmoins, les chanteurs italiens sont mieux à même de défendre le répertoire italien, car ils ont une meilleure compréhension du texte, et une prononciation plus naturelle. Cela ne m'a pas empêché pas de chanter dans Manon et Werther de Massenet, les Pêcheurs de perles de Bizet, et même la Fille du régiment de Donizetti au début de ma carrière, bien que je ne parle pas le français.

     

    Alfredo aime-t-il Violetta, où l'idée qu'il se fait de cet amour ?

    Alfredo est un être très impulsif. Je ne sais pas s'il aime vraiment Violetta, bien qu'il le lui répète sans cesse. Il a un complexe vis-à-vis de son père, il est comme un enfant. C'est un rôle difficile à chanter, parce que la ligne est belcantiste, avec beaucoup de gruppetti. Il requiert une voix très élastique, notamment pour les aigus piano à la fin du duo du premier acte. J'essaie de faire de mon mieux.

     

    Comment vous sentez-vous dans les productions qui s'écartent de la tradition, comme le Simon Boccanegra très controversé auquel vous avez participé ces deux dernières saisons, ou cette Traviata ?

    Au début, c'était un peu étrange, mais je m'en suis imprégné, et ce n'est désormais plus un problème. Je cherche à faire de mon mieux pour ressentir les nécessités d'une mise en scène. Dans les productions très classiques qui ont cours en Italie, les chanteurs se contentent de chanter en regardant droit devant eux. Je ne suis absolument pas opposé à la modernisation, car des compositeurs comme Verdi me semblent éminemment modernes. Comment exprimer la douleur en faisant le plus beau son qui soit ?

     

    Vous avez chanté dans la même production de Simon Boccanegra sous la direction de deux chefs différents. Que cela vous a-t-il apporté ?

    C'était d'autant plus intéressant. J'ai envie de saisir les idées musicales de chefs tels que Sylvain Cambreling, James Conlon, ou Daniel Oren, qui connaissent parfaitement la voix. Cela me fait progresser. Il peut y avoir tant de points de vue différents. Je m'ennuierais si je faisais toujours les mêmes respirations, les mêmes couleurs, les mêmes phrasés.

     

    Vous allez chanter votre premier Don Carlo sur la scène de l'Opéra Bastille en juin prochain. Avez-vous le sentiment de prendre un risque ?

    Chaque prise de rôle présente un risque. Don Carlo est un rôle principalement lyrique. Son premier air demande beaucoup de legato, tout comme les duos avec Elisabeth. La scène de l'autodafé est plus tendue, mais il en va de même du rôle de Gabriele Adorno.

     

    Vous avez beaucoup de rôles verdiens à votre répertoire. Jusqu'où pensez-vous aller ?

    J'ai beaucoup chanté le Duc de Mantoue dans Rigoletto, peut-être deux cents fois, et Alfredo dans la Traviata. Je vais aborder Rodolfo dans Luisa Miller la saison prochaine à Munich. L'air rappelle Simon Boccanegra, la cabalette Rigoletto, et certaines scènes sont aussi tendues que dans Don Carlo. Et cela suffira pour Verdi ; je ne chanterai ni Ernani, ni le Trouvère. Ou plus tard peut-être. On ne sait jamais ce que la vie vous réserve.

     

    Vous avez connu un début de carrière assez fulgurant. Ne craignez-vous pas parfois d'aller trop vite ?

    Je vais faire mes débuts à Covent Garden le moins prochain en Nemorino de l'Élixir d'amour, un rôle parfait pour passer une étape importante. Mais je pense devoir chanter un peu moins dans les années qui viennent. Il est un peu difficile de dire non à des chefs, des metteurs en scène, des théâtres importants, mais il y a tant d'exemples de collègues qui se trouvent contraints à annuler, qui doivent se faire opérer. Il faut savoir trouver un équilibre : dire non suffisamment pour pouvoir dire oui en toute quiétude.

     

    Le public est-il différent selon les pays ?

    Les réactions du public varient peu d'un pays à l'autre. Cependant, le public des premières est un peu froid comparé aux représentations suivantes. En Italie, surtout à Rome, l'opéra attire de moins en moins de spectateurs. Les politiciens arguent d'un manque de moyens, alors qu'il y a suffisamment d'argent pour les autres genres musicaux. Il n'y a jamais d'opéra à la télévision, pas de publicité, parce qu'on considère que c'est ringard, que les jeunes n'en écoutent pas. On ne trouve plus un magasin de disques classiques digne de ce nom à Milan. Et pourtant, voyez Luciano Pavarotti, l'un des chanteurs les plus célèbres du monde était un chanteur d'opéra.

     

    Quels ténors écoutez-vous lorsque vous préparez un rôle ?

    J'écoute toujours Pavarotti, son timbre est si frais. J'écoute aussi Domingo, Carreras, et mes contemporains : Roberto Alagna est un modèle pour la prononciation du français.

     

    Est-ce la part d'inné ou d'acquis qui est la plus importante dans votre voix ?

    Une voix naturelle est un risque. Il faut savoir comment l'utiliser, car nous répétons tous les jours, en chantant différemment selon les indications du chef d'orchestre. Cela peut être très dangereux si la technique n'est pas suffisamment solide. Le souffle et le soutien sont fondamentaux. Lorsque je me sens un peu fatigué, je prends une grande respiration, et tout va beaucoup mieux. Je travaille chaque jour certaines phrases difficiles, le legato, les nuances dans l'aigu pour maintenir la tonicité, l'élasticité de la voix.

     

    Y a-t-il des rĂ´les qui vous font rĂŞver ?

    Des Grieux dans Manon Lescaut de Puccini, mais je ne le chanterai pas avant de longues années. Pour le moment, je ne rêve que de garder une voix saine, agile, et de bien interpréter les rôles qu'on me confie.

     

    Le 15/10/2007
    Mehdi MAHDAVI


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